S’il est vrai que la paix est un comportement, il y a lieu de s’interroger sur les agissements des groupes rebelles armés. Aujourd’hui tout est fait pour torpiller le processus de paix (terrorisme, insécurité, violences récurrentes, morts d’hommes etc.). A un moment donné il faut savoir dire Basta !
La coordination des mouvements de l’Azawad (MNLA HCUA MAA) a finalement décidé de ne pas parapher le projet d’accord de paix et de réconciliation proposé le 1 er mars 2015 par l’Algérie, chef de file de la médiation internationale.
Deux semaines après l’adhésion des autres protagonistes à savoir le gouvernement du Mali et les autres groupes politico militaires du nord du Mali engagés dans la plate-forme ((Le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA, dissident), la Coordination pour le peuple de l’Azawad (CPA) et la Coordination des Mouvements et Fronts patriotiques de résistance (CM-FPR) ), la CMA après consultation de sa « base » rejette en l’état le texte, estimant que celui-ci ne s’attaquait pas aux racines du conflit tout en réaffirmant sa disposition à poursuivre les négociations avec le gouvernement du Mali. Voilà ce qui est clair ! Maintenant, les regards se tournent vers les autres parties impliquées dans le règlement pacifique du conflit. Que chacun s’assume à commencer par la médiation internationale qui fut à l’origine d’un tel document.
Quid de l’attitude de la France malgré l’injonction faite par son ministre des affaires étrangères aux groupes rebelles armés de parapher le texte sans délai ? Le Mali, Etat souverain va-t-il continuer à se faire trimballer sans cesse par des gens qui ont juré sa partition ? Et l’ONU dans tout ça ?
Le statut quo arrange les groupes rebelles armés
L’on ne saurait rester dans une situation de ni paix ni guerre avec des négociations sans fin. Les populations du nord du Mali ont souffert et souffrent encore. Les rebelles occupent de fait la région de Kidal. Ils en ont fait leur fief. Ce qui est très significatif avec tout ce qui se trame. La preuve, la ville de Kidal a été le point de ralliement des séparatistes de tout bord pour discuter du document d’Alger avec les « populations azawadiennes ».
Un évènement inédit et surtout révélateur du danger qui se profile à l’horizon. Pour eux, désormais il n’est plus nécessaire d’aller en Mauritanie, au Burkina Faso en Algérie etc., pour discuter de leurs problèmes. Kidal leur appartient, ils y règnent en maitre absolu sous l’œil bienveillant de la France et de l’ONU, et jusqu’à présent, interdiction formelle est faite au Mali de faire quoi ce soit, et la vie est belle !
Les négociations peuvent toujours attendre les groupes rebelles n’en ont rien à foutre à partir du moment où ils occupent la région de Kidal, et c’est ce qui est dangereux pour le Mali. La nature ayant horreur du vide, l’absence de l’Etat dans cette partie du territoire national risque d’engendrer à terme d’autres situations fâcheuses. Le temps joue contre le Mali.
Pour le MNLA et ses affidés, négocier, c’est ni plus ni moins qu’entériner juridiquement une situation d’occupation de fait avec laquelle tout le monde s’en accommode en apparence. Si près du but (autonomie) que tout recul reviendrait pour eux à anéantir tous les efforts entrepris jusque-là. Aussi les choses sont allées tellement loin cette fois ci que tout retour dans le giron national serait synonyme d’apostasie pour certains d’entre eux.
La communauté internationale s’est beaucoup investie pour mériter un tel traitement de la part des groupes rebelles armés. Aujourd’hui ce volt face est un pied de nez aux efforts déployés par l’ensemble des partenaires engagés pour une paix durable et définitive au Mali. Si les groupes rebelles ne veulent pas de l’accord de paix proposé par la médiation internationale, cette dernière ne peut et ne doit plus empêcher l’Etat du Mali d’exercer sa souveraineté sur l’ensemble du territoire national y compris la région de Kidal dont le statut particulier actuel est sa fabrique, la France en tête.
J’accuse la France
Les groupes rebelles existent, se « tapent la poitrine » et font de la surenchère aujourd’hui parce que une certaine France l’a voulu ainsi. Tout a été mis en œuvre pour aider les séparatistes à croiser le fer avec l’Etat central. A quelles fins ? Bien malin qui pourra répondre.
Les Maliens ont salué en son temps l’intervention française sur leur sol. L’opération SERVAL qui a permis la reconquête des régions occupées (Tombouctou Gao Kidal) par les séparatistes et les Djihadistes unis dans le crime, a vu aussi la participation des militaires africains notamment Tchadiens et ceux du Mali. Pour la libération de Kidal, la France n’a pas voulu des militaires maliens à ses côtés, et c’est justement là où tout est parti. A l’époque le Mali reconnaissant ne voulait pour rien au monde contrarier son « libérateur ». D’ailleurs en avait-il les moyens ?
On a voulu faire de Kidal un cas particulier, différent des deux autres. C’est avec l’épisode de Kidal, que La France a clairement montré qu’elle n’était pas au Mali pour combattre les séparatistes du MNLA mais plutôt les Djihadistes. Soit ! Mais alors pourquoi empêcher l’armée Malienne d’accomplir sa mission régalienne de sécurisation du territoire national ?
Tout dans l’attitude de la France trahissait une duplicité évidente : C’est à la faveur de l’intervention française que le MNLA a réoccupé le terrain et s’est confortablement installé et pendant ce temps on interdisait à l’armée Malienne de pénétrer à Kidal. Cela fait plus de deux ans que le MNLA a pris possession de Kidal et les troupes françaises veillent au grain ! Toute tentative visant à déloger les envahisseurs s’est soldée par un échec, les soutiens visibles ou occultes toujours prêts à s’interposer. Cette situation est inacceptable, Kidal doit revenir sans délai dans le giron national.
Aujourd’hui les groupes armés ont eu le courage de clarifier leur position en refusant de parapher un accord qui soit dit en passant recèle les germes d’une partition programmée à terme. Visiblement on se paie même la tête de la grande France, celle grâce à qui tout a été possible pour ces gens-là.
Aujourd’hui, ils sont plus que convaincus que l’histoire est en marche. Que ni la communauté internationale, ni la France, ni personne ne peut les empêcher de parvenir à leurs fins. Ma foi, et si on arrêtait un tout petit peu ce bal des faux culs, ce jeu de poker menteur entre acteurs impliqués ou finalement le Mali est le dindon de la farce ! La France est interpellée. Elle doit clarifier pour de bon sa position. Si elle a un agenda personnel autre, comme il se susurre depuis un moment déjà, qu’elle joue carte sur table, le Mali est à l’écoute !
Les autorités Maliennes doivent être à hauteur de souhait dans ce dossier
Les Maliens ont porté IBK à la tête du pays pour prioritairement trouver une solution à l’épineux problème du nord. Il est dommage de constater que le problème perdure avec cette circonstance aggravante que Kidal est toujours sous occupation rebelle. L’option militaire n’est pour le moment pas à l’ordre du jour pour des raisons que nous savons tous, celle diplomatique marque le pas par la faute justement des groupes rebelles. Il est clair que la situation ne peut rester en l’état, autrement c’est la partition assurée du Mali.
Les autorités maliennes doivent dans un élan de responsabilité, de résilience, de justice, de solidarité, de fraternité, d’unité, d’ouverture, de fermeté, de sacrifice, d’anticipation, de dignité, de courage etc. chercher par tous les moyens à régler ce problème qui n’a que trop duré ! L’on sait que tout a été fait pour réduire la marge de manœuvre du Mali, l’affaiblir au maximum, néanmoins avec la nouvelle donne Le Mali doit désormais pouvoir dire sa vérité, se faire respecter en tant que pays souverain et ne plus quémander une hypothétique paix qui n’est finalement que pure illusion avec ce que les groupes rebelles armés nous servent.
S’il est vrai que la paix est un comportement, il y a lieu de s’interroger sur les agissements des groupes rebelles armés. Aujourd’hui tout est fait pour torpiller le processus de paix (terrorisme, insécurité, violences récurrentes, morts d’hommes etc.). A un moment donné il faut savoir dire Basta !
Makan DIALLO
Docteur en Droit Privé
Avocat inscrit aux barreaux de Paris et du Mali
Source: L’Aube