La déclaration, selon laquelle, les soldats…n’ont même pas une kalachnikov …, au premier accrochage, ils détalent a été faite par le Premier ministre Moussa Mara, lundi dernier, à la tribune de l’amphithéâtre Colbert du Palais-Bourbon, siège de l’Assemblée nationale, sonne encore comme l’expression d’un double « je », après sa visite hasardeuse à Kidal le 17 mai dernier. Moussa Mara a quitté Kidal sur la pointe des pieds, avant d’engager gaillardement notre armée dans une guerre aux conséquences incalculables. Entre la bataille perdue de Kidal du 21 mai, et le lundi 6 Octobre, beaucoup d’eau a coulé sous le pont des martyrs.
Sans faire son mea-culpa, Moussa Mara s’est hissé à la tribune de l’Assemblée française pour affirmer : « L’EUTM forme en ce moment le cinquième bataillon de notre armée. C’est très bien. Mais si les soldats sont dépourvus de matériel, s’ils n’ont pas même une kalachnikov, à quoi bon? Au premier accrochage, ils détalent... ». Vous ne rêvez pas, seulement le ridicule ne tue plus certains. Il y a moins de cinq mois, le lundi 19 mai dernier, à la cérémonie de clôture du 3e congrès de la Ligue des prédicateurs du Mali (Lipma) qu’il a présidée à 17h à la grande mosquée de l’ACI 2000, le Premier ministre Moussa Mara déclarait aux érudits : « les armes dont nous disposons nous permettent de faire de Kidal ce que nous voulons». On peut s’interroger sur ce qu’a fait Moussa Mara de ces armes ? Mara doit s’expliquer et se justifier si cette guerre ne visait pas à livrer les armes du Mali à l’ennemi. Parce que jusque-là aucun bilan définitif n’a été fait de cette aventure impromptue dont il est le seul à en avoir le secret. Outre les victimes des 17 et 21 mai, il y a des dizaines de 4X4 et de
blindés légers saisis, et le coup porté à la reconstruction de
l’armée, au moral de la troupe. La fuite de ses responsabilités de l’autorité politique, qui s’est tout simplement débinée, en la rejetant sur....l’armée. Dans ses conditions, comment réussir la soumission cardinale de l’autorité militaire à l’autorité politique ? Ces conséquences de la visite du 17 mai à Kidal interpellent la vigilance de tous les Maliens.
Pour quelle fin, le Premier ministre Moussa Mara a-t-il effectué cette visite inopportune contre toute indication de la Minusma dont il implore aujourd’hui le renforcement ?
La déclaration de Mara au Palais Bourbon mérite attention comme le mériterait un cheveu dans la soupe. Le Premier ministre Moussa Mara est-il bien placé pour dire que nos vaillants militaires détalent, comme s’il parlait de lapins ? Pour autant, c’est lui qui a défendu et justifié à l’Assemblée nationale du Mali, les dépenses extrabudgétaires et inopportunes comme l’achat du Boeing présidentiel 737 à 21 milliards de FCFA. Mara doit-il vendre le Mali à l’extérieur avec un tel propos ? En outre, de nombreux marchés douteux de torchons ou de chaussettes de plusieurs milliards de surfacturation ont été passés pendant que le Premier ministre Mara est en poste. Au nom de l’armée et de la Défense nationale.
L’avion présidentiel de malheur, mal acquis et non immatriculé malien, les marchés douteux d’équipements de l’armée, et les délits d’initiés qui les entourent, ce sont les ingrédients qui nous ont valu (à nous Maliens) l’inimitié du FMI et de la Banque mondiale, à propos desquels le rapport du Vérificateur général est attendu. Certainement, avec ces recommandations, les hautes autorités maliennes se rendront compte de l’ampleur de l’escroquerie en bande organisée et du banditisme d’Etat, qui avait cours au vu et au su du gouvernement. Un adage Bambara dit que « le poisson pourrit par sa tête… ». Pendant que le pays pique droit du nez, un avion présidentiel à 21 milliards ; un fonds de garantie de 100 milliards pour différents marchés, sur lequel 14 milliards ont été frauduleusement transférés vers un compte à
l’extérieur ; 29 milliards reconnus de surfacturations, sont autant de « manque à gagner », pour reprendre une expression qu’utilise habituellement le vérificateur, pour ne pas dire de « l’argent détourné », sous le regard du Premier ministre Moussa Mara. Entre l’avion présidentiel et les kalachnikovs pour les militaires, où est allée la priorité de nos hautes autorités ? (a’uzu billahi min ash shaitani rajimi) A l’avion de prestige ! (Allah Akbar !). Le Premier ministre file certainement du mauvais coton en parlant des militaires qui détalent…
B. Daou