L’école est haut lieu d’apprentissage et de formation de l’homme dans toutes ses dimensions : morale, intellectuelle, culturelle et physique. Et c’est Lionel JOSPIN, ancien premier socialiste qui trouve la meilleure métaphore pour flatter ses vertus en affirmant : « L’école est le berceau de la République.»Mais au regard du comportement de certains promoteurs d’écoles privées au Mali, la douleur est profonde. D’abord pour les enfants et leurs parents. Ensuite pour l’Etat qui perd beaucoup d’argent en accordant inutilement des subventions à des promoteurs agissant au mépris des normes en vigueur. Arrêt non justifié des cours, falsification des notes, non paiement du corps professoral, etc. Ces pratiques, il faut le dire, mettent à genoux les règles sacrosaintes de l’orthodoxie pédagogique.
En juillet 2011, au Centre International de Conférences de Bamako, l’ancien Premier ministre malien, Ibrahim Boubacar Keita se faisait passer pour le Jules Ferry de la politique malienne. Pas l’homme politique qui a défendu les tristes couleurs de la colonisation, mais du législateur qui aura donné à l’école publique française ses lettres de noblesse du fait de la gratuité de l’enseignement primaire, de son caractère laïc, mais aussi obligatoire. IBK dans la peau d’un jules Ferry ?
C’est dire que, l’école malienne souffre ; en l’occurrence dans le privé, où des pratiques malveillantes mettent à genoux les sacrosaintes règles de l’orthodoxie pédagogique en vigueur. Si de telles pratiques discréditent l’image de notre école, elles perturbent, à tous égards, la conscience des fervents défenseurs de la réforme de 1962.Reforme dont l’actuel Premier ministre, le Dr Cheikh MODIBO, est un produit qui fait la fierté de tout un continent. En effet, les Maliens ont encore du chemin à faire pour arriver au champ du seul combat qui vaille, celui de l’excellence.
Les promoteurs, nouveaux seigneurs de l’argent à l’école
Au Mali, la prolifération des écoles privées remonte en 1994, date de l’adoption de la loi n° 94-032 qui justifie le statut de l’enseignement privé. En effet, c’était le 12 mai de même année que les députés à l’Assemblée Nationale ont voté cette loi qui sera promulguée quelques mois plus tard par le Président de République, Alpha OUMAR KONARE.
Une bonne nouvelle pour de nombreux parents d’élèves. Tout le monde à l’époque avait pensé que les problèmes de l’école allaient désormais se ranger aux calendes grecques. C’était, pour le moins, méconnaitre la cupidité de la plupart des promoteurs d’écoles. Nouveaux seigneurs qui pensent plus aux sous qu’à dispenser une formation de qualité aux enfants espoir de demain de la nation. Ces commerçants qui se retrouvent du jour au lendemain dans le milieu scolaire n’ont rien à faire des principes d’un Rabelais ou d’un Makarenko. Devant cette situation, il urge à l’Etat de prendre le taureau par les cornes et de mettre au four tous ceux qui trichent avec la conscience nationale. Rien, en effet, ne doit se faire au détriment de la République.
Comment les promoteurs trichent
Le secteur de l’enseignement privé au Mali a du vent en poupe .Rares les parents d’élèves qui ne songent pas à y inscrire leurs enfants. Mais, c’est l’Etat malien qui fait marcher la machine financière des écoles privées avec les subventions allouées au secondaire général et technique. Chaque année, le budget national prend en charge plus 6 milliards qui ne serviront qu’à gonfler les poches de quelques arrivistes de promoteurs. C’est le prix à payer pour la formation. Mais à la vérité, que font ces tenanciers d’écoles privées ?
Selon notre enquête, plusieurs écoles privées refusent de se plier au régime Pédagogique du Mali .La question que l’on se pose est que pourquoi ces écoles qui fonctionnent avec permis, dans la légalité osent se dresser contre l’orthodoxie pédagogique.
La réduction du volume horaire à dispenser est une offense en premier lieu pour ces promoteurs qui ont décidé de former des consciences intellectuelles responsables pour les générations futures. Dans le secondaire, plusieurs promoteurs exigent de leurs directeurs cette pratique incongrue en vue de réaliser des économies. Non contents certains professeurs déposent la craie et filent vers d’autres cieux. Ce que nous a dit un enseignant qui a le sens élevé du devoir : « Le promoteur cet établissement n’a aucun souci pour l’avenir des enfants. Comment peut-on demander de dispenser seulement 6 heures de français en LL contre 10 heures du volume horaire officiel ?»Une question qui attriste sûrement.
Une des pratiques aussi, c’est que certains patrons d’établissements privés composent avec les perturbateurs du milieu scolaire. Connaissant bien leur influence auprès de leurs camarades, ils les appuient par tous les moyens dans leur volonté d’être élu Secrétaire général du mouvement. En effet, un ancien secrétaire général qui faisait d’un promoteur en commune IV district de Bamako est devenu surveillant dans cette même école. Avec comme qualification : titulaire d’un Bac raté plusieurs fois.
Aussitôt élu, aussitôt vive les perturbations. Le registre d’émargements des heures des enseignants disparait de la nature. Ainsi, c’est le début de la croix et de la bannière pour ces pauvres enseignants qui demandent à émarger des heures non exécutées. Mais sans succès au bout d’une semaine de peine. Pourtant l’Etat ne calcule pas le nombre de jours perturbés pour payer ces promoteurs.
Pour mieux voler sur les miettes que touchent les professeurs, certains ont l’imagination très fertile. On prend le mauvais soin de renvoyer les élèves, souvent deux semaines durant, sous le couvert d’une révision à domicile. Comme si, en ces moments, les classes seraient habitées par des esprits démoniaques qui empêcheraient les élèves se rafraichir la mémoire. C’est tout à fait absurde. Malheureusement, rares sont les parents qui viennent pour se plaindre.
Enfin, la falsification des notes et refus par certains promoteurs de payer aux professeurs leurs salaires sont de nature à ternir l’image de notre école à tous les étages. Aujourd’hui, dans les écoles, c’est désormais monnaie de voir même les gardiens se mêler aux affaires de bulletins scolaires.
Quant au lourd retard accusé dans le paiement des salaires des enseignants, il ne s’agit ni plus ni moins que d’une mauvaise volonté. Plusieurs établissements secondaires au Mali sont confrontés à cette situation qui n’honore pas l’école malienne. A l’exception de quelques écoles privées célèbres de Bamako. Ces écoles, il faut le souligner, ne bénéficient pas des subventions de l’Etat parce qu’elles sont 100% privées.
Pour les enseignants, les patrons mauvais payeurs se cachent derrière les subventions qui arrivent généralement au mois de mars de chaque année scolaire. Pourtant, ils de l’argent quand jette un regard furtif, soit-il sur leur train de vie à grands frais. Un luxe insultant pour tout dire alors les enseignants peinent à percevoir un mois de salaire sur 5.
M.Boulkassoum TOURE, promoteur d’au moins établissements scolaires du secondaire dont l’ETIC.Riche, il n’a aucune bonne foi de vivre en bonne intelligence avec le corps professoral qui réclamait depuis le 14 mai dernier les salaires du mois de décembre. Depuis les enfants sont en otage par le biais d’une grève illimitée et sont déjà en route pour la boucherie. A preuve, les examens auront lieu dans quelques jours.
Le Président de l’Association des Ecoles privées Agréées du Mali (AEPAM), M. Ibrahima Rémy Doumbia, promoteur de l’Ecole Spéciale d’Enseignement Technique (ESET), se soucie-t-il de tous ces dysfonctionnements au sein d’un secteur qui lui permet de dormir sur un lit de roses ? Son role, c’est aussi de dénoncer tout ce qui ne colle pas avec les valeurs pédagogiques dont certains promoteurs se font coutumiers.
Gâchis pour la République en chiffres
L’Etat malien ne mérite pas cela. L’enveloppe financière est très forte pour faire plaisir à des arrivistes. En effet, le budget national prend en charge en fonction des filières de formation qui sont : 70.000 FCFA pour l’Enseignement secondaire général, 80.000 FCFA pour le CAP tertiaire, 100.000F pour le CAP industrie contre 100.000 F pour le BT tertiaire, 125.000 FCFA pour le BT agro-pastoral ; 125.000 FCFA pour le BT industrie et 125.000 FCFA pour le Bac Technique.
Somme toute, l’éducation doit jouer son rôle moteur dans notre société. C’est toute la clé de l’avenir ! L’Etat en effet doit finir avec ce parfum de favoritisme qui plane sur la gestion de l’école. Il faut que la loi puisse être appliquée dans toute dimension contre les promoteurs délinquants .Que cesse enfin ce regard complaisant envers tel ou patron d’école. Il faut impérativement, conduire des missions d’inspection dignes avec de vrais pédagogues qui ne se contenteront pas de quelques morceaux offerts par le promoteur. L’aide de l’Etat doit continuer à ceux qui ont un sens élevé du devoir. Car, « celui qui ouvre la porte d’une école, ferme celle d’une prison. »