Lundi dernier, la consternation était à son comble à Douentza. Le Toguna de la ville qui servait de lieu de retrouvailles pour les notables, a été saccagé par les fous de Dieu qui disent motiver leur action par le simple fait que l’érection d’un Toguna est anti-islamique. C’est dire donc qu’après la folie destructrice des extrémistes sur des mausolées à Tombouctou et Gao, ils s’attaquent maintenant aux objets sacrés dans le plateau dogon.
C’est en début septembre que la ville de Douentza jusque là contrôlée par des mouvements d’autodéfense depuis que le MNLA y a été chassé, est passée sous le contrôle des islamistes du MUJAO. Depuis, ils font édicter leurs règles à travers toute la ville. La charia s’applique dans toute sa cruauté : têtes couvertes pour les femmes, cigarette, alcool et musique interdits dans la rue pour les hommes. Le dur apprentissage de ce nouveau mode de vie déconcerte la population qui ne sait plus à quel saint se vouer. La police islamique veille au grain de jour comme de nuit et ne tolère aucun manquement à la discipline religieuse.
Le 3 octobre, quatre jeunes de Douentza feront les frais de la rigueur des barbus. Surpris en pleine consommation d’alcool, ces jeunes seront jugés puis condamnés à recevoir 40 coups de fouet sur la place de l’indépendance en présence de la population qui avait été conviée pour la circonstance. Un acte qui démontre toute la ferme détermination des envahisseurs dans l’application de la charia.
Si à Gao et Tombouctou, les mausolées ont fait les frais de la furie des fous de Dieu, à Douentza, ils se sont attaqués aux Toguna qu’ils accusent contraire à l’islam et dotés d’un esprit anti-islamique. Ce qui est faux. Le Toguna, (ou case à palabres) est une construction ouverte érigée en général au centre des villages dogons. Elles sont d’une hauteur insuffisante pour se tenir en position debout de façon à obliger les participants à s’asseoir. C’est le lieu où les sages du village débattent des problèmes de la communauté, il peut servir également de lieu pour la justice coutumière. C’est aussi et surtout une zone centrale du village, ombragée, où les vieux du village passent les heures chaudes de la journée en parlant les uns avec les autres.
Il était un peu plus de 16 heures lundi quand une dizaine d’islamistes se sont rendus sur la place qui abrite le Toguna. Ils l’ont tiré par deux véhicules pour faire tomber le hangar. Avant de mettre le feu à ce qui restait de l’édifice traditionnel sous le regard impuissant de la jeunesse qui s’est massée autour pour observer la scène.