Longtemps orphelin de l'ère IBK, l'ex-candidat de l'ADEMA à la présidentielle vient de prendre sa revanche en entrant au gouvernement. Depuis, il ne compte pas s'arrêter en si bon chemin...
On se rappelle qu'en vue de se donner plus de chance pendant l'élection du président de la République en 2013, certains candidats ou partis politiques avaient signé des alliances. Ainsi, l'ADEMA avait signé une plateforme avec, entre autres, l'URD, le PDES, les FARE et le PARENA. Les membres de la plateforme - appelée FDR - s'engageaient à se rallier, au second tour de la présidentielle, l'un quelconque des candidats qui y parviendrait. Or Dramane Dembélé, candidat battu de l'ADEMA, au lieu de respecter les engagements de la plateforme, s'est rallié au candidat adverse, Ibrahim Boubacar Kéita (RPM), opposé à Soumaila Cissé (URD) au second tour de la présidentielle. Pour justifier sa décision, Dramane Dembélé a expliqué que son faible score au premier tour du scrutin (8%) était dû à la "trahison" des caciques de son parti, lesquels n'auraient que passablement digéré son investiture comme candidat. Selon Dramane Dembélé, les membres du Bureau Exécutif de l'ADEMA n'ont pas mouillé le maillot comme ils l'auraient fait si l'un des vieux routiers (Iba Ndiaye, par exemple) avait été désigné candidat à la présidentielle. Le ralliement de Dramane Dembélé à IBK a provoqué la colère des dirigeants de l'ADEMA qui ont, par la voix du premier vice-président d'alors, Iba Ndiaye, appelé à voter pour Soumaila Cissé.
Après la présidentielle, le climat ne s'apaisa pas. Les choses ont paru tourner en faveur des dirigeants de l'ADEMA. En effet, au lieu que le nouveau chef d'Etat, IBK, fasse une fleur à Dembélé, qui l'avait rejoint avec armes et bagages, il a préféré traiter avec l'appareil dirigeant de l'ADEMA où plusieurs ministres ont été recrutés. Décidés à faire payer à Dramane Dembélé sa dissidence, l'ADEMA a mis en quarantaine les partisans de l'intéressé dans les structures du parti. Avant d'entamer contre eux une purge massive au niveau des sections et sous-sections. Ainsi, Harouna Cissé, ex-directeur de campagne de Dramane Dembélé, et Lazare Tembely, président des Jeunes de l'ADEMA, ne sont pas reconduits lors du renouvellement du bureau de la section 6 de Bamako: les deux personnalités ont en commun d'avoir suivi Dramane Dembélé lors de sa transhumance vers IBK. Les malheurs de Dramane Dembélé et de ses partisans se poursuivent dans de nombreuses autres sections et sous-sections où, à la faveur des renouvellements, ils se vient chassés de leurs postes comme des pestiférés. De même, les ministres issus de l'ADEMA ne font aucune ouverture aux partisans de Dramane Dembélé dont la plupart se retrouvent au chômage. Bref, Dembélé ressemble bel et bien à un navire naufragé.
Revanche de Dembélé
La formation du gouvernement Modibo Kéita bouleverse les tendances. Dramane Dembélé entre dans la nouvelle équipe en qualité de ministre de l'Urbanisme et de l'Habitat. Visiblement, le président IBK lui retourne l'ascenseur car Dembélé n'est ni spécialisé en urbanisme, ni proposé au gouvernement par le parti ADEMA. Du coup, l'intéressé ne gêne guère de raconter à tout venant qu'il doit son entrée au gouvernement au chef de l'Etat seul et n'a pas de comptes à rendre à l'ADEMA.
Le nouveau ministre ne s'arrête pas en si bon chemin. Tenant sa revanche sur le parti, il travaille à la promotion systématique de ses seuls partisans. Dès sa prise de fonctions, il nomme Lazare Tembely chef de cabinet. Sont nommés conseillers techniques du ministre Abasse Yalcouyé, ingénieur des constructions civiles; Issa Ouologuème, ingénieur des constructions civiles ; Gaoussou Coulibaly, administrateur civil ; Amadou Maiga, ingénieur des constructions civiles. Ces conseillers partagent avec le chef de cabinet un trait commun: ils ont tous été démis de leurs responsabilités au sein des sections et sous-sections de l'ADEMA. Les chargés de mission du nouveau ministre sont eux aussi des bannis du parti: Assa Sylla, administrateur civil; Abdoulaye Bamba, gestionnaire; et Fabou Diarra, professeur d'enseignement secondaire.
Selon nos sources, Dramane Dembélé prépare une nouvelle vague de nominations pour gratifier les militants qui lui sont restés fidèles lors de sa transhumance. Au sein du département qu'il dirige, il reste en effet quantité de postes à distribuer. Des observateurs se demandent si le ministre pourra utiliser son piédestal pour prendre le contrôle du parti. Ce n'est là qu'une hypothèse car le département de Dramane Dembélé n'a pas la même importance que celui qu'Abdel Karim Konaté, ministre de l'Industrie et du Commerce, vice-président de l'ADEMA et resté proche des caciques du parti.
Abdoulaye Guindo