Suite aux évènements tragiques survenus à Gao à la faveur de la grande marche de protestation des populations, le Gouvernement malien a dépêché deux ministres dans la Cité des Askia pour tenter d’éteindre le feu qui couve entre la MINUSMA et les habitants.
Il s’agit de celui de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, Abdoulaye Idrissa Maïga et du ministre de la Sécurité et de la Protection Civile, le Général Sada Samaké. Un médecin légiste a également envoyé par la MINUSMA pour examiner les corps des trois victimes tombées sous ses balles.
Ces ministres ont tenu hier mercredi une rencontre avec les populations, profondément sidérées, et les représentants de l’organisation onusienne à Gao. Il nous est revenu qu’au cours de cette rencontre le Gouvernement malien a rappelé à la MINUSMA l’une de ses missions essentielles, à savoir assurer la protection des populations civiles et la libre circulation des personnes et de leurs biens.
Toujours au cours de cette rencontre, les parents des victimes ont demandé des dommages et intérêts et la prise en charge des soins des blessés à l’organisation onusienne. Si elle a favorablement accédé à toutes ces demandes, la MINUSMA doit cependant s’apprêter à vivre une bataille judiciaire. Car, selon notre source, les parents des victimes ont aussi décidé de porter plainte contre la MINUSMA, pour situer toutes les responsabilités dans cette affaire, qui ternit davantage l’image de l’organisation onusienne déjà critiquée par une large partie des populations maliennes.
En effet, depuis longtemps, les Maliens soupçonnent la MINUSMA de prendre partie au profit de la Coordination des mouvements armés de Kidal. Ces soupçons ont commencé à devenir réalité avec le document proposé à la signature par la MINUSMA avec ces renégats, pour la création d’une zone de sécurité temporaire autour de Tabankort. «Une trahison envers le Mali!», selon les marcheurs de Gao.
Ils ne comprennent pas pour quelle raison la représentation de l’ONU signerait un accord, dans le dos de l’Etat, avec des groupes armés pour contrôler une zone du Mali. Est-ce là la matérialisation du plan machiavélique que lui prête une bonne partie de l’opinion malienne? C’est-à-dire la partition du Mali.
Ce qui a provoqué une vive colère chez les populations de la Cité des Askia. C’est pourquoi les mouvements signataires de la Plate-forme d’Alger, avec les jeunes, ont initié cette grande marche de protestation contre la MINUSMA. La marche a été violemment réprimée par la force onusienne, avec des tirs de gaz lacrymogènes, puis à balles réelles, sur des populations innocentes, qui ne revendiquaient que leurs droits.
Ainsi, le spectateur est devenu acteur, violant du coup son mandat. En effet, selon la Résolution 2100 de l’ONU du 25 avril 2013, modifiée par la Résolution 2164 du 25 juin 2014, la MINUSMA est chargée d’assurer «la protection des populations civiles», d’aider «à la stabilisation de la situation dans les principales agglomérations et contribuer au rétablissement de l’autorité de l’Etat dans le tout le pays». En proposant un accord aux rebelles pour créer une zone temporaire, la MINUSMA peut-elle convaincre qu’elle contribue à renforcer la présence de l’Etat malien sur son territoire?
Que non! Par le seul fait de proposer cet accord, la MINUSMA montre sa volonté manifeste de faire du fractionnel, au mépris de l’acte fondamental qui consacre sa création et du processus de négociation en cours à Alger. Conformément à son mandat, en proposant cet accord, peut-elle répondre: quel appui aux autorités maliennes, «pour stabiliser les principales agglomérations, notamment dans le nord du pays, et, dans ce contexte, écarter les menaces et prendre activement des dispositions pour empêcher le retour d’éléments armés dans ces zones» fait-elle?
L’éventuelle signature de ce projet d’accord n’était ni plus ni moins qu’une trahison faite au Mali. Heureusement, sous la pression des autorités maliennes et des populations, la MINUSMA a retiré ce document, qui était devenu une honte pour la communauté internationale.
Youssouf Diallo