La crise a fini par révéler le vrai visage du MNLA, un mouvement qui s’est allié au diable.
Ironie du sort, le diable n’en a pas voulu !
Le septentrion malien est une zone très défavorisée qui mérite l’attention de la nation : insuffisance, voire absence d’infrastructures de base, sécheresse endémique, niveau de vie très bas. Sa population est composée de Songhoïs, de Touaregs), d’Arabes, de Maures, de Bambaras, Bozos, Peuls, Armas, pour le reste. Les responsables politiques des vingt dernières années avaient cru trouver la parade en intégrant à tour de bras dans l’administration et dans la vie politique de nombreux représentants de la communauté touarègue dont les velléités sécessionnistes sont bien connues. Parallèlement, des projets de développement ont été conçus pour le nord. Malheureusement, les mauvaises habitudes ont vite pris le dessus sur la bonne gouvernance. Des potentats locaux se sont constitués, ont reçu des financements et des dons importants qui n’ont jamais profité aux populations.
Le pouvoir de Bamako a eu la faiblesse de fermer pudiquement les yeux. Pire, des prises d’otages et des trafics en tous genres se sont développés sous l’œil bienveillant de Bamako parfaitement au fait de ces pratiques déshonorantes. En attendant qu’une enquête sérieuse établisse clairement les faits et les responsabilités, on est frappé par la concordance entre certaines déclarations du président sortant et la situation actuelle des groupes rebelles. ATT clamait régulièrement la présence de quatre groupes rebelles dans le nord en ajoutant que trois de ces groupes étaient avec le Mali et un contre. Curieusement, les groupes islamistes (Ançar Dine, MUJAO, AQMI) qui ne remettent pas en cause l’intégrité du territoire sont au Mali pendant que le MNLA qui veut créer sa république n’est plus sur le territoire. Au départ, la bataille contre le MNLA avait pour objectif majeur de recouvrer l’intégrité territoriale.
Comme ce mouvement a déjà été expulsé par les islamistes, le problème actuel est le rétablissement de l’autorité de Bamako sur le septentrion avec l’aide de la communauté internationale, soit par la voie du dialogue, soit par la guerre pour repousser hors des frontières les envahisseurs, véritables « saigneurs » du désert, constitués majoritairement d’Algériens, de Mauritaniens et de ressortissants d’autres pays de la sous région. Le Mali étant désormais en phase avec la communauté internationale, la reconquête du nord est lancée. Et pour le MNLA, le requiem a déjà commencé.
Un destin de feuille morte
Pour se rappeler à notre mauvais souvenir, le MNLA vient de se fendre d’un communiqué dont la teneur ne manque pas de faire sourire. Après avoir annoncé à grand renfort de publicité la création de la « république de l’AZAWAD », le mouvement a été obligé de s’enfuir avant même l’intervention de l’armée malienne car les alliances qu’il avait nouées pour grossir artificiellement ses troupes lui ont été fatales. En effet, celui qui veut dîner à la table du diable doit s’assurer de la bonne longueur de ses fourchettes. Les singes ont fini par chasser du champ le prétendu propriétaire qui, ne pouvant se réfugier ni dans les herbes ni dans les arbres a, toute honte bue, choisi d’abandonner les populations de « sa république » entre les griffes des terroristes. Désormais sans territoire, sans population, sans reconnaissance internationale, réduit à sa plus simple expression et exilé au Burkina Faso, le MNLA est à la recherche d’un repositionnement alors qu’il n’intéresse plus personne.
Le glissement sémantique opéré entre indépendance et autodétermination semble être sa nouvelle trouvaille mais au Mali, on en a entendu d’autres. Où est le sérieux dans cette affaire d’autodétermination ? C’est aux islamistes que le MNLA doit d’abord aller réclamer des comptes avant de vouloir discuter avec le Mali. La clé de son autodétermination et de sa survie se trouve entre les mains des islamistes. S’il ne peut la reprendre, qu’il ait la décence de se taire et de laisser les autorités maliennes s’en occuper avec leurs moyens et l’appui de la communauté internationale. Le Mali ne discutera certainement pas avec ceux qui l’ont trahi plus d’une fois et lourdement endeuillé cette fois en ouvrant son espace à des brigands de tout acabit. N’est-ce pas en lançant sa rébellion que le MNLA a permis les massacres d’Aguel Ock, l’exode des populations du nord, le coup d’état, la destruction des mausolées et des lieux saints, les mutilations, les lapidations, les flagellations, les vols, les viols, la confiscation des libertés ? A quel titre les autorités maliennes discuteraient-elles avec un mouvement qui ne détient plus que le ministère de la parole ? Pitoyablement vaincus et finalement contraints à l’exil, ce qui est attendu du MNLA et de ses responsables, ce sont des actes de repentance. Cela permettra d’envisager plus tard les conditions de leur retour.
Et aussi vrai que les feuilles mortes finissent à la poubelle ou sur la décharge publique, le MNLA, faute de repentance, mourra de sa belle mort. La sanction sera à la dimension de ses péchés. En attendant, il faut envisager la mise en place d’un nouveau leadership au nord Mali, qui tiendra compte de la réalité du terrain et des forces en présence. En plus d’IYAD Aghali si celui-ci accepte un règlement pacifique, les populations sédentaires des trois régions actuellement occupées ne doivent plus être ignorées lors des négociations car elles sont largement majoritaires et donc plus représentatives.
Pour un nouveau leadership au nord
Tout le monde garde certainement en mémoire ces propos tenus par le président ATT suite aux terribles massacres d’Aguel Ock et avant sa mise en congé forcé. « J’ai fait confiance à des personnes qui m’ont trahi ». De qui parlait-il ? Naturellement de ceux des acteurs maliens qui conduisent l’actuelle rébellion. En effet, beaucoup ont reproché à ATT d’avoir trop cédé en signant les fameux accords d’Alger. Ces accords consacrent un abandon de fait du septentrion et la constitution de super-privilèges au profit de rebelles pourtant non repentis qui avaient pignon sur rue à Bamako, fréquentaient les allées du palais de Koulouba.
La crise est là et il faut en sortir. Le dialogue avant la guerre est une option raisonnable au regard de la donne et des risques liés aux dommages collatéraux d’une guerre. D’un côté des islamistes avec les branches internationales que sont AQMI et le MUJAO, et de l’autre Ançar Dine d’IYAD Aghali pour la branche locale. Ce dernier pourrait devenir un interlocuteur privilégié des autorités maliennes s’il acceptait de s’affranchir de la tutelle islamiste. A son crédit, il tient certaines positions sur le territoire et il a déjà entamé des discussions avec les responsables du Haut Conseil Islamique. En plus de prendre de la distance avec les durs d’AQMI et du MUJAO, il devra revoir à la baisse ses prétentions idéologiques contre la reconnaissance d’un statut de leader régional dans un cadre républicain.
C’est un leadership auquel seront nécessairement associées les communautés sédentaires de la région de Kidal. En tout état de cause, toute force déployée au nord devra désormais être celle de la république et, en tant que telle placée sous le seul commandement des autorités légalement établies. L’implication de l’Algérie et de la Mauritanie est souhaitable car les principaux chefs d’AQMI et du MUJAO au Mali sont leurs ressortissants, pour lesquels elles doivent trouver les mots justes et obtenir leur retrait de façon pacifique ou se résoudre à les combattre aux côtés de la communauté internationale. Cependant, comment accabler les islamistes en oubliant ceux des nôtres (hommes politiques ou rebelles) qui les ont introduits sur le territoire ? Le MNLA doit une fois de plus demander pardon au peuple malien dans son ensemble.
S’il accepte de le faire, ce serait la meilleure façon d’entamer la réconciliation et ses membres pourraient réintégrer la république dans les formes et conditions à préciser. Le développement du Mali ne peut se faire sans celui du nord qui mérite toute notre attention. Le nord est composé d’une mosaïque de populations dont l’immense majorité reste attachée à la république du Mali. Nous avons une communauté de destin et il n’est pas acceptable qu’une partie des habitants du pays, de surcroît minoritaire, cherche à prendre la république en otage. Certains responsables du MNLA seraient déjà des membres bien connus et même des élus de certaines formations politiques dont ils n’auraient pas démissionné et qui ne les auraient pas exclus malgré leurs prétentions sécessionnistes.
Leurs connexions internes n’ont pas d’emprise sur le cours actuel des évènements et leurs connexions externes sont désemparées devant leur soudaine débâcle. Aux responsables du MNLA d’en tirer toutes les conséquences. Leur escapade va contribuer malheureusement à fortifier le mur de la méfiance entre les populations du nord elles-mêmes et entre celles-ci et leurs frères et sœurs du sud, alors que de nombreux cadres Touaregs restés fidèles à la république ont fait depuis longtemps le choix de leur devenir commun au sein du Mali.
Pendant longtemps, la gestion du dossier de la rébellion a été la chasse gardée du seul président de la république. On en connaît les conséquences aujourd’hui. On a dégarni le front nord de toute présence militaire significative et réintégré au sein de l’administration et des forces de défense et de sécurité dans l’opacité la plus totale des hommes dont on n’avait aucune garantie sur le sens moral et l’attachement à la république. Plus jamais ça ! Plus jamais d’accord avec une communauté du nord sans consultation des autres communautés locales ! Plus jamais d’accord engageant le pays sans la ratification de la représentation nationale !
Aucune portion du territoire national ne devrait être abandonnée à quelque groupe que ce soit et pour quelque raison que ce soit. L’attachement à la république doit être sans équivoque pour tous et la souveraineté nationale rétablie sur chaque bout du territoire. Des sacrifices importants devront être consentis pour réhabiliter l’armée en l’équipant à la dimension de nos ambitions pour qu’elle assure convenablement la défense du territoire. C’est une partie du défi que le prochain président devra relever avec le soutien de toute la nation.