La rumeur de la démission du Premier ministre Moussa Mara s’est encore propagée dans la ville hier, mercredi 7 janvier, comme une trainée de poudre. Les appels et les SMS n’ont cessé durant toute la journée, qui pour demander une confirmation, qui pour nous «informer».
Face à cette persistance de la rumeur, nous avons tenté le recoupement à plusieurs niveaux. Certains disaient n’être au courant de rien. D’autres en rajoutaient au doute. Finalement, nous avons envoyé un SMS au Premier ministre, en ces termes : «M. le PM, il m’est revenu à l’instant que vous avez démissionné. Pouvez-vous me le confirmer?». Il était 14 h 53. Il m’a répondu 9 minutes après, en une phrase laconique: «je suis à mon bureau tranquillement».
En clair, il n’avait pas démissionné. Il reste toujours le chef du gouvernement, solide aux commandes, malgré les nombreuses déstabilisations pour l’éjecter de la tête du gouvernement.
En effet, c’est le parti au pouvoir, le , qui a commencé la fragilisation de Moussa Mara en lui niant l’ambition de rassembler la majorité présidentielle autour de sa modeste personne. Un branle-bas s’en est suivi.
Le Tisserand est monté sur ses grands chevaux pour parler de «trahison, d’ambition personnelle, d’ambitions démesurées», et que sais-je encore. Il s’est mis à rencontrer tous les partis politiques de la majorité pour leur faire comprendre que Moussa Mara, du parti Yelema, avec un seul député à l’Assemblée nationale, ne devait pas diriger la majorité présidentielle. Le Premier ministre, qui avait une autre approche, s’est simplement rangé du côté du RPM pour ne pas entraver l’action gouvernementale.
C’est ainsi qu’est née la Convention des partis de la majorité présidentielle (CMP), dirigée par un baron du RPM, Dr Boulkassoum Haïdara, candidat malheureux aux législatives en Commune I. Depuis, les déclarations se sont multipliées et le Tisserand a eu le courage politique de revendiquer clairement la Primature. Conséquence: ce parti, déjà mal tenu, a fait éclater ses divergences et clivages au grand jour.
Plusieurs noms circulent pour succéder à l’imperturbable Moussa Mara. Il s’agit d’abord du tout puissant ministre du Développement Rural, Bocari Treta, du flegmatique ministre de l’Environnement et de l’Eau, Abdoulaye Idrissa Maïga et du jeune loup aux dents longues, Mahamane Baby. Le trio a mis le parti en branle. Des missions discrètes ont été déployées sur le terrain. Des marabouts et féticheurs ont été approchés.
Au niveau du Bureau politique et de la Commission restreinte chargée de formuler des propositions, il semble que Treta a eu le dessus sur les deux autres. Son nom a donc beaucoup circulé comme étant le probable successeur de Moussa Mara. Mais, apparemment, la situation a évolué et le candidat du RPM n’est plus, semble t-il, dans les starting blocks pour la course à la Cité administrative, dans le bâtiment de la Primature.
C’est le nom d’un vieux retraité, qui a fait son temps sous Moussa Traoré et sous Alpha Omar Konaré, qui circule aujourd’hui comme éventuel remplaçant de Moussa Mara. Il s’agit de Modibo Keïta, l’actuel Haut représentant du chef de l’Etat pour les négociations inter-maliennes inclusives d’Alger. Il est réputé être de bonne moralité, travailleur et dévoreur de dossiers.
Mais cela ne suffit pas, à notre avis, pour être le prochain Premier ministre. Nous sommes en démocratie et il faut responsabiliser les hommes politiques. Si Modibo Kéita était un politique, on ne trouverait rien à redire. Mais il n’est pas encore nommé, même s’il a déjà commencé la communication pour la Primature.
Les rumeurs de départ de l’actuel Premier ministre – il a battu tous les records – qui enflent toujours, reviennent souvent avec des arguments peu convaincants, qui ne sont pas fondées. Moussa Mara est toujours là. Il pourrait même rester plus longtemps qu’on ne le pense, tout comme il pourrait partir dès aujourd’hui.
Seul IBK est, et demeure, le maitre de la situation. Etant peu bavard sur la question, il laisse les uns et les autres, y compris ceux de son camp, spéculer. C’est lassant pour l’administration. IBK doit rapidement trancher, en renouvelant publiquement sa confiance à Mara ou en nommant son successeur, qui ne doit pas être un retraité apolitique.
En tout état de cause, nous pensons que la première hypothèse serait la meilleure, en attendant d’arracher l’accord tant attendu avec nos «frères égarés de Kidal», puisqu’un nouveau gouvernement sera indispensable à sa suite. A ce moment là seulement un remaniement ministériel s’imposera et IBK décidera de faire partir Mara ou pas. Pour l’instant, inutile de spéculer.
Chahana Takiou