Conakry - La vie reprenait timidement son cours lundi en Afrique de l'Ouest en proie au virus Ebola, où les bancs des écoles sont restés dégarnis en Guinée, premier des trois pays les plus touchés à rouvrir les classes, au lendemain de la fin officielle de l'épidémie au Mali voisin.
Quelque 2,5 millions d'élèves du primaire et du secondaire, sans compter les nouveaux inscrits, étaient appelés à reprendre le chemin des classes lundi, avec près de quatre mois de retard sur le calendrier.
Mais la réouverture des écoles, annoncée le 14 janvier, a pris de court élèves, parents d'élèves et enseignants. De nombreux habitants ont expliqué n'avoir pas eu le temps de se préparer à rejoindre leurs zones d'affectation, ou d'acheter les fournitures par manque d'argent, à l'approche de la fin du mois.
"Jusqu'à présent il n'y a pas de présence massive des élèves et des professeurs", a reconnu Nabé Karamou, professeur de géographie au collège de Ratoma, dans la banlieue de Conakry, où des journalistes de l'AFP ont noté une faible affluence.
En annonçant cette rentrée impromptue, le gouvernement avait promis de mettre à disposition dans tous les établissements scolaires de kits sanitaires, notamment du chlore, de thermomètres, de savon et d'équipes de surveillance et de suivi des enfants pour déceler d'éventuels cas de fièvre.
Une promesse qui n'était pas suivie d'effet dans certaines écoles visitées par l'AFP.
"Je ne suis pas rassurée sur les dispositions prises pour la sécurité sanitaire des élèves. Je repars avec ma fille", a dit Mme Fanta Camara, rencontrée à l'école Victor Hugo, estimant que la rentrée "devrait encore attendre".
Au Liberia voisin, un des trois pays les plus affectés par Ebola avec la Guinée et la Sierra Leone, les autorités ont programmé pour le 2 février la réouverture des écoles, fermées depuis fin juillet. La Sierra Leone, elle, n'a pas fixé de date pour l'heure.
A eux trois, ces pays limitrophes comptent 99% des plus de 8.500 décès dues au virus Ebola, d'après l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), selon laquelle le nombre des nouveaux cas y est en nette baisse depuis au moins le début de l'année.
'Le combat continue'
Le Mali, dernier pays africain touché, en a officiellement fini avec l'épidémie dimanche, à l'issue de 42 jours écoulés sans aucun nouveau cas, ont annoncé à Bamako le gouvernement et la Mission des Nations unies pour la lutte contre Ebola (UNMEER) dans ce pays.
Il est le troisième pays d'Afrique de l'Ouest à avoir réussi à se débarrasser du virus, après le Sénégal, où l'épidémie s'est terminée le 17 octobre, et le Nigeria, où elle a pris fin le 20 octobre.
En dépit de ces avancées, il faut maintenir la vigilance, ont martelé ces derniers jours les autorités des pays touchés, les agences internationales et les acteurs sur le terrain.
Le ministre malien de la Santé Ousmane Koné, a appelé populations et personnels de santé "à garder et à pratiquer les mesures d'hygiène élémentaires et les comportements protecteurs" recommandés.
"Nous n'avons pas le droit de baisser la garde. Le combat continue", a déclaré le chef de l'UNMEER au Mali, le Dr Ibrahima Socé Fall.
Samedi, à deux jours de la rentrée scolaire, le président guinéen Alpha Condé avait menacé d'arrestations les récalcitrants à la lutte contre le virus en dépit des campagnes de sensibilisation et de prévention, à Kindia (130 km au nord de Conakry), lors de l'inauguration d'un centre anti-Ebola.
"Nous avons longtemps communiqué mais il y a des personnes qui ne veulent pas qu'Ebola finisse", a déclaré M. Condé, précisant avoir autorisé les responsables administratifs à "utiliser désormais les forces de la gendarmerie et de la police pour que toute personne qui refuse d'être soignée par les médecins soit arrêtée".
La Guinée a enregistré plusieurs réactions hostiles, dont certaines meurtrières, à la lutte contre Ebola.
Dernière en date: le 10 janvier, un policier et son chauffeur ont été tués et leurs corps brûlés dans un village proche de Forécariah (sud-ouest) par des habitants qui les accusaient de propager le virus après le décès soudain d'un villageois auquel ils avaient donné des calmants.
26 personnes ont été arrêtées en lien avec ces violences, d'autres suspects, en fuite, étaient recherchés, selon un haut responsable sécuritaire.
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