En visite à Alger, le Premier ministre Modibo Keita a dit espérer la signature d’un accord à l’issue du nouveau round des négociations qui s’ouvrent aujourd’hui
Annoncé pour hier, le 5è round des pourparlers inter-maliens d’Alger débuteront finalement en principe aujourd’hui. En visite dans la capitale algérienne, le Premier ministre Modibo Keita a bouclé son séjour de 48 heures chez notre voisin du Nord par un ballet de rencontres diplomatiques. A commencer par l’équipe de médiation algérienne dirigée par le ministre Ramtane Lamamra à la résidence d’Etat Djenane El-Mithak. L’occasion était bonne pour chef du gouvernement de remercier le président algérien pour les efforts inlassables déployés pour le retour de la paix entre les fils de notre pays.
Il a souligné toute l’urgence de trouver un accord responsable entre les belligérants de la crise au Nord de notre pays. Le Premier ministre a répété lors de chacune de ses rencontres que le temps n’est plus « un allié mais un redoutable ennemi » pour la conclusion d’un accord de paix durable. Il évoqué la situation des milliers de nos compatriotes déplacés. Il n’a pas non plus oublié les familles inconsolables de ceux qui ont perdu la vie dans la crise. Le gouvernement n’oublie pas nos plus les nombreuses personnes qui n’ont pas accès aux services sociaux de base comme l’eau potable, la santé et l’éducation.
Modibo Keïta ne s’est pas contenté de prêcher la paix auprès de nos amis algériens. Il a également rencontré la médiation internationale au grand complet. A celle-ci, il réitéré la volonté ferme du gouvernement de signer un accord de paix avec les groupes armés. Mais un accord juste et sincère. Le ministre algérien des Affaires étrangères, parlant au nom du collège de médiateurs, a lui aussi insisté sur la nécessité de faire taire les armes et d’aller vers une paix durable.
Il a rappelé que le Mali est une grande nation et qui entretient avec l’Algérie des relations historiques. Soulignant que le président du Mali indépendant Modibo Keita fut d’un soutien inestimable à Abdelaziz Bouteflika, lors de la guerre d’indépendance algérienne (celui-ci était alors basé à Gao) a souhaité que son homonyme (le Premier ministre, Ndlr) saisisse l’opportunité pour faire signer un accord historique qui mettrait fin à plus de 50 ans de rébellions à répétition. Tour à tour, les responsables des groupes armés ont pris la parole pour dire leur volonté de faire la paix. Reste à joindre l’acte à la parole lors de ces négociations pour lesquelles aucun calendrier n’a été fixé.
Prenant la parole face à un auditoire composé de l’ensemble des acteurs la gestion de la crise, les premiers mots du PM Keita ont été pour remercier le président Abdel Aziz Bouteflika, président de la République algérienne démocratique et populaire, le gouvernement et le peuple algériens, pour lui avoir adressé une invitation à une époque aussi cruciale pour notre pays.
A EGALE DISTANCE. « Je vois en cette invitation une marque d’attention particulière, un immense crédit d’intention, l’expression de la qualité des relations d’amitié, de fraternité et de coopération entre le Mali et la République algérienne démocratique et populaire », a indiqué Modibo Keita, avant de dire espérer sur « un accord de paix global et définitif pour engager le Mali, mon pays, dans la voie d’un développement équilibré, dans un environnement de paix, de sécurité et de stabilité sociale ».
« Il y a quelques mois, nous avons évolué ensemble dans cette même enceinte, vous dans le même rôle que celui d’aujourd’hui et moi dans celui de Haut représentant du chef de l’Etat pour le dialogue inclusif inter malien. Je m’étais, à cette époque, assigné comme tâche essentielle de me maintenir à égale distance des parties en négociations, … J’étais convaincu, et cela en exécution des instructions que le président de la République m’avait données, que tous les protagonistes étaient des Maliens à part entière et avaient donc le droit et le devoir de s’interroger sur le devenir de leur pays » a développé au premier ministre.
Dans la salle, il y avait, en plus des responsables de l’Algérie, chef de file de la médiation l’Organisation des Nations unies, l’Union européenne, l’Organisation de la coopération islamique, l’Union africaine, la CEDEAO et des pays amis tels que le Burkina Faso, la Mauritanie, le Niger, et le Tchad. A ceux-ci, il faut ajouter des diplomates d’autres nations. Cette configuration, du point de vue du Premier ministre, est un immense réseau de sympathie, de soutien multiforme impose aujourd’hui, aux parties maliennes, celles qui sont en négociations, c’est-à-dire les mouvements armés de la Coordination, les mouvements armés de la Plateforme, le gouvernement du Mali, de se révéler dignes de la solidarité internationale.
A tous ces acteurs, il a rappelé que le peuple malien, dans toutes ses composantes, est en attente d’« une décision cruciale » qui « soulagera les cœurs et les esprits, une décision qui limitera la misère morale et matérielle », qui « limitera la peur pour le présent, l’angoisse pour le souvenir traumatisant des scènes de violence vécues, l’inquiétude pour l’avenir des Maliens et des Maliennes ».
« Cette attente se nourrira de la décision que vous prendrez, vous Bilal Ag Achérif et vos alliés, vous Algabass Ag Intallah et vos alliés, vous Mohamed Lamine Ould Sidaty et vos alliés, vous le Pr. Ahmed Ould Sidi Mohamed et vos alliés, vous Me Harouna Toureh et vos alliés, vous Mohaned Ag Ibrahim Assaleh et vos alliés, vous tous, chers frères et sœurs, pourriez-vous accepter de cesser d’être les uns en face des autres, mais d’être tous les uns à côté des autres pour regarder dans la même direction, vous ouvrir au souffle de la paix, de la concorde, de la fraternité ? Ce faisant, vous vous révélerez tous unis, dignes de la confiance de la Communauté internationale, dignes de son soutien, aujourd’hui, et après la signature d’un accord de paix tant attendu », leur a dit avec conviction Modibo Keita.
« Ce message, celui que je vous délivre, ne voyez pas en lui, le message partisan du chef du gouvernement, mais celui d’un frère investi d’une légitimité octroyée, celle du président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Kéita, porteur de la Nation malienne dans son ensemble, donc à égale distance par rapport à tous », a ajouté le Premier ministre qui a demandé à tous les acteurs « de desserrer les poings, de faire en sorte que le travail pour la paix devienne un service ».
Le chef du gouvernement dit savoir que la paix n’a pas que des amis. C’est pourquoi, il a demandé à tous de résister à « la fascination des marchands d’illusion, ceux qui veulent ralentir le cours du processus, ceux qui se réjouissent de la détresse de leurs semblables ». « Poursuivez imperturbablement votre chemin vers la paix et la concorde, un chemin certes rocailleux, mais qui conduit vers des lendemains meilleurs » recommande Modibo Keita invitant d’éviter « les escaliers dérobés ». Car pour lui, fort de sa riche expérience d’enseignant et de diplomate, « la sincérité, la vérité de votre comportement aident à refuser de porter le deuil de l’avenir ».
Avant de quitter Alger, le Premier ministre a déposé une gerbe de fleurs au Sanctuaire du martyr, gigantesque monument érigé en 1982 en mémoire des morts de la guerre d’indépendance de l’Algérie.
Envoyé spécial
A. M. CISSE
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