Cinq mois après les événements du 30 avril, les langues se délient. Selon un diplomate africain en poste à Bamako, cité par le quotidien ivoirien « Notre Voix », « le président ivoirien et la Cédéao ont joué un rôle important dans le coup d’Etat manqué du lundi 30 avril 2012 contre la junte militaire malienne tenue par le capitaine Amadou Yaya Sanogo ».
Va-t-on vers l’éclatement de la vérité sur les vraies motivations des affrontements meurtriers entre les bérets verts (fidèles au capitaine Sanogo) et les éléments du commando parachutiste du camp para ? Rien n’est pour le moins sûr. Mais depuis la sortie médiatique d’un diplomate africain dans les colonnes de notre confrère ivoirien « Notre Voix », le débat est relancé à Bamako.
« L’actuel pouvoir ivoirien et la Cédéao ont joué un rôle important dans le coup d’Etat manqué du lundi 30 avril 2012 contre la junte militaire malienne tenue par la capitaine Sanogo. Il s’agissait de balayer le Comité national de redressement de la démocratie et de la restauration de l’Etat, CNRDRE), que la Cédéao et Alassane Ouattara (président en exercice) perçoivent comme un véritable obstacle pour la normalisation des choses au Mali. Mais il s’agissait également d’agir vigoureusement afin que l’exemple du capitaine Sanogo n’inspire pas les officiers des pays de la sous-région », a martelé le diplomate africain sous couvert de l’anonymat.
Le fonctionnaire international, cité par notre confrère ivoirien « Notre Voix », est formel sur la détention de mercenaires ivoiriens et de la sous-région ouest-africaine (dont des Burkinabé et des Nigérians), par le capitaine Amadou Haya Sanogo et ses hommes. « Ces mercenaires, renchérit-il, ont participé aux côtés des bérets rouges du régiment de commandos-parachutistes de l’armée malienne chargés de la garde présidentielle sous l’ex-président Amadou Toumani Touré, au coup d’Etat manqué contre le capitaine Sanogo et le CNRDRE ». C’est d’ailleurs, poursuit le diplomate africain en poste à Bamako, au cours de ce putsch manqué que ces mercenaires ont été arrêtés ainsi que des militaires maliens impliqués dans le coup, dont le fils de l’ex-chef de l’Etat malien, Alpha Omar Konaré, commandant de l’armée de l’air.
Le diplomate parle ainsi de Mamadou Lamine Konaré, qui est détenu au Camp I de la gendarmerie avec plusieurs autres officiers et sous-officiers de l’armée, dont l’ex-chef d’état-major particulier du président déchu. Joint par le quotidien ivoirien, le diplomate enfonce le clou et confirme l’arrestation d’un ex-chef rebelle ivoirien suivie plus tard de sa libération sur intervention d’Alassane Ouattara.
A la tête des mercenaires ivoiriens qui sont, en majorité, des ex-rebelles devenus Forces républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), cet ancien chef de guerre ivoirien a participé bel et bien aux événements du 30 avril. S’il refuse de le citer nommément, tout porte à croire qu’il s’agit de l’ex commandant de zone à Bouaké, Zakaria Koné.
« Pris durant le coup par les bérets verts de Sanogo, il aurait été « cuisiné » avant d’être libéré au terme d’une transaction financière qui aurait eu lieu entre Abidjan et l’ex-junte militaire », révèle le quotidien ivoirien « Notre Voix ». Avant d’ajouter que l’ex-ministre de l’Intégration africaine du gouvernement Ouattara, Adama Bictogo, serait l’intermédiaire qui a agi au nom du régime Ouattara. « Tout en confirmant l’information, une source proche du RDR (parti politique de M. Ouattara) a précisé que des couacs dans l’opération constituent la raison profonde du limogeage d’Adama Bictogo. Depuis avril 2012, la méfiance entre la Cédéao et l’ex-junte militaire malienne s’est fortement accrue », analyse le confrère ivoirien.
Dans un contexte d’extrême méfiance des militaires maliens, difficile de vérifier cette information. Joint par nos soins, un lieutenant de la gendarmerie malienne (réputé très proche de Sanogo) est formel : »Le temps nous dira tout sur ces évènements. Et la justice fera son travail ». Zakaria a-t-il été emprisonné à Bamako pendant les événements ? « Je ne vous en dirai pas plus », nous a répondu sèchement l’officier.
Cette information est accueillie à Bamako avec stupéfaction et continue d’alimenter les débats et les commentaires dans les milieux militaires et politiques. « Si cette détention de mercenaires au Mali se confirmait, elle donne raison aux détracteurs du président Ouattara et de la Cédéao sur leur présumé rôle néfaste dans la résolution de la crise malienne », remarque un analyste politique. Pour d’autres observateurs, ces révélations confirment la thèse que « Ouattara n’est autre que le représentant africain de la Françafrique et des puissances impérialistes néo-colonialistes ».
Décidemment les événements du 30 avril n’ont pas fini de livrer tous les secrets.