Bamako - Le corps recouvert du ressortissant français quitte sur une civière le restaurant-bar "La terrasse" de Bamako. A coups de grenades et de rafales automatiques, un tireur masqué a transformé en champ de
bataille cet établissement prisé de la clientèle expatriée.
Le véhicule des sapeurs-pompiers prend la direction d'une morgue de Bamako sous les regards de plusieurs dizaines de personnes dans la "rue Princesse", haut lieu de la nuit dans la capitale malienne jusqu'à présent largement épargnée par le violences qui ensanglantent le nord du pays.
Hagard, un serveur raconte avoir "vu de loin un véhicule 4X4 de couleur noire garé. Un homme grand de taille est descendu".
Sans s'attarder à la boîte de nuit située au rez-de-chaussée, il a pris
l'escalier et "il est monté à la terrasse" qui donne son nom à
l'établissement, où se trouve le bar-restaurant, avec une piste autour.
"En haut, il a commencé par jeter des grenades, et ensuite il a fait des
rafales d'arme automatique", poursuit le serveur. "Le tueur est venu là parce
qu'il y avait des étrangers. Il voulait tuer les étrangers, ça c'est sûr".
L'attentat, perpétré peu après minuit (heure locale et GMT) a fait cinq
tués, dont un Français et un Belge, et huit blessés, dont trois Suisses, selon
le dernier bilan de sources hospitalières.
Son auteur était masqué, selon la Mission de l'ONU au Mali (Minusma).
L'assaillant a crié "mort aux Blancs" en arrivant à l'étage, a affirmé une
source diplomatique, précisant que le Belge, un ancien parachutiste, était
depuis quelques mois responsable régional de la sécurité pour la délégation de
l'Union européenne (UE).
- Grenades de guerre -
Zakaria Maïga, un ami du Français tué, avec lequel il avait l'habitude de
sortir tous les vendredis soirs, a indiqué qu'alors que tous deux dansaient
"côte à côte sur la piste, la fusillade a commencé".
"C'était la panique. Moi, je me suis jeté à terre avant de sauter pour me
retrouver du côté des champs hippiques" dans les environs, raconte-t-il.
"Les choses se sont passées trop vite. Je n'ai pas pu voir le tireur",
ajoute Zakaria Maïga, tout juste revenu de la morgue où il a identifié la
dépouille de son ami.
Le gérant de "La terrasse", qui ne veut pas être nommément cité, ne cesse
de revivre ce "choc terrible".
"Je revois celui qui a tiré monter là où nous étions. Je le revois tirer
des coups de feu et lancer des grenades de guerre. Les gens fuyaient, d'autres
se sont jetés du haut. C'était la panique générale", explique-t-il.
"Après, le tueur est descendu et reparti. Son complice l'attendait en bas
avec un véhicule noir", poursuit-il.
La confusion s'est répandue dans le quartier dès les premières détonations.
"Vers minuit nous avons commencé à entendre des bruits d'armes et les gens
à courir dans tous les sens. Les gens ont commencé à dire que ce sont des
vagabonds, puis non, que ce sont des rebelles", a raconté à l'AFP un vendeur
de rue des environs, Hama Ongoiba.
En l'espace d'une demi-heure, tous les établissements de nuit de la rue ont
fermé.
Des dizaines de personnes cachées dans la boîte de nuit en bas du bâtiment
se sont terrées pendant deux heures avant de se risquer enfin à sortir.
"J'ai entendu les coups de feu, j'étais morte de peur. Nous nous sommes
cachés au rez-de-chaussée, mais on entendait tout ce qui se passait en haut à
la terrasse", témoigne Fili Kanouté, une étudiante malienne.
Dans leur cavale, les assaillants ont ensuite croisé une patrouille de
police, sur laquelle ils ont lancé deux grenades, tuant un policier, selon des
sources policières.
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