Une délégation du bureau national de Guinna Dogon (Association pour la protection et la promotion de la culture dogon) vient d’effectuer du 4 au 12 septembre 2012 une mission dans les localités de Douentza, Gao, Tombouctou et Kidal sous le contrôle des groupes armés. Objectifs : manifester la solidarité, l’amitié et la fraternité du peuple dogon à toutes les communautés du nord considérées comme leurs cousins (sonrhaï, tamasheq et arabe), vivant sous occupation et recueillir les doléances des occupants.
Le compte rendu de cette mission a fait l’objet d’une conférence de presse animée par Mamadou Togo, président de Guinna Dogo ; Modibo Kadjoké, secrétaire général adjoint de Guinna Dogon le samedi 15 septembre 2012 à la Maison de la Presse du Mali. C’était en présence des membres de la commission des sages, de Tiébilé Dramé, 1er vice président de la coalition pour le Mali etc. Et d’une foule nombreuse d’hommes et de femmes épris de paix.
Cette mission qui s’est rendue dans les villes occupées a rencontré, tour à tour, les membres du cadre de concertation à Gao, les responsables du Mujao, les jeunes de la ville, les ulémas, le personnel de la santé etc. A Tombouctou, la mission a eu des entretiens avec les notables de la ville et les responsables d’Ansardine. Mais c’est à Kidal, et plus précisément à Anefis que la mission a eu la chance de rencontrer le leader d’Ansardine, Iyad Ag Aghaly dont les hommes occupent les villes de Tombouctou et de Kidal. Selon le chef de la mission de Guinna Dogon, Mamadou Togo, le leader d’Ansardine s’est montré disposé au dialogue. Il a réaffirmé son attachement à l’intégrité territoriale du pays, à condition que la charia soit appliquée. Cette mission a servi de cadre pour les membres de la délégation de recueillir le message des occupants à l’intention des plus hautes autorités du pays.
Compte tenu de leur importance, la primeur de ces différents messages a été réservée aux plus hautes autorités. Selon le président de Guinna Dogon, les revendications des occupants sont difficiles à déchiffrer. Mais ils sont dans une dynamique de dialogue. En tant qu’association culturelle, le plus important, aux yeux de Guinna Dogon, est d’engager le dialogue. «Quand deux personnes sont en conflit, et ne se parlent pas, il est difficile de se comprendre », a martelé M. Togo. C’est pourquoi, les membres de Guinna Dogon restent convaincus que le cousinage peut jouer un grand rôle dans le contexte. Seul facteur limitant, ceux qui occupent actuellement le nord du pays ne sont pas tous des Maliens, donc ne respectent pas, forcement, les liens sacrés du cousinage à plaisanterie. Malgré tout, Guinna Dogon reste convaincu que la sortie de crise est, aujourd’hui, à porté de main, rien qu’avec les valeurs du cousinage à plaisanterie.
Selon Modibo Kadjoké, ancien ministre, la délégation a fait certains constats sur le terrain. Par exemple, à Douentza, un Toguna a été vandalisé après la récente occupation. L’économie de la zone tourne au ralenti. Actuellement, la santé est le seul service fonctionnel dans ces zones. Les cours de remédiation ont commencé sur la base du programme national du ministère de l’éducation.
Et cela en vue des examens spéciaux du mois d’octobre que le gouvernement organise à l’intention des élèves ressortissant des zones occupées. Mais il y a un très fort besoin des services sociaux de base caractérisé par un manque criard de ressources humaines. Autre souhait : le retour des Ong pour soulager les populations qui vivent dans la précarité. Les populations ont tenu à saluer l’initiative de Guinna Dogon qui témoigne, selon eux, de l’attachement des dogons aux liens séculaires qui lient les deux peuples.
Selon Mamadou Togo Guinna, son association, n’a pas été investie pour aller négocier. «Nous n’avons reçu ni mandat, ni financement de personne pour nous rendre au nord », précise- t-il. Selon le Colonel Issa Ongoïla, membre de la commission des sages de Guinna Dogon, cette mission est une réussite. «Voire une fois, vaut mieux qu’entendre dix fois ». Pour lui, à travers la culture, on peut ramener la paix. « Agir vaut mieux que parler », dit un adage dogon. C’est pourquoi, l’association a fait, au passage, des gestes symboliques aux populations des zones occupées.