De par l’opacité qui entoure le projet et la non adhésion des grandes forces sociopolitiques, sans risque de se tromper, la concertation tant voulue par le regroupement radical est un évènement mort-né. Déjà, l’un des plus grands regroupements politiques, Ibk 2012, doute du sérieux et de la crédibilité de la rencontre.
Suite à la chute du régime Att, le Mali est devenu un sol propice pour les perturbateurs. Dans cet élan, différents groupements ont vu le jour et chacun se positionnant selon sa position politique affichée: ceux qui étaient proches du régime Att et qui défendent becs et ongles le retour à la normalité constitutionnelle se sont retrouvés dans le Front uni pour la sauvegarde de la démocratie et de la République (Fdr) les frustrés ayant créé la Coordination des associations patriotiques du Mali (Copam) et les indécis se sont dispersés entre la Convergence pour sauver le Mali (Csm) et l’Alliance des démocrates patriotes pour une sortie de crise (Adps). Auxquels vient s’ajouter le regroupement Ibk 2012 dont la position a tellement varié au fil des jours que l’on ne sait plus où le classer.
Si le autres ont convenu de la mise en place d’un gouvernement d’union nationale sans faire de la tenue de la concertation nationale un préalable, ce n’est pas le cas de la Copam qui est restée figée sur l’exigence de la tenue d’une convention nationale avant même de parler de feuille de route de la transition ou de gouvernement d’union nationale. Dans sa logique, ceci devrait émaner des conclusions de ladite concertation.
Le président Dioncounda Traoré, en fin politique a su trouver la parade en promettant fermement que la concertation aura bel et bien lieu et qu’il fallait mettre en place un gouvernement consensuel pour travailler dans le sens de l’unification afin de sauver le Mali des divergences profondes au sein de la classe politique, en cette période de menace sérieuse des groupes islamistes armés. En d’autres termes, pour le président de la transition qui a tenu à mener une concertation à sa manière en rencontrant les composantes des forces vives de la nation, la concertation nationale ne pourrait se tenir qu’après le rapprochement des positions sur l’essentiel : la mise en place d’un gouvernement d’union nationale pour prendre en charge la première préoccupation nationale qui est la reconquête du nord du pays.
Mais il se trouve que le Premier ministre Cheick Modibo Diarra avait déjà sponsorisé la Copam qui lui est très proche et selon certaines sources avait même participé au financement de la convention nationale avortée que ce groupement avait organisé les 21 et 22 mai 2012. L’on se rappelle que c’est à partir du regroupement des participants à cette convention que la marche ayant abouti à l’agression de Dioncounda avait pris forme.
Le Premier ministre rattrapé par ses manœuvres intempestives
C’est donc logique que le Premier ministre veuille dribler le président par intérim pour se dépêcher de s’approprier l’initiative et sortir en catimini un décret mettant en place le Comité technique chargé de définir les termes de référence de la Concertation nationale. Dans ce Comité dirigé par un membre influent (pardon ex-dirigeant) de la Copam, Adama Traoré, on ne retrouve que des proches du Premier ministre recrutés dans des organisations acquises à son soutien comme le haut conseil islamique, le regroupement IBk 2012, etc.
Justement, en ce qui concerne Ibk 2012, c’est l’un de ses dirigeants, Bocar Moussa Diarra, devenu ministre délégué chargé de la promotion des langues nationales, qui était désigné par le Premier ministre comme rapporteur du Comité technique pour la mise en place des termes de référence de la concertation nationale. (copié sur Maliweb.net) Pourtant ce même Bocar Moussa Diarra qui sera une des pommes de discorde entre le Premier ministre et ce regroupement car Cheick Modibo Diarra avait tripoté le décret de nomination des membres du gouvernement uniquement pour sortir ce monsieur dont ses proches disent qu’ils doutent de son Cv sur lequel il est indiqué qu’il a une licence de l’Ena alors qu’il est connu comme maître de dessin du second cycle. Sans compter qu’au niveau de l’enquête sur la moralité, la vente scandaleuse de l’immeuble Bar-Mali suit Bocar Moussa Diarra comme son ombre, après avoir divisé l’Um-Rda dont beaucoup de cadres sont entrés en défiance après son parachutage à la tête du parti par un lobby.
Ainsi donc, au motif de vouloir combler le vide de la constitution sur la transition, notamment sur sa durée, les organes de la transition, la défense de l’intégrité territoriale du pays, la tenue des élections et l’audit des finances publiques, ladite concertation doit réunir toutes les sensibilités du pays. Mais d’ores et déjà, non seulement l’idée est rejetée par la majorité des groupements politiques et de la société civile, mais l’avocat défenseur du projet, la Copam, a entre temps volé en éclats. Le sieur Adama Traoré qui représentait la Copam au sein du fameux Comité de préparation de la concertation nationale a été chassé de la Copam. Le porte-parole de la Copam, Mohamed Tabouré, a laissé entendre, le samedi 8 septembre, que Adama ne représente plus leur organisation au sein du Comité chargé de définir les termes de référence de la concertation nationale. Cheick modibo Diarra se trouve ainsi rattrapé par ses manœuvres intempestives.
Le Rpm émet des doutes
Faut-il le souligner, même le regroupement Ibk 2012 qui soutenait la tenue de la concertation nationale, a émis des doutes quant au sérieux de l’organisation de l’évènement. Le Rpm a affirmé à qui veut l’entendre, que l’organisation même de la concertation nationale n’est pas bien justifiée dans le contexte actuel car il y a une attente de neutralité du pouvoir qui n’a pas été respectée. Pour le parti d’Ibk, le contexte est assez orienté et occulte le caractère récurrent de certains problèmes non encore résolus depuis 1960, notamment l’atteinte à l’intégrité territoriale, la mauvaise gouvernance (corruption, impunité, népotisme, etc.), les rapports conflictuels entre l’Administration et les citoyens. A en croire le parti des tisserands, la liste des participants suscite beaucoup d’interrogations quant à sa composition et sur la variation fréquente, non motivée, du nombre et du statut des participants. Ces constats sous-tendent la nécessité de fournir des informations complémentaires pour éviter les duplications, les exclusions à dessein et une dangereuse instrumentalisation des acteurs à l’avance a-t-il ajouté.
« La concertation doit être organisée par le Gouvernement sous la Haute Autorité du président de la République par intérim, tout en préservant le caractère souverain des assises, entre autres, par rapport au choix de la personnalité qui doit les présider. Ce choix ne devrait point être occulté » a réclamé le Rpm. Or, selon nos informations, la ou les personnalités qui veulent diriger les assises sont rejetées par tous.
Risques de récupération
Reconnaissons qu’en l’état actuel des choses, personne n’est d’accord avec la manière dont on veut piloter cette concertation afin d’orienter ses conclusions dans le sens de légitimer les ambitions d’un petit groupe: le clan du Premier ministre Cheick Modibo Diarra qui, au lieu d’être un rassembleur comme l’on devait s’y attendre, est le personnage le plus conflictuel de la transition.
Au Mp22, un mouvement connu comme un des membres influents de la Copam, le pouvoir qui doit organiser les assises n’est pas neutre. Pour ce groupe du député Mariko, il y a des risques de récupération car l’ancien régime est représenté par le Fdr et Cheick Modibo Diarra est à la solde de l’UDPM: «Même si le peuple souverain doit être consulté, cela ne doit pas se faire avec un traitre comme Amion Guindo que nous avons éjecté avec son escroc de service Adama Traoré » avons nous extrait d’un discours du secrétaire général du parti Sadi, membre du Mp22.
Mais s’agissant du Fdr, précisons que ce regroupement a décidé, pour le moment en tout cas, de ne pas participer à cette concertation version Cheick Modibo Diarra, estimant que ce sont des agitations stériles dont le pays n’a nullement besoin.
Sans la participation des forces vives de la nation, ce ne serait qu’une parodie de concertation nationale et signerait le énième échec de Cheick Modibo Diarra dans sa gestion de la transition.