Enjeu ? Salir la ville et rendre le District propre. C’est la course à mort et sans merci entre ceux qui veulent rendre les lieux propres et ceux qui sont obstinés à salir, salir et salir. Qui va gagner ce duel à l’issue fatale pour l’une des parties.
Du côté de la filiale de la société marocaine Ozone, enterrer les ordures jusqu’ à la dernière brindille. « D’ici six mois, Bamako est propre », a confié, en exclusivité, à votre hebdo favori Le Matin le Directeur général Adjoint d’Ozone-Mali, Daouda Sogoba, au pied de la montagne d’ordures du cimetière de Lafiabougou le 1er janvier 2015. On était tôt le matin, la montagne était en feu et le Ministre en charge de l’Environnement en poste à l’époque, Abdoulaye Idrissa Maïga, était venu sur les lieux affirmer la volonté ferme des autorités d’éradiquer les mille et une collines d’ordures qui étreignent, chaque jour un peu plus, le District de Bamako. Et l’histoire devra retenir que c’est lui, Abdoulaye Idrissa Maïga qui a choisi Ozone parmi d’autres, qui a négocié « ton pied mon pied » pour les intérêts de la partie malienne avant de mettre tout le dispositif sur orbite. Malheureusement pour les secteurs eau, assainissement et environnement, il a été rappelé à un autre ministère, celui qui s’occupe de décentralisation en ce moment de négociation en Algérie.
Revenons à nos moutons. Ozone-Mali est décidé, malgré le rôle néfaste de la Mairie du District, à raser les montagnes, coiffer les rues même du sable et de la boue, curer les fosses, etc. Afin de faire place nette. Mais en face les Ennemies des ordures doivent compter avec un ennemi beaucoup plus coriace, tenace et persévérant : les populations de Bamako dont la capacité à salir n’a d’égal que leur volonté à souiller autour d’elles. Plus Ozone ramassera et plus elles jetteront de saleté. C’est à celui qui fera « alba » le premier. Et seul dieu connaît l’issue d’une telle guerre fratricide et totale. En effet à Bamako, c’est monsieur et madame tout le monde qui salit là où il se trouve. C’est automatique et systématique. Même les « un grand quelqu’un», les instruits et les « camalémba » salissent autour d’eux.
Le dimanche 15, une belle fin de matinée dernier un véhicule d’Ozone et son équipage sont venus curer le caniveau et ramasser toutes les ordures devant une maison où un joli goudron passe. C’est là que loge BK, un cadre de très haut niveau que les gens n’approchent pas trop à cause de sa «classe » et de sa distinction. Les ennemis des ordures avaient tout curé, gratté et s’employaient à tout mettre dans le véhicule pour dégager. BK sort son paquet de cigarette de classe, en sort la dernière cigarette et met le feu. Le paquet vide, il le jette à ses pieds sur le trottoir rendu propre. Comme nous le faisons tous avec les déchets divers de nos consommations alimentaires et autres. Au volant du véhicule Ozone, le chauffeur est choqué. Il fait remarquer à BK : « Nous, nous nettoyons et vous, vous n’attendez même pas notre départ pour salir ». Le très grand cadre et jeune père voit rouge. Il n’accepte pas que la racaille. Les choses s’enveniment.
La capacité du bamakois à salir, sa non préparation au changement d’attitude et son orgueil font que le niveau de ‘’salissement’’ de la ville sera maintenu. Depuis toujours, une peaux de banane jetée sur la voie a fait briser des hanches et causé des morts. Mais demain encore, le passager de la Sotrama avalera sa banane avant de jeter la peau par la fenêtre du minibus. Pour le malheur d’un motocycliste, d’un piéton ou dieu sait encore quel malchanceux.
C’est donc un duel à mort qui vient d’être engagé entre des monsieur-propres armés d’un côté et des machines à salir aàsouhait de l’autre. La fin du match est prévue pour juin 2015 coté attaquants. Mais la défense elle n’a pas dit son dernier mot. Qui va gagner la partie ? Les paris sont ouverts !
Amadou Tall
Source: Le Matin