Les rebelles islamistes qui occupent depuis 6 mois les régions septentrionales du Mali ne sont plus à la fête. Loin s’en faut. La semaine dernière, à Tombouctou, les responsables de la rébellion et leurs associés d’AQMI ont tenu trois réunions houleuses.
«Consolider la lutte permanente contre le terrorisme et le crime transnational organisé»
Au cours de ces rencontres où étaient conviés tous les combattants qui forment l’armée, la police et la gendarmerie islamiques, il a été annoncé un marché très clair: la CEDEAO, encouragée par l’ONU, va bientôt lancer une attaque contre les occupants et chaque combattant islamiste doit savoir qu’il risque sa vie; par conséquent, et dès à présent, les occupants veulent s’assurer de l’engagement libre et loyal des combattants. « Nous ne voulons obliger personne à mourir, a annoncé l’émissaire des chefs rebelles; ceux qui croient pouvoir se lancer dans la guerre, mourir en martyr et aller au paradis peuvent rester à notre service; quant à ceux qui ne le veulent pas, ils sont libres de nous remettre nos armes et de rejoindre leurs familles. ».
A cette grave annonce, des dizaines de combattants ont immédiatement opté pour la désertion. Ils ont remis aux autorités rebelles leurs armes et leurs tenues militaires et disparu dans la nature. Bon nombre d’entre les « déserteurs » sont des ressortissants de Tombouctou. « Il y a parmi les déserteurs des hommes qui commandaient des unités rebelles », assure une de nos sources. La même source nous révèle que ces désertions massives et autorisées ont sérieusement allégé les rangs islamistes, au point d’obliger ces derniers à faire appel à des renforts apparemment cantonnés dans le grand désert. Analyse de notre source : « Vendredi 19 octobre, une colonne de 20 véhicules, soit environ 60 combattants, a fait son entrée à Tombouctou en fin de journée. Ce sont les renforts d’AQMI. A mon avis, l’ensemble des effectifs rebelles ne dépasse pas, à Tombouctou, 150 éléments. Je ne les crois même pas capables de résister à un assaut de l’armée malienne, ni, à plus forte raison, de la force internationale en préparation ».
Les rebelles, visiblement, ne veulent pas s’embarraser de combattants dont le moral serait au talon pour avoir été enrôlés de force; ils préfèrent combattre avec une petite armée fanatisée, prête à mourir, plutôt qu’avec une multitude de soldats qui s’enfuiraient au premier coup de canon. Ce qu’ils ont fait avec leurs combattants, ils l’ont déjà fait avec la population civile de Tombouctou comme Procès-Verbal l’a déjà rapporté dans ses précédentes livraisons. La population a été invitée à adhérer au jihad contre les « armées mécréantes » (Mali et CEDEAO) mais n’a subi aucune représaille lorsque, sous la conduite des imams de Tombouctou, elle a décidé de ne pas se mêler de guerre.
En attendant, les chefs rebelles de la ville se sont imposé une sorte de couvre-feu. A partir de 18 heures, tous les combattants disparaissent des rues. Couvre-feu atypique qui réjouit les civils de Tombouctou, débarrassés des patrouilles islamistes et désormais libres de faire ce qu’ils veulent de 18 heures à l’aube.
Comment les rebelles ont traité les 20 femmes arrêtées pour port de collier
Dans notre édition de lundi dernier, nous révélions que 20 Tombouctiennes avaient été arrêtées par les islamistes pour avoir porté, contre les ordres, un collier à la hanche (« baya »). Les 20 femmes, conduites à la police islamique, ont été débarrasées de leurs colliers. Quand ils défaisaient un collier, les fameux policiers islamistes le jetaient sur le sol en criant: « Al-Haram! » (« Quel péché! »). Sur ordre des islamistes, les parents ont amené aux détenues des vêtements « corrects » avant que les malheureuses soient libérées.
Ces arrestations ont provoqué la colère des femmes du quartier de Belafarandi (quartier des Belhas): elles ont juré de faire partir les islamistes sans leur livrer la guerre. Par quel moyen alors ? « Nous ne porterons désormais que ce qui nous plaira; soit les islamistes nous tueront tous, soit ils renonceront à instaurer la charia en ville! », tonnent les révoltées en choeur.