Alors que la question « que reste t-il du MNLA ? » concentre toutes les interrogations, les désormais héros de la rébellion touareg ont encore fait une apparition sur le devant de la scène dans la crise qui essouffle le Mali. Encore une fois, ce n’était qu’une tempête dans un verre d’eau…
Manifestement, les rebelles du Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) ont changé de position mais pas de langage. A cheval sur les revendications de l’indépendance de la fantomatique République de l’Azawad, qu’ils ont d’ailleurs déclaré indépendant le 06 avril dernier, les irrédentistes touareg laissent comprendre qu’ils ont au possible adouci leur position dans le combat de démagogie identitaire et de surenchère qui les oppose depuis neuf mois à l’Etat malien. En lieu et place de l’expression « indépendance », ils préfèrent désormais parler du droit à l’autodétermination qui, disons-le sans hésitation, s’inscrit dans la charte des Nations Unis comme un droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.
En se maintenant dans la vision d’après laquelle la bonne foi des indépendantistes n’est ni une réalité ni originalité, l’on est vite appelé par le bon sens à dire que les propos des membres du conseil transitoire de l’Etat de l’Azawad (CTEA) ne sont rien de moins que des ingrédients cuisinés d’un même plat qu’ils ont déjà servi dans le temps à l’Etat malien. « Nous revendiquons notre droit à l’autodétermination qui ne veut pas dire sécession. C’est le droit à la vie, à la santé, à l’éducation, les droits politiques et le droit à l’expression ». Propagande de la même veine que celle entretenue il n’y a pas si longtemps, délayée sur certains médias internationaux où ils avaient leurs entrées voire grandes. Et en portant une appréciation raisonnée sur la rébellion label MNLA, l’on accède à la compréhension du fait que les multiples raisons déclinées ne sont pas propres qu’aux touaregs.
En vérité, ces problèmes à savoir le droit à la santé, à l’éducation, les droits politiques… constituent un enjeu de taille pour un pays comme le Mali où la démocratie, sans craindre de se tromper, avait du plomb dans l’aile. Où le standing laisse à désirer. De là à prendre les armes et à participer à la chute même du pays dans l’escarcelle des fondamentalistes islamiques, il y a de quoi être bassiné ! C’est pourquoi il ne fait aucun doute que le MNLA est indéfendable et ne parviendra jamais à atteindre la conviction d’aucun citoyen, du haut de sa revendication d’une époque antérieure. Surtout que la réalité qui s’offre à son sujet est qu’il ne pèse plus lourd dans la balance, et perd son temps à plonger dans la boue. Pour rien.
Ce faisant, loin de comprendre que son cheval de bataille, l’indépendance comme l’autodétermination, va à contre-courant, le MNLA continue à se maintenir dans l’ornière d’un combat d’une inutilité sans nom. Car il est patent que l’aboutissement favorable aux rebelles de ce combat, risquerait d’allumer la mèche d’une chaine de revendications du même calibre chez d’autres peuples partageant le Nord du Mali avec le MNLA. Les touaregs du MNLA_ la précision, elle est importante_ ne sont au dessus de personne pour que l’Etat malien concentre toute son attention sur eux !
Encore une fois, ce qui conforte le MNLA dans sa posture, c’est surtout le fait que les avis convergent, curieusement même à l’échelle internationale, pour dire qu’il aura droit à un traitement de faveur, comprendre qu’il aura le loisir de s’asseoir à la table des négociations avec l’Etat malien. Reste que cette perspective incite à émettre des inquiétudes, en considération du fait que la plateforme présentée à la rencontre de Ouaga donne à voir que les « oublieux des bienfaits du MNLA » sont déterminés à dicter les termes de la négociation. Une négociation déjà vidée de tout sens de crédibilité, quand on sait surtout que les rebelles sont dans les faveurs du médiateur lui-même, Blaise Compaoré, président du Faso. Et à Bamako, comme dans nombre de chancelleries, il y a un souhait partagé qui est de voir Compaoré déchu du statut de médiateur, tant il devient de plus évident qu’il est en train de tirer le bouchon un peu loin. Pire, la négociation se fait dans le dos du peuple malien. Or disait Lamine Guèye : « tout ce qui se fait sans vous se fait contre vous ».
Il ne fait donc aucun doute que la crise malienne a empoisonné même l’atmosphère diplomatique, et que tout ce qui concerne le Mali se décidera désormais ailleurs ; le personnel politique du pays ayant lui-même transporté ses problèmes dans les pays voisins depuis les premières heures. Mais, en tout état de cause, le nouveau langage (d’hypocrisie ?) du MNLA qui est de revendiquer l’autodétermination, est un piège auquel ni l’Etat malien ni la cédéao encore moins la communauté internationale n’ont avantage à mordre….Le Mali peut négocier avec le MNLA mais sans concession. Et si « une mauvaise négociation qui aboutissait à la paix était mieux qu’une guerre fratricide »(1) ?
(1) Noumou Ben Diakité, Mourir pour l’Azalaï, chronique d’une rébellion, ed Jamana.