Moustapha Dicko, enseignant, ancien ministre, ancien ambassadeur, ancien député, ancien parlementaire panafricain et actuellement secrétaire général de la Commission nationale pour les Cultures Africaines et la Francophonie se livre en exclusivité à Infosept. En dépit son calendrier chargé, il a accepté de répondre aux questions que nous nous posons qui portent, entre autres, sur les raisons de la volte-face de l’Adema-PASJ après le premier tour de l’élection présidentielle, malgré la signature de la plateforme qui demandait le report de voix au second tour sur le candidat du FDR le mieux placé, les contre-performances du parti aux récentes élections, le choix de la direction du parti de soutenir la majorité. Il revient aussi sur la situation actuelle du pays et de l’Adema-PASJ avec les récentes démissions de ses camarades d’hier. Il nous parle également d’un groupe de militants réunis au sein du MRP (Mouvement pour le Renouveau du Parti) qui demande la mise en place d’un Comité transitoire en lieu et place du Comité Exécutif actuel.
Infosept : Vous avez été ministre de l’Enseignement Supérieur. Alors que vous étiez entrain de faire des reformes, pourquoi votre départ précipité sept mois seulement après votre nomination ?
Moustapha Dicko : C’est peut-être une question à poser aux plus hautes autorités. Je pense que la formation du Gouvernement relève de l’autorité du Chef de l’Etat et du Premier ministre. C’est eux qui peuvent expliquer pourquoi tels entrées ou départ.
Ce que je puis dire c’est que comme par le passé, j’ai donné le meilleur de moi-même pour faire avancer le secteur où j’étais. Maintenant, un Gouvernement c’est toujours comme : on y entre un jour et forcement on en sort un jour et cela ne dépend pas de l’intéressé mais de l’appréciation du travail de l’intéressé, de la situation sociopolitique des intérêts de celui qui décide. Il y a eu changement de Premier ministre, donc un nouveau Gouvernement, je n’ai pas été retenu dans l’équipe et c’est tout ce je puis dire sur cette question.
Infosept : Au second tour de la présidentielle de 2013, le candidat de l’Adema PASJ, M. Dramane Dembélé a appelé à voter pour IBK alors que le parti avait signé une plateforme d’alliance avec les partis du FDR dont Soumaïla Cissé était le porte étendard. Pourquoi ce revirement ?
Moustapha Dicko : Est-ce que vous êtes sûr que si le parti avait réellement signé cette plateforme, que le candidat de l’Adema aurait pu amener le parti dans une autre direction ? Il y a un hiatus entre la signature de cette plateforme et surement les positions profondes du parti. Et, je vais dire que, je ne suis pas de ceux qui diabolisent M. Dramane Dembélé mais je n’ai pas voté IBK parce que Dramane Dembélé a dit de voter IBK. Vous savez ce qui s’est passé ? Ce n’est pas Dramane qui a appelé à voter IBK, c’est la Direction nationale du parti au cours de sa réunion qui a décidé de soutenir le candidat IBK. Et, la majorité de ceux qui se sont exprimés ce jour sont allés dans ce sens. Même ceux qui étaient dans la logique d’apporter leurs soutiens au candidat du FDR ont été obligés de reconnaitre après que quand ils sont partis chez eux avec le nom d’un autre candidat, leurs militants leur ont dit : nous ici on soutient IBK.
Quand au second tour, nonobstant la position de la direction nationale et de l’essentiel de nos militants et sympathisants, ils sont retournés avec le nom de Soumaïla Cissé (pour qui j’ai beaucoup d’estime et de respect), leurs militants leurs ont dit : est-ce vous n’avez pas compris que chez nous ici on vous l‘avait dit, on vote IBK. En somme, c’est la position du parti en réalité, de la base et c’est cette position qui a été dite à cette réunion là.
Simplement, Dramane Dembélé était l’homme du jour et quant il est sorti, les journalistes étaient là et il leur a dit ce qui s’est passé au cours de la réunion. C’est pour vous dire que ce n’est pas sa position qui a entrainé nos positions.
Vous savez moi j’ai été ministre de IBK et d’Alpha Oumar Konaré (de 1993 à 1997 avec IBK), et je pense que pour l’essentiel ce pour quoi IBK a été élu c’est justement son passage à la tête du Gouvernement à cette période là. Donc, naturellement, je me sens proche de ce bilan, j’appartiens à ce bilan comme je revendique ce bilan là d’avoir participé à la stabilisation de notre pays après une période de transition qui a été très difficile.
Et, de 1993 à 1997, je n’ai jamais eu de problème avec IBK. Après son départ en 2000, moi je suis revenu au Gouvernement et je n’ai pas non plus eu de problème avec IBK. Ainsi, appartenant au bilan pour lequel il a été élu, j’ai pensé tout naturel de magnifier ce bilan en accompagnant le porteur du bilan à cette période là. Parce qu’avant lui le porteur du bilan c’est Alpha O. Konaré, mais après ce dernier c’est son Premier ministre. Et c’est ce bilan qui a été revendiqué par les maliens pour conduire les destinées de notre pays après une période très trouble. C’est ce qui fait que tout naturellement mon choix s’est porté sur IBK et je le dis en CE urbi et orbi que ma base soutenait la candidature d’IBK au second tour.
Bref, ce n’est pas Dramane Dembélé qui nous a conduit vers cela, mais nous nous sommes trouvés dans la même logique parce que nos bases étaient dans cette logique. Ce n’est pas trahir ce qui avait été considéré comme un engagement du parti, c’est simplement que les profondeurs du parti n’allaient pas vers cet engagement. Et, donc, il y a un décalage entre individus de la direction du parti et les bases réelles. Je dirais que toutes les faiblesses et les maux du parti sont partis justement de ce décalage.
Infosept : Après les législatives de 2013, la première force politique qu’était l’Adema PASJ avec 54 sièges, s’est retrouvé avec 16 députés, soit à la 3è place. Comment expliquez-vous cette contre performance et pourquoi l’Adema PASJ n’a-t-il pas opté pour l’opposition ?
Moustapha Dicko : Comme je le disais ci-haut, c’est ce décalage qui existe entre la direction de notre parti et nos bases. Cela explique en grande partie pourquoi l’Adema qui est le parti présent dans tous les villages et hameaux de notre pays, va de recul en recul. Nous étions à un certain moment à 121 députés et à certain moment nous avons même été obligés de faire du portage, c’est-à-dire le parti était tellement important que certains ne seraient pas revenus à l’AN s’ils ne se mettaient pas sur une liste de l’Adema étant même de l’opposition.
Nous avons fait du portage (mais je ne dis pas que c’est une bonne chose) pour que le Mali ait une majorité et une opposition. Ainsi, il y a eu des gens qui sont venus en alliance avec l’Adema et qui se sont retrouvés dans l’opposition face à l’Adema.
Ensuite, je pense que nos problèmes internes, nos égos hypertrophiés, nos appétits du pouvoir ont fait que les gens parlaient plus de leurs intérêts personnels et immédiats que des intérêts de notre parti, de la démocratie malienne et du pays. Et nous avons fait des choix hasardeux et il faut le reconnaitre et l’assumer. Ces choix hasardeux ont déstabilisé nos bases et fait en sorte que nos résultats n’ont pas reflété notre véritable poids politique. Jusque-là, nous sommes dans cette situation et nous sommes entrain de payer ces choix hasardeux.
Vous vous rappelez, en 2007 on s’est retrouvé sans candidat en se disant que si on se présente on ne gagnerait pas, comme si un parti politique qui va aux élections y va seulement pour gagner.
Nous sommes entrés dans le consensus et il faut dire que nous avions beaucoup de nos chefs qui se sont retrouvés comme entre deux chaises. On ne sait pas très bien s’ils le font dans le sens de l’Adema ou dans le sens du prince du jour. Donc, ces choix hasardeux ont fait que nous nous sommes retrouvés comme pot de chagrin entrain de nous réduire. Pourquoi nous ne sommes pas dans l’opposition ? Je vous l’ai dit, c’est des dissensions, des problèmes personnels qui ont fait que les uns et les autres se sont séparés et l’Adema comme les autres maliens se retrouvaient parfaitement dans le désir de voir IBK conduire notre Démocratie vers le sommet. Nous étions dans cette position là. Je pense qu’on n’est pas allé et on ne doit pas aller dans l’opposition parce que simplement on a dit aux maliens que IBK est un bon candidat.
Le parti Adema a fait le choix de soutenir IBK au second tour et il faut que cela soit clair. Et, ayant fait le choix de le soutenir au second tour, je ne trouve complètement pas logique de se mettre dans son opposition. Par contre, je pense qu’il faut se reconstruire, retourner à nos valeurs, nos principes, nos choix premiers et faire surtout en sorte que nous retrouvions nos sens et la voie qu’indiquent réellement nos bases et qu’on pèse de tout notre poids sur les destinées et la politique actuelle et qu’on arrête simplement de faire le béni oui oui. Ce qui profite à des individus mais pas à un parti, ni un pays, surtout pas à notre démocratie.
Infosept : Comment se porte votre parti sachant bien qu’il ya maintenant deux tendances : une favorable à la majorité présidentielle et l’autre plutôt pour l’opposition ?
Moustapha Dicko : Il n’ ya pas deux tendances dans notre parti. Il ya des positions individuelles qui disent «allons-y dans l’opposition» et qui veulent amener les gens à aller dans l’opposition. Mais, c’est une position très minoritaire et qui s’était toujours voulue comme ça au moment du choix qui n’a pas réussi à amener le parti à aller dans ce sens et qui aujourd’hui est entrain de faire le travail pour nous amener vers l’opposition en disant que c’était cela notre position. Je répète, il n’ya pas deux positions dans l’Adema, il y a une seule position. La position de la direction et des militants et sympathisants de l’Adema est claire, c’est d’aider à stabiliser ce pays et que nous sortions de la crise de la meilleure manière et cela n’est pas forcement en allant à l’opposition.
Moi, j’ai beaucoup de respect pour l’opposition et un homme comme Soumaïla Cissé que j’ai vu pendant les moments très chauds où il était indexé et on le voulait mort simplement parce qu’il revendiquait le retour à une vie constitutionnelle et il le faisait de façon sincère. Et qu’un homme comme ça soit dans l’opposition, je le respecte et je respecte aussi les autres qui sont dans l’opposition. Car, je pense simplement qu’un pays, une démocratie doit avoir une opposition forte, dans toutes les conditions et une opposition à qui on ne donne pas que des miettes mais à qui on laisse toute sa place. Elle occupe sa place parce qu’elle pense à un projet alternatif pour le même pays, donc elle mérite le respect et qu’on se batte pour qu’elle existe. C’est de la contradiction entre les positions de l’opposition et celles de la majorité que jailli la lumière. Nous sommes dans la majorité et assumons d’y être, nous accompagnons notre camarade IBK et nous sommes en alliance avec le RPM pour faire en sorte que les choses avancent tout en sachant qu’on ne fait pas toujours tout bien, il y a des erreurs, des fautes mais on cherche des solutions pour en sortir.
Infosept : Quelle lecture faites-vous des récentes démissions au sein de votre parti, notamment celles de l’ancien 1er vice-président Ibrahima N’Diaye et d’Oumarou AG Ibrahim Haïdara?
Moustapha Dicko : Honnêtement, je ne voudrais pas juger des camarades. J’ai connu Iba pendant les moments chauds de l’association. Je sais qu’il s’est beaucoup investi, il a donné le meilleur de lui-même. On est tous les deux membres fondateurs du parti, je sais qu’il a fait ce qu’il a pu dans le cadre du parti, des choses en bien, en moins bien mais c’est son choix il a décide de partir et je respecte son choix. Quant à Oumarou, je l’ai connu un peu plus tard et il a décidé de partir je respecte aussi son choix.
Il faut qu’on laisse à chacun son libre arbitre et qu’on évite de juger les gens parce que simplement on n’est pas sur la même position qu’eux. Cela dit, je pense que c’est une grosse perte que des camarades s’en aillent et on le regrette toujours quand les camarades s’en vont. Je vais vous dire, il fut un moment où notre direction, complètement subjuguée par le poids de notre allié en 2007, sur la quarantaine de membres du comité exécutif, seulement quatre n’ont pas voté pour exclure Soumeylou Boubèye Maïga qui était à l’époque notre 1er vice-président, parce que simplement à l’époque il avait dit qu’il faut un candidat. Pour la circonstance, il a organisé un meeting on a dit : haro sur le baudet. Nous, nous sommes de ceux qui ont refusé de voter pour son départ.
Infosept : Tout récemment, un groupe de militants a mis en place le MRP (Mouvement pour le Renouveau du Parti). Ce mouvement demande la mise en place d’un comité transitoire en lieu et place du CE. Etes-vous favorable à la proposition de ce mouvement ?
Moustapha Dicko : Je vais vous étonner! L’idée de la transition est venue de moi et à une autre époque. Quand Dramane a été désigné comme candidat, j’ai dit à certaines personnes à l’époque avec cette direction, on obtiendra aucun résultat parce que notre direction est décriée par nos bases : il y a un dysfonctionnement, un décalage. Donc, si on veut avoir un résultat je pense qu’il faudrait qu’on envisage de faire un collège transitoire. A l’époque, pour moi c’était très simple. Il y a quelqu’un, un homme qui incarne un certain parcours, une certaine fidélité à nos valeurs et principes (malgré son âge), les gens le respectent pour ce parcours là, il s’agit du Pr Aly Nouhoum Diallo. Je dis mais on mettrait Aly N. Diallo devant aujourd’hui avec les présidents des coordinations régionales (9), plus les présidents des jeunes et des femmes, plus les présidents des deux commissions spécialisées cela allait nous faire un noyau qui allait nous conduire aux élections, je suis presque sûr que c’était vers la victoire. Ensuite, ils allaient relire nos textes, organiser les renouvellements et nous amener à un congrès apaisé qui allait nous doter d’une direction cette fois-ci qui retourne vers nos valeurs et principes. J’ai proposé cela mais l’idée n’a pas prospéré parce que comme je le disais, les intérêts sont divergents, les visions ne sont pas toujours les mêmes et le leadership n’est pas toujours affirmé. Cela signifie tout simplement que depuis toujours, nous cherchons de solutions pour nous sortir de cette crise parce que cette crise à trop longtemps duré au niveau de l’Adema et les militants se posent des questions et sont abasourdis par les manques de réussites de ces dernières années.
Donc, s’il y a des gens qui se réunissent pour aller dans ce sens là, je pense que c’est tout à fait normal parce que la direction nationale du parti avait écrit pour dire que nous allions à un congrès pour le mois de mars passé ensuite mai, ensuite août et c’est à la veille du congrès qu’on est venu dire en secrétariat permanent que le congrès est reporté sine die. Et depuis rien ne se passe et les renouvèlements sont retardés de façon tout à fait voulue et on n’encourage pas les renouvèlements. Mais on se réfère au fait qu’il n’y a pas d’argent ceci ou cela. Pour moi c’est la volonté qui manque, parce que là où les gens ont voulu, ils sont allés aux renouvèlements. Je pense qu’on peut aujourd’hui allé à cela et les militants ne peuvent pas regarder leur parti s’effilocher davantage. Quand, dans un parti le 1er-vice président à démissionné, idem pour le 2è vice-président, le 4è vice-président, le douzième n’est pas là et que le secrétaire général aussi, je pense que le secrétaire général adjoint peut à peine faire son travail parce qu’il est pris à d’autres responsabilités. Les membres du CE ne se réunissent presque pas. Donc, il est utopique de penser que les gens vont rester comme ça à regarder leur parti se mourir, parce que ce parti est la passerelle de chacun d’entre nous et qu’il n’appartient à personne et personne ne peut en faire ce qu’il veut. Pour cela, je pense qu’il est tout à fait normal que des actions comme ça se passent, d’autres actions vont suivre sûrement parce que les gens se posent des questions et que leur responsabilité est interpellée. Mais, aujourd’hui, moi je soutiens l’idée d’aller au congrès.
Infosept : Les rumeurs font état d’une éventuelle candidature de M. Moustapha Dicko pour la présidence de l’Adema PASJ. Pouvez-vous nous confirmer ou infirmer cela ?
Moustapha Dicko : Je pense que ce n’est plus une rumeur dans la mesure où nous, nous avons fait notre conférence de section et ma section soutient ma candidature et a écrit à notre coordination régionale et à la section de notre région. Je l’ai annoncé à mes camarades depuis fort longtemps que je voudrais effectivement proposer mes services pour faire en sorte que notre parti retrouve ses valeurs fondatrices et ses principes.
Infosept : Quelle est votre lecture des événements que vit le Mali à savoir les pourparlers inter-maliens qui piétinent, la reprise de la coopération avec le FMI après six mois de suspension consécutive aux malversations constatées dans l’achat de l’avion présidentiel et des équipements militaires ?
Moustapha Dicko : Aujourd’hui, on ne peut pas dire que la situation n’est pas difficile, le contraire serait de mentir à soi-même. La solution c’est les maliens eux-mêmes, c’est-à-dire leurs capacités de rebondir et de s’organiser. Les partis politiques ne sont pas organisés, la vie politique c’est une vie végétative. Les idées sont en fait sclérosées, il faut qu’on se reprenne déjà à ce niveau pour aider le pouvoir à résoudre toutes ces questions et à faire en sorte qu’il ne tombe pas dans les travers qui sont préjudiciables à la bonne marche, au développement et à l’avenir de notre pays. Pour cela il faut que la classe politique s’organise bien en ayant des projets de société et qu’il y ait une majorité et une opposition mais qui travaillent dans le sens de sortir le Mali du bourbier. Ce pouvoir est venu dans la crise, notre pays était sous perfusion de la communauté internationale. Résoudre ces problèmes n’est déjà pas facile et si en cours de route, si on connait des fautes ça rend encore les choses plus difficiles. Si la communauté internationale n’était pas venu à notre secours, je ne sais où est-ce nous serions aujourd’hui d’un point de vue sécuritaire, militaire et politique.
Si nous avons des problèmes avec nos partenaires comme le FMI et la Banque mondiale c’est gravissime. Mais pour éviter cela, il faut que nous nous organisions. Ce pays appartient à tous les maliens et personne n’a le droit de faire seulement ce qu’il veut et personne n’a aussi le droit de laisser quiconque faire seulement ce qu’il veut.
Cela passe par une organisation au niveau des partis politiques, de la société civile pour que les citoyens se sentent responsables du destin du pays.
C’est difficile à Alger, mais j’espère que quelques difficiles que ce soient les positions, on va arriver à faire en sorte que les maliens puissent se parler, se donner la main pour construire le pays sur des bases démocratiques réelles. Si nous avons cela, je pense que ça va aller.
Par rapport à ce qui s’est passé avec le FMI et la Banque mondiale, c’est exactement la même chose, c’est-à-dire, si les gens prennent leurs responsabilités, il n’y a pas de raisons que nous ayons des déviances et donc pas de raison que les partenaires nous maltraitent.
Infosept : Que pensez-vous du journal Infosept, un journal qui se veut sous-régional ?
Moustapha Dicko : Moi, je pense que dans l’espace politique comme dans l’espace médiatique, il faut le pluralisme (c’est un mot difficile à prononcer). Et c’est pour cela que le peuple malien s’est levé pour renverser la dictature en mars 1991 en exigeant la démocratie, le multipartisme intégral. Le support de tout cela reste la Presse et il faut toutes les sensibilités à ce niveau. Chaque fois qu’une sensibilité née et arrive à s’exprimer reste une bonne chose.
Vous avez embrasez large, et je pense que nous sommes un pays qui voit large parce que nous sommes prêts pour l’intégration africaine à céder tout ou partie de notre souveraineté. Donc, il est important d’avoir de telles visions, parce que le Mali n’est pas seul.
Vous savez, j’ai dis dans une intervention lors d’un congrès (récemment au PS) que le Mali c’est comme la jarre percée du roi Guezo. Si cette jarre explose, elle explosera pour le Mali, mais aussi pour l’ensemble de la sous-région. Mais si l’ensemble de la sous-région met ses doigts pour boucher les trous de la jarre percée, nous allons tous nous abreuver à une eau fraternelle, solidaire, intégrée et bénéfique pour chacun de nos Etats. Donc, cette vision, je trouve que les africains partagent en général, mais souvent oubliée parce que prise par le quotidien, les problèmes nationaux, les Etats oublient qu’ils sont dans un ensemble qui doit être viable pour que leurs conditions particulières puissent être viables.
Par exemple, quand nos amis du Niger donnent de la voix, en haussant le ton par rapport à la crise du Mali, tous les maliens sont en admiration devant eux, parce que, ils disent ce que nous pensons. Et le fait de dire ce que nous pensons en étant pas nous, mais en se considérant comme nous, parce que vivant ce problème comme si c’était le leur, fait que nous avons une sympathie inouïe pour ces hommes. Avoir une vision comme cela, je pense que c’est tout à fait méritoire.
Infosept : Quel est votre mot de la fin ?
Moustapha Dicko : Le mot de la fin, c’est souhaiter que nos partis puissent se reconstruire sur leurs valeurs originelles, sur des principes qui conduisent leurs destinées et que ce faisant, ils puissent participer à la construction de l’avenir de notre pays. Cet avenir, nous le partageons et on ne doit laisser aucune partie de notre pays en faire sa propriété ou la détruire en ayant que des revendications corporatistes, individuelles, sectorielles ou ethniques. Nous avons un beau pays avec une belle histoire, un brassage que nous envie le monde entier, parce que de Kayes à Kidal nous sommes les mêmes.
Nous avons vécu cette histoire qui n’a pas été toujours facile et qui s’est construite petit-à-petit, jusqu’à la situation d’un Mali où on peut aller de Kayes à Kidal sans s’inquiéter outre mesure de sa sécurité, où est-ce que je peux avoir à manger, parce que vous vous arrêtez devant n’importe quelle porte, on vous l’ouvre et on vous donne à manger et c’est cela le Mali. Et, pour préserver cela, il faut que les fils du pays reprennent conscience, qu’ils se disent qu’ils ont ce pays en partage et que c’est ce pays là qu’ils vont léguer à leurs enfants et petits enfants.
Propos recueillis
Par Dieudonné Tembely