Si la réussite d’un accord de paix dépend du degré d’adhésion et d’acceptation de la société civile et des partis politiques pour lesquels il est destiné, celui arraché au forceps et paraphé unilatéralement par les autorités maliennes, le 1er mars 2015 à Alger, contient un énorme handicap qui compromet sérieusement sa mise en application. Rejeté depuis sa conception par des partis politiques et paraphé par le gouvernement sans la prise en compte des propositions de la société civile malienne, l’accord d’Alger suscite un grand dégout auprès de l’opinion nationale malienne qui se démarque chaque jour un peu plus de ce qui s’apparente à un projet de partition du Mali à la base.
L’accord d’Alger garantie-t-elle la paix au Mali ? A s’en tenir aux réserves formulées de plus en plus par la société civile et certains partis politiques, l’avenir du document s’annonce hasardeux et périlleux. Comme pour dire qu’un accord de paix mal négocié ou non accepté par les populations enflamme la haine et le désamour, l’accord d’Alger au lieu d’apaiser les esprits des Maliens est en train littéralement de l’élargir le fossé entre les rebelles et le reste des Maliens. La frustration de la société civile malienne et des partis politiques est telle grande aujourd’hui qu’ils ne s’en cachent plus pour rejeter l’accord.
C’est le cas du parti de l’ancien Premier ministre, Modibo Sidibé qui voit en la mention du mot Azawad dans l’Accord comme » une réalité socio- culturelle, mémorielle et symbolique… » une véritable imposture politique et est porteuse de germes réels de séparatisme qu’aucun Malien ne doit sous estimer avant de rejeter purement et simplement le document. Même approche pour le Parti de Soumana Sako qui l’accord « parce que violant la constitution du 12 janvier 1992 ». Au même moment le Collectif des ressortissants du nord (COREN), une association de défense des intérêts des populations du nord, lui, décide d’exprimer son désaccord de façon un peu claire.
Car, le collectif en plus de rejeter le document qu’il estime n’avoir pas tenu compte de les amendements de la société civile a promis de mener « des actions d’envergure dans les régions du nord pour qu’on sache que le collectif ne cautionne pas le fait qu’il soit mis devant le fait accompli » avait expliqué le chargé juridique du Collectif des Ressortissants du Nord, Malicki Ibrahim lors d’une conférence de presse à la Maison de la presse. Toutefois, ces prises de distance de la société civile et des partis politiques n’ont rien de surprenant quand on sait que ceux-ci ont été mis à l’écart du processus des négociations depuis le départ. Et sauf miracle, l’accord d’Alger risque de causer beaucoup de problèmes entre ceux qui ont pris les armes et les autres Maliens qui s’y sentent injustement léser.
Youssouf Z KEITA