Dans les mois et années à venir, les journalistes, politologues, historiens, sociologues, philosophes et réalisateurs nous inonderont d’œuvres sur les attentats du 07 janvier 2015 au siège de Charlie Hebdo, à Paris. Les évènements tragiques qui se sont déroulés sur le sol français les 7, 8 et 9 janvier ainsi que leur onde de choc – dont la marche républicaine du 11 janvier - vont durablement marquer la France et le reste du monde. Sur les réseaux sociaux, les internautes sont déchainés ; ils n’ont eu besoin d’aucun recul, d’aucune profondeur pour lancer la déferlante des Hashtag, ces mots-dièse qui se définissent comme une «Suite signifiante de caractères sans espace commençant par le signe # (dièse), qui signale un sujet d'intérêt et est insérée dans un message par son rédacteur afin d'en faciliter le repérage ». Au célébrissime #JeSuisCharlie, quel malien ne voudrait-il pas voir substitué le modeste #JeSuisLassana ou #JeSuisLassanaBathily qui fouette et porte au pinacle notre fierté nationale. La preuve, le Président IBK, himself, a très officiellement reçu le bientôt franco-malien Lassana Bathily, au lendemain de la marche républicaine qui a drainé une marée humaine dans les rues de Paris, des principales villes françaises et de nombreuses métropoles étrangères. Par contre, on voudrait se couvrir la face des deux mains pour ne pas être exposé aux tristement célèbres #JeSuisKouachi ou #JeSuisCoulibaly ou encore #CharlieCoulibaly. D’ailleurs, les auteurs de ces hashtag-là sont traqués par les autorités françaises sur les réseaux sociaux au motif qu’ils font l’apologie du crime. D’indignation, ne comprenant pas ou n’acceptant pas ce qui paraît à leurs yeux comme « deux poids, deux mesures », certains activistes maliens des réseaux sociaux ont lancé #JeSuisNampala, #JeSuisAguelHoc ou, tout simplement, #JeSuisMali. Ceux-là prennent à leur compte l’idée généralement accréditée au bord du Djoliba que la vie d’un français vaut plus que celle d’un malien. Et que dire de cette catégorie d’internautes qui se tient à équidistance de la polémique ! Ils ont choisi d’être, à la fois, toutes les causes : #JeSuisCharlie, #JeSuisGaza, #JeSuisIraq, #JeSuisMali, #JeSuisJustice, #JeSuisHumanitaire, #JeSuisMoiMeme, etc. Eh oui, en toutes circonstances, il faut rester soi-même ! Par les temps qui courent, beaucoup d’internautes prennent de la distance vis-à-vis des causes perdues, des causes qui fâchent, réfutent les étiquettes et croquent, à pleines dents, des dirigeants dont ils exècrent l’image et la politique. A tort ou à raison ! De cela procède : #JeNeSuisPasTerroriste, #JeNeSuisPasCharlie, #JeNeSuisPaskouachi, #JeNeSuisPasNetanyahu. Justement Bibi, le Premier ministre de l’Etat d’Israël, et notre champion national, IBK, furent autant de vedettes à la marche historique de Paris aux côtés des Hollande et Merkel. J’ai deviné l’embarras de l’un et l’autre à se tenir par la main sans être liés par des relations diplomatiques formelles. Mais j’ai pu imaginer aussi leur bonheur de partager une success-story dans ce drame humain à travers le courage et l’humanisme de Lassana Bathily, qui ont permis de sauver la vie à des juges piégés dans l’hypermarché Porte de Vincennes. Etre ou ne pas être, la question existentielle a du sens sur la Toile. Le célèbre Cogito, ergo sum (Je pense, donc je suis) du philosophe français René Descartes est dépoussiéré et remis au goût du jour. Même s’il n’a pas été du goût d’une kyrielle de petits malins d’avoir été empêchés par l’Institut National de la Propriété Intellectuelle (INPI) de faire du business aux dépens de Charlie et des victimes de la folie meurtrière des frères Kouachi et leur complice Amédy Coulibaly.
Serge de Méridio