Le capitaine Sanogo, en plaçant ses hommes aux postes clés, a bien verrouillé l’appareil militaire. Et même politique. Il se conduit néanmoins comme l’âne qui a goûté au miel alors que le peuple attend de lui un geste historique. Comme ATT l’avait fait en 1992.
Assurément, le pouvoir corrompt. De fait, il faut bien plus que des mots pour faire partir le capitaine Sanogo de son repaire de Kati. Parce qu’il a simplement goûté aux délices du pouvoir. Depuis le coup d’Etat du 22 mars, le jeune capitaine aura tout eu, de gré ou de force. Il se sent alors en droit d’en demander plus pour en obtenir autant. Alors que le bon sens aurait induit tout autre comportement, n’en déplaise au capitaine Sanogo.
Pour faire court et simple, le capitaine Sanogo demanda la nomination d’un Premier ministre de son choix : il l’obtint ; un gouvernement d’union nationale, il aura bien plus : un gouvernement conforme à son desiderata avec en prime l’exclusion de la classe politique nationale. Il l’a soi-même récemment reconnu. Apothéose : il contrôle, à travers ses hommes, des départements importants tels celui de la Défense, ceux de la Sécurité intérieure, et de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et de l’Aménagement du territoire. Autant dire que le capitaine Sanogo a la destinée du Mali entre ses mains. C’est bien une victoire sur les hommes politiques.
En dépit de tout cela, ces derniers ont fait contre mauvaise fortune bon cœur. Un signe de grandeur et de respect pour l’intérêt supérieur de la nation.
On attend autant du capitaine Sanogo, lui, qui aura tout eu. Il s’agit en l’occurrence d’un geste historique qui l’immortalisera à jamais et le sanctifiera dans le panthéon des hommes au Grand Destin. Il suffit juste pour cela qu’il mette le Mali au-dessus de tout en acceptant de botter en touche. Ainsi, il permettra au gouvernement actuel d’assurer, au terme de la transition, la transmission du pouvoir à ceux qui sont censés l’exercer dans une démocratie digne de ce nom. En est-il capable ?
En tout cas, Amadou Toumani Touré qu’il a renversé au soir du 21 mars dernier, l’avait fait en 1992. Il a été capable, et de composer un gouvernement d’union nationale, et de remettre le pouvoir aux civils sans présumer de leurs capacités pour ce faire. N’est pas ATT qui le veut. Pour ce qui reste à dire, il y a une question : ATT vaut-il mieux que Sanogo ?