Malgré l’accord survenu entre la communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’ouest (Cédéao) et le Mali, qui a été d’ailleurs vue comme un deus ex machina, la question d’une intervention au Nord-Mali tarde à sortir de la confusion, et promet de donner du grain à moudre dans les jours à venir à l’opinion tant nationale qu’internationale.
L’abondance de réserve en dit long sur la position affichée par l’organisation des Nations unies que la Cédéao avait saisie pour obtenir l’autorisation d’une intervention militaire au Nord du Mali. Et l’observateur un tant soit peu attentif est en droit d’être surpris. Car voilà une rencontre internationale que tout le monde attendait pour voir poindre une volonté tenace commune d’évacuer le dossier malien, mais qui, grand paradoxe, n’a pas été au rendez-vous des espérances.
Evidence : le recouvrement de l’intégrité territoriale, comme nous l’avons dit dans un précédant article, n’est pas pour demain. La crise malienne et cette incessante ritournelle : « Mali Un et Indivisible », slogan vague que l’on agite pour bien montrer que le peuple reste résilient tout de même en ces temps de raz de marée sociopolitique. Où trouver la solution pour ramener le Mali à la paix ? Vaste question qui suscite actuellement une effarante joute diplomatique même à l’échelle internationale. Dans l’affaire, deux positions sont dos à dos : la première consiste à dire que les négociations sont une perte de temps, qu’il faut que l’ONU donne son feu vert pour une action armée ; la France, la Cédéao, le Mali en sont les tenants. La seconde, table quant à elle sur l’inefficacité d’une option militaire pour mettre en avant les négociations comme solution pérenne ; l’Algérie en est le cerveau.
La vérité c’est que toutes ces prises de position parfois osées, sont tout sauf anodines, puis que chacun de ces pays surfe sur la crise malienne pour insister sur des menaces de politique intérieure ou extérieure auxquelles ils étaient dans l’incapacité d’apporter une solution. Pour la France, le fait de s’activer en faveur d’une intervention militaire sous le parapluie onusien au Nord-Mali, va faciliter la récupération de ses otages qui sont aux mains des terroristes d’AQMI depuis bien longtemps. L’Algérie, pour sa part, semble se réjouir du fait que les débris du Groupe Islamique Armé qu’elle traque, se soient transportés dans le Nord du Mali ; partant si une intervention militaire venait à être effective, les menaces risquent de remonter à la surface à ses portes. C’est pourquoi d’ailleurs, à cette Assemblée générale de l’ONU, le ministre algérien délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, a formé un front de refus au déploiement des forces étrangères sur le sol malien, avec la Mauritanie… Et le grand perdant s’appelle le Mali !
Cela étant précisé, personne aussi n’est sans savoir qu’auprès de l’occident, les Etats-Unis en tête, ce qui se passe aujourd’hui au Mali ne mérite pas un si grand engouement. Et le discours tenu par le secrétaire général, Ban Ki-moon, dans lequel il souligne qu’une intervention militaire « devrait être envisagée avec une extrême prudence » compte tenu des graves conséquences qu’elle peut engendrer, conduit à refuser toute crédibilité à l’ONU. Car, c’est désormais chose connue de tous que la crise au Nord-Mali a, en partie, été crée par la communauté internationale qui, jusqu’ici, observait une indifférence assourdissante. En effet, en intervenant en Libye avec la résolution 1978 qu’elle a d’ailleurs torpillée, la communauté internationale a craqué une allumette et voilà que le Sahel a brûlé; pourtant pour le moment elle ne fait même pas office de pompier de la 25ieme heure…
La question qu’on ne peut s’empêcher de poser est la suivante : qu’est-ce qui explique cette promptitude d’un épervier à voter une résolution pour déloger un « supposé » dictateur, et dans le même temps traîner le pied quand il s’agit de livrer bataille contre des individus indésirables qui ne sont qu’à deux doigts de prendre en otage toute une région d’un continent : le Sahel. En vérité, la position de l’ONU est celle des deux poids deux mesures. Et là réside la colère de ses contempteurs qui se demandent le plus souvent à quoi elle sert, sinon à légitimer l’illégitime, à vouer aux gémonies les occupants du fauteuil de président, en Afrique, qui ne font pas leur affaire (comme Kadhafi) ; à être un outil dont se sert les président des grandes puissances pour augmenter leur côte de popularité en troublant le repos des paisibles populations d’Afrique. Et c’est à cela que sert l’ONU !
Ce n’est pas tout. Dans un récent éditorial dans le Quotidien d’Oran, M. Saadoune met en exergue l’incapacité des forces de la Cédéao à mener les hostilités, et estime que la soit disant « ex » junte met sous pression l’autorité politique à Bamako. Il abonde dans le même sens que la chef de la diplomatie yankee, Hilary Clinton, qui pense que la résolution de la crise passe par la mise en place d’un gouvernement démocratiquement élu qui pourra diriger les négociations. On entrevoit clairement que le Mali et un grand nombre de ses interlocuteurs ne sont pas sur la même longueur d’onde.
Et ce serait faire preuve de malhonnêteté intellectuelle que de dire que les choses vont pour le mieux à Bamako. Pour parler court, le vrai souci apparaît lors que la coordination des organisations patriotiques du Mali (Copam) tient des manifestations contre le déploiement des forces étrangères sur le sol malien, même si elle ne représente peut-être qu’une goutte d’eau dans un océan. Cela ne va rien arranger.
L’on devine l’ONU démotivée sur le dossier malien. Sa position donne à comprendre que le Mali va attendre plus qu’on ne le croit avant de déclencher une intervention militaire contre les fondamentalistes islamiques qui ne font plus de quartier dans leur combat d’une inutilité tentaculaire : destruction de mausolée, application de la charia…Négocier. Avec qui négocier ? Quand on sait que les islamistes ne sont ouverts au dialogue que dans la mesure où Bamako donne son feu vert pour l’application de la charia au Nord !