Devant être jugés, le mardi 9 décembre à la Cour d’Appel de Bamako, quatre présumés terroristes dans le nord du Mali durant l’occupation de la quasi-totalité du territoire, en 2012, ne seront pas situés sur leur sort au cours de cette dernière session de l’année 2014. Et pour cause : leurs dossiers ont tout simplement été renvoyés par la Cour pour comparution à une prochaine session des Assises.
Etant les seuls cas, au cours de cette session, relatifs aux crimes abominables commis dans le nord du Mali durant la douloureuse crise de 2012, leurs dossiers font partie des plus attendus par l’opinion publique malienne. Il s’agit de l’affaire qui oppose le ministère public à quatre présumés terroristes qui ont regagné les rangs de ceux qui ont transformé la partie septentrionale du pays en une zone de non-droit où des crimes abominables ont été perpétrés.
Les quatre présumés terroristes sont notamment Abou Ibrahim, Abou Dardar, Abou Bachir et Hassani Ould Abdallah alias Abou Saïd. Tous de nationalité malienne (les noms qu’ils portent leur ont été attribués par leurs chefs » djihadistes « pour leur intégration définitive).
Si Abou Dardar, Abou Bachir et Hassani Ould Abdallah alias Abou Saïd ne devaient comparaitre que pour deux chefs d’accusation à savoir «crime d’association de malfaiteurs» et «acte de terrorisme», le nommé Abou Ibrahim, âgé de plus de 50 ans, est accusé de participation à «un mouvement insurrectionnel, rébellion, détention illégale d’arme et de munition de guerre» en plus des autres crimes reprochés aux trois premiers.
Abou Ibrahim a fait partie, durant toute l’occupation, des membres influents du Mouvement pour l’Unicité et le Djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) qui avait investi la région de Gao après y avoir chassé les combattants du Mnla. Au sein de cette organisation terroriste, Abou Ibrahim a successivement servi d’interprète, de prêcheur, d’agent au niveau du tribunal islamique où des mains et des pieds étaient coupés, coursier et transporteur. Pire, il fut même soldat et membre actif du comité mis en place par le Mujao, qui le payait en conséquence, pour discuter avec les différentes délégations de la société civile malienne comme le Haut Conseil islamique dirigé par l’imam Mahmoud Dicko. Ce n’est qu’après l’intervention de l’Opération Serval et sa fuite de la ville de Gao par la voie fluviale qu’il a été interpellé dans la quatrième région administrative, Ségou, par la Sécurité d’Etat. Celle-ci avait longtemps l’œil sur ses agissements en sa qualité d’élément actif du groupe » djihadiste » Mujao auquel il appartenait et dont il a servi les intérêts. Interrogé à l’enquête préliminaire, il a déclaré avoir été dépouillé de tous ses biens (3 millions FCFA) pour justifier son alignement aux côtés des membres du Mujao.
Quant à Abou Dardar, Abou Bachir et Hassani Ould Abdallah alias Abou Saïd, ils se sont rendus à Tégharghar sous instigation de certains chefs » djihadistes » notamment un certain Boudama et Qassam réputés être proches d’Alqaeda au Maghreb islamique (Aqmi). Sur les lieux, ils ont été répartis entre différents Katibas comme El Fourquane, Moulahamoum, El Ansar ou encore Tarek Ben Ziad qui ne sont autres que des instances décentralisées de formation idéologique et de maniement d’armes. Leur rôle a, ensuite, constitué à s’infiltrer dans les mosquées pour convaincre certaines personnes vulnérables de rejoindre les rangs des coupeurs de mains qui ont sévi dans le nord du Mali.
Ce sont, entre autres faits, qui devaient être débattus, le mardi dernier, à la Cour d’Appel de Bamako où une foule curieuse attendait. Mais, constatant que les accusés n’étaient pas présents, le ministère public a réclamé et obtenu le renvoi du dossier à une prochaine session. Soit dans, au minimum, six mois.
Aboubacar DICKO