Les polices scientifiques françaises et belges à Bamako … Aucune arrestation pour l’instant ...Et pourtant, un véhicule suspect a été signalé la veille depuis Ségou en direction de Bamako ... Visite chez les blessés…
Nous avions eu le douloureux privilège d’être présent au moment des faits. Voilà ce que nous avions vu et entendu sur le lieu du drame ce vendredi 06 mars sur la «Rue Princesse».
Il est zéro heure passée de quelques minutes sur la «Rue Blabla» également appelée «Rue Princesse» sise en commune II du District, ce vendredi 06 mars. Alertés à la toute première heure par un coup de fil ami, nous sommes précipités sur les lieux pendant que les pétarades des Kalachnikovs n’étaient pas encore loin…
L’espace en question, faut-il le rappeler, a la particularité d’être constamment animé surtout les week-ends, nuits de Vendredi et samedi en l’occurrence. D’une longueur d’environ 500 mètres, elle abrite exclusivement les espaces de loisirs appelés «maquis» pour la plupart tenus et fréquentés surtout par des ressortissants étrangers désormais très nombreux dans la capitale. Les jeunes nationaux non plus, ne dédaignent nullement le coin. Bref, le secteur est vraiment endiablé et les bars, night-clubs et restaurants ne ferment presque jamais leurs portes. Et même si certains gardiens du temple l’assimilent, à tort ou à raison à un lieu de débauche, l’endroit est d’un apport économique très important et permet surtout aux étrangers de passer de meilleurs moments à Bamako. Et l’afflux des organismes internationaux au pays a fortement contribué à son importance d’aujourd’hui. Et pour y donner une certaine impression de sécurité, la police du Commissariat de Police effectue souvent des rondes en prenant soin de ne pas importuner les usagers.
Mais rien n’était normal, cette nuit fatidique, à notre arrivée sur les lieux. L’endroit était inhabituellement bondé de monde et le choc émotionnel très lisible sur les visages. L’odeur du souffre était perceptible. C’est bien plus tard, que commencèrent à arriver les renforts de la Gendarmerie, de la Garde nationale et de la Police. Le mal était déjà fait. Les assaillants dorénavant loin. Seuls les services de secours (sapeurs-pompiers) avaient désormais du boulot à faire. D’abord apporter les soins immédiats aux blessés (au moins 5) et transporter les corps des malheureux dont un Français, un Belge et Canadien lesquels, selon nos sources, travaillaient tous au compte de l’UE, en plus de celui du policier malien répondant au nom de Cheick et d’un lave-garde.
Un commando tueur
C’est à chaud que nous avions recueilli les témoignages d’hommes, de femmes et même des enfants talibés qui fréquentent assidument le secteur à la recherche de leur pitance journalière. Et ils corroborent tous.
Tous se souviennent avoir aperçu un homme probablement de peau blanche et barbu) cagoulé et/ou enturbanné, (certains évoquent la présence d’un véhicule 4X4 dont l’occupant n’a pas été formellement identifié.
Arrivés au niveau du bar-restaurant «La Terrasse» l’homme à pied descendit et monta l’escalier menant à «La Terrasse». «Sur place, il ouvrit le feu, sans discernement» précise une rescapée. Selon toute évidence, ils étaient venus là pour tuer à l’image des ceux de «Charlie Hebdo». Signalons que cet endroit a la particularité d’accueillir surtout des ressortissants européens au regard de son confort, de sa discrétion entre autres avantages recherchés par cette clientèle.
Et l’homme ressortit quelques minutes plus tard. Il s’engouffra dans la rue adjacente où un probable complice était censé l’attendre. Dans sa fuite, il se met à lancer des grenades. Il prit pour cible en l’occurrence le véhicule de patrouille du commissariat de police du 3ème Arrondissement (un véhicule qui a une histoire – lire encadré). Le malheureux chauffeur répondant au nom de Cheick Dembélé ne survécut pas aux fragments de l’explosif. Le moteur du véhicule tournait encore à notre passage.
B.S. Diarra
«Il m’a dit de réciter la profession de foi en Islam… »
Une des filles eut la malchance de tomber nez-à-nez avec le tueur à l’étage. On imagine aisément sa frayeur. Nous l’avions rencontrée au CHU Gabriel Touré où elle bénéficie en ce moment de soins appropriés. Il ressort de son témoignage que le terroriste lui a demandé de réciter la profession de foi en Islam («Il n’y a pas de Dieu que Dieu et Mahomet –PSL- est son Prophète» en langue arabe). Elle obéit. Et il la laissa en vie mais à condition de sauter de l’étage d’environ 5 mètres de haut. Elle survécut, mais avec une fracture. Elle aurait quand même pu se faire tuer.
Refugiées dans les toilettes et…
Les toilettes sont généralement conçues pour recevoir les besoins intimes des usagers. Mais ce groupe de filles décida d’attribuer une double fonction aux lieux. D’abord elles l’utilisèrent comme refuge. Mais la peur se faisant souvent accompagner par des fuites et des relâchements, l’endroit recouvrit sa véritable fonction… Elles ne sont pas blâmables. Et dire qu’elles ignoraient être dans la partie réservée aux hommes ! Enfin, la fin justifie les moyens. En tout cas, terroriste ou pas, la soirée était bel et bien terminée pour elles !
La marque d’Ançar-dine ou de Mourabitoun ?
Il nous revient, de sources sécuritaires, que des tracts avaient été lancés quelques jours avant le drame. Ils étaient particulièrement dirigés contre les ressortissants européens et français en général. Les services de renseignement restent convaincus qu’ils émanent du groupe d’Ançar-dine d’Iyad Aghaly vivement recherché et par les services français et par les Américains.
Aussi, en invitant, voire en forçant la jeune fille à réciter la profession de foi, le tueur a bien laissé une marque islamiste. Rappelons que le groupe Ançar-dine a fait allégeance à AQMI et est farouchement opposé à la signature d’un accord de paix au Mali. Rappelons cependant que l’attentat a été revendiqué par le groupe Al Mourabitoun, proche de Morkat BelMoktar présumé tué par l’armée tchadienne. Ce groupe, en tout état de cause, est réputé proche d’AQMI qu’Ançar-dine
Aucune arrestation liée à l’attentat
Une folle rumeur a circulé au lendemain de l’attentat. Rumeur, selon laquelle deux suspects liés à l’attentat, auraient été arrêtés. Il y eut en effet, l’arrestation de deux individus armés d’armes automatiques de fabrication tchèque. Mais ces deux individus arrêtés par le Commissariat de police du 6ème arrondissement et aux environs de la Maison des Artisans sont totalement étrangers au coup. Il s’agit de délinquants et de malfrats, mais pas les auteurs du coup de la «Rue Blabla». C’est, en tout, ce qu’ont révélé les premiers résultats de l’enquête.
Et pourtant, un véhicule suspect a été aperçu à Ségou en route vers Bamako
Le même jour (Vendredi 06 mars) aux environs de 16 heures, un véhicule 4X4, à son bord des hommes enturbannés est arrivé au niveau du poste de contrôle à Ségou, à la sortie vers Bamako. Les occupants se sont abstenus de descendre. Un policier en service a voulu en savoir plus. Et en jetant un regard à l’intérieur du véhicule, il aperçut des hommes lourdement armés qui lui intimèrent ordre d’ouvrir le barrage au risque de sa vie. Ce qu’il fit. Et le véhicule démarra en trombe.
Naturellement, le policier signala l’incident à sa hiérarchie régionale laquelle à son tour informa Bamako. La seule décision prise ici fut, non d’intercepter les suspects à mi-chemin comme cela se devrait, mais de les attendre tranquillement au poste de Samaya. Ils n’arrivèrent jamais, du moins pas de ce côté. Ils sont actuellement perdus dans la nature. Leur présence dans la capitale serait-elle liée à l’attentat de la «Rue Blabla» ? Seul Dieu le sait. En tout état de cause, il y a eu manifestement faut grave voire une complicité (nous y reviendrons).
Les polices scientifiques françaises et Belges à Bamako
La police locale dut remettre le dispositif en place en place suite à l’arrivée d’experts de la police et de la Gendarmerie française et Belges. D’autres experts étaient attendus.
Et ce ne sont pas les journalistes de la presse internationale qui manquent à l’appel. Ils viennent quasiment de tous les pays ayant envoyé des contingents sur place. Et ça bouillonne.
Rassemblés par B.S. Diarra
Source: La Sentinelle