L’Union africaine ne peut pas revendiquer ouvertement la paternité de la rencontre qui s’ouvre ce matin à Bamako. Elle ne peut pas, en effet, organiser de réunion dans un pays suspendu. Or le Mali l’est encore. Mais la réunion est vitale. Une semaine est déjà partie depuis la dernière rencontre du Conseil de Sécurité qui donne un délai de quarante cinq jours à la Cedeao pour lui soumettre un plan détaillé pour la Micema (Mission de la Cedeao au Mali). Il a été donc décidé de laisser floues les questions de pure forme et de faire de la rencontre de ce matin le lieu de rencontre de tous les grandes parties prenantes à la question du Nord-Mali : la Cedeao à travers le président de son groupe de contact sur le Mali le président Nigérian, Johnatan Goodluck. A celui s’ajoutent le médiateur burkinabé Djibril Bassolé et trois ministres ivoiriens dont celui de la Défense. Côté pays du champ, forte présence mauritanienne et nigérienne et une très imposante délégation algérienne dont un impressionnant convoi de journalistes. Mme Zuma, la toute nouvelle présidente de la Commission de l’Ua et Romano Prodi, le nouvel envoyé de Ban Ki Moon au Sahel sont également de ce rendez-vous dont le plat de résistance est la validation d’un document de concept proposé par l’Union africaine.
Valider le concept d’Opérations
Ce document revendique trois objectifs : proposer une approche globale de la situation au Mali basée sur les besoins et les priorités des autorités maliennes ; définir le cadre politique général dans lequel s’inscrit le Concept des Opérations de la Micema ; promouvoir un soutien international coordonné en vue de la stabilisation du Mali et de la région sahélo- saharienne. En clair, l’Union africaine et elle n’aura pas de mal à prêcher les convertis que sont la Cedeao, l’Onu et l’Ue, partira de la requête malienne qui ne s’oppose plus à l’arrivée des troupes de la Cedeao à Bamako et avec laquelle Abuja s’est déclarée en phase. La Cedeao prévoyait d’abord le déploiement à Bamako, puis le renforcement des capacités de l’armée malienne suivie trois mois après des opérations de reconquête du Nord. L’urgence signalée de la situation au Nord Mali et de ses conséquences sur les pays voisins -les récents enlèvements au Niger- pourrait amener à réduire les délais. C’est ce que plaidera en tout cas la France qui soutient une intervention militaire rapide au Nord du Mali. Naturellement, l’Algérie, hostile à toute intervention étrangère à sa porte suivra avec attention ces débats. Il est vrai que jeudi soir sur les antennes de l’Ortm, le ministre Medelci admettait la nécessité de faire appel à la communauté internationale pour lutter contre le terrorisme, même s’il a plutôt insisté sur l’appui humanitaire et politique comme contribution de l’Algérie à la résolution de la crise malienne.
Vers la levée des sanctions contre le Mali
Selon une source proche du dossier, la réunion de Bamako devrait mettre tout le monde d’accord sur la stratégie pour libérer le Nord malien, les moyens qui doivent être utilisés, le coût des opérations et le rôle des parties prenantes. Par contre, l’Union africaine plaide pour la levée de la suspension du Mali de l’Ua. Cette levée justifiée selon Addis-Abeba par les progrès accomplis par Bamako en ce qui concerne le retour à l’ordre constitutionnel devrait entraîner, à son tour, la levée d’autres sanctions dont la suspension de l’aide publique au Mali, soit plus de 600 milliards Cfa qui ne peuvent plus être libérés totalement selon certains partenaires techniques et financiers. Mais sur la question de la levée de la suspension, il faudra s’attendre à des débats serrés. Pour certains observateurs, l’ex junte est encore trop présente dans les affaires publiques. De plus les rapports d’enquête demandés, notamment sur la tentative d’assassinat du président Dioncounda Traoré n’ont pas été remis à la Cedeao et à l’Ua comme requis. Cependant, le président Traoré avait lui-même pardonné à ses agresseurs et promis de s’attacher au règlement du conflit Bérets Rouges-Bérets Verts, laissant ainsi penser à une probable amnistie des événements liés à ces deux affaires. Jeudi pendant que l’Assemblée nationale votait une résolution pro intervention militaire internationale pour libérer le Nord malien, plus d’un millier de marcheurs, à l’initiative du leader religieux des Hamallistes (islam soufi) et de la Copam, coalition pro putsch, manifestaient à Bamako contre l’intervention de la Cedeao. Cette marche a été baptisée marche de soutien à l’armée dont la hiérarchie, en tout cas,le ministre de la Défense et l’Etat major ont participé, selon le président Traoré, à l’élaboration des points techniques de la requête d’assistance du gouvernement à la Cedeao et aux Nations-Unies, entre autres.