La Coordination des Mouvements de l'Azawad, regroupant trois groupes armés du nord du Mali (MNLA, HCUA, MAA), a annoncé mardi, dans un communiqué, la mise en place d'une "coordination militaire".
Cet acte posé par le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), le Haut-conseil de l'Unité de l'Azawad (HCUA) et le Mouvement arabe de l'Azawad (MAA), va, selon les observateurs, à l'encontre des pourparlers de paix dont le troisième round vient de prendre fin à Alger (Algérie).
La structure est composée de dix officiers dont le commandement est assuré par le colonel Mohamed Ag Najim. Elle a été créée, précise le texte, à l'issue d'une réunion qui a rassemblé les secrétaires généraux des mouvements, des "officiers supérieurs" et des personnes ressources, à Anefis (nord du Mali) du 26 au 28 octobre 2014.
Trois jours avant, le HCUA avait "incité les populations à la haine et à la violence vis-à-vis de tous les autres Maliens" lors d'un meeting tenu à Kidal le 23 octobre 2014.
Selon Moussa Ag Acharatoumane, porte-parole de la coordination, cette nouvelle coordination militaire est une réponse à "l' insécurité grandissante dans nos régions et vise à protéger nos populations contre les agissements de toute forme d'organisation milicienne gouvernementale".
Cette coordination, a-t-il ajouté, "s'inscrit dans la droite ligne de la demande faite par la MINUSMA et la force Barkhane de contenir et éradiquer de nos villes toute forme d'insécurité".
Pour Kader Toé, chroniqueur indépendant dans la presse malienne, cette "attitude belliqueuse" des groupes armés vise à faire " pression sur le gouvernement et les médiateurs avant l'ultime round des pourparlers".
"Aujourd'hui, il ne fait l'ombre d'aucun doute que le projet fédéraliste des groupes armés a échoué parce que les médiateurs ont compris que c'est un choix minoritaire dans le nord du Mali. Mais, visiblement, le MNLA, le HCUA et le MAA n'ont pas encore renoncé à ce projet et brandissent aujourd'hui une menace militaire pour faire pression sur Bamako et le groupe des médiateurs", ajoute-t-il.
"Pourquoi une coordination militaire alors que les accords de Ouagadougou (Burkina) impose le désarmement et le cantonnement des mouvements armés" ?, s'interroge par ailleurs un diplomate d'un pays africain en poste à Bamako et ayant requis l'anonymat.
Pour lui, "la première source d'insécurité des populations de cette zone est le refus de ces groupes de déposer les armes car les terroristes profitent de cette situation pour commettre des attentats. La meilleure façon de contribuer aujourd'hui à la paix et à la sécurité, n'est pas de créer une coordination militaire, mais de tenir les engagements pris à Ouagadougou et à Alger en déposant les armes et faisant confiance à la Minusma et Barkhane pour sécuriser le nord".
"Cette idée est un piège grotesque pour s'allier la sympathie de la Munisma et Barkhane", pense l'attaché miliaire d'une chancellerie occidentale qui ne souhaite pas être nommé. "Les dernières opérations dans le Gourma (Gao) et à Kidal ont principalement touché ces mouvements armés, surtout le MNLA. Pour ne pas être affaibli davantage, ils veulent endormir la méfiance des forces onusiennes et françaises en se faisant passer pour leurs alliés dans la sécurisation du nord.. Curieusement, quelques jours avant la création de la coordination militaire, le HCUA avait exhorté les populations à s'organiser pour attaquer les mêmes forces", argumente-t-il.
En tout cas, pour le gouvernement malien qui réagissait par le biais d'un communiqué, les actes posés par la coordination des mouvements de l'Azawad "compromettent les efforts de la communauté internationale visant au rétablissement de la sécurité dans le nord du pays et à la signature d'un accord de paix global et définitif".
Un avis partagé par la majorité des experts consultés sur la question et qui pensent que les propos tenus lors du meeting du 23 octobre et la création d'une coordination militaire sont " contraires aux engagements pris par les responsables de ces trois mouvements, relatifs au respect de l'Accord de cessez-le-feu et de la Déclaration de cessation des hostilités" signés en mai dernier à Kidal sous les auspices de l'Union africaine.
Les autorités maliennes souhaitent aujourd'hui que le Conseil de sécurité des Nations unies se saisisse de "la question en vue de prendre les mesures appropriées face à de tels agissements".
Une "requête pertinente" selon des interlocuteurs pour qui, si rien n'est fait "pour contraindre les groupes armés à renoncer définitivement à la lutte armée", les pourparlers n'auront "aucune chance d'apporter la paix au Mali".