Dans le but de faciliter les enquêtes relatives aux graves faits de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et de crimes d’agression, le gouvernement du Mali vient de signer avec la Cour pénale internationale (CPI) un accord de siège autorisant cette dernière à ouvrir un bureau dans notre capitale, qui comprendra un représentant du Procureur et tout le personnel nécessaire. C’est dire que l’on s’achemine vers l’inculpation des membres de l’ex-junte qui ont le sang des 21 bérets rouges sur les mains et des rebelles qui ont assassiné et mutilé dans le nord du Mali.
Au moment où le gouvernement du Mali est en train de procéder à la libération au compte-goutte des criminels de la rébellion, la CPI, au contraire, s’active à réunir toutes les charges contre ces présumés auteurs de crimes contre l’humanité. Il s’agit, en effet, pour cette juridiction internationale de se pencher sur » la situation au Mali depuis le mois de janvier 2012″. On se rappelle que dans sa lettre de saisine à la CPI, le gouvernement du Mali avait affirmé que des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre avaient été commis dans le nord de notre pays. Ce qui avait donné lieu à l’ouverture d’une enquête de la CPI sur les crimes commis par les groupes armés dans le septentrion.
Le gouvernement du Mali avait souligné dans sa saisine de la CPI que des actes d’exécutions sommaires de soldats de l’armée malienne, de viols, de massacres de civils, d’enrôlement d’enfants soldats, de tortures, de pillages, de disparitions forcées et de destructions de symboles de l’Etat (hôpitaux, tribunaux, mairies, écoles), d’églises, de mosquées et de mausolées avaient été commis par les groupes armés islamistes ou touareg.
S’agissant de la situation au sud du pays, où 21 bérets rouges et autres militaires ont été victimes d’exécutions sommaires, la CPI devra procéder à l’écoute notamment des membres de l’ex-junte auteurs présumés de ces crimes contre l’humanité.
Notre pays étant « dans l’impossibilité de poursuivre ou de juger les auteurs » de ces crimes, il s’agira pour la CPI de prendre ses responsabilités dans ce sens. C’est en tout cas, ce qu’elle est en train de faire avec l’ouverture prochaine de son bureau dans notre capitale.
Il ne s’agit là d’ailleurs que de rendre justice aux victimes et à leurs parents quand on sait que l’Etat du Mali est dans l’impossibilité de mener un tel travail au vu de la modicité de ses moyens et de sa faiblesse actuelle.
Etat partie au Statut de Rome, traité fondateur de la CPI, le Mali reconnaît la compétence de la Cour. C’est le cinquième pays africain, après l’Ouganda, la République démocratique du Congo, la Centrafrique et la Côte d’Ivoire à demander à la CPI d’enquêter sur des crimes commis sur son territoire. Premier tribunal pénal international permanent chargé de poursuivre les auteurs présumés de génocides, crimes contre l’humanité et crimes de guerre, la CPI n’intervient que si la justice nationale ne peut pas ou ne veut pas engager de poursuites contre les auteurs présumés de ces crimes. Tel est le cas aujourd’hui du Mali où la justice nationale aura toutes les difficultés du monde à interpeller voire juger les auteurs présumés de crimes commis tant au nord qu’au sud du pays.
Mamadou FOFANA