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Me KASSOUM TAPO, Député : « Je ne fais le combat de personne, je ne me bats contre personne »
Publié le vendredi 11 mai 2012   |  Les Echos


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© Autre presse (Photo d`archive)
Me Kassoum Tapo


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L’élection d’un nouveau président à l’Assemblée nationale, la prorogation du mandat des députés, le choix du président de la transition et la durée de son mandat, le rôle du CNRDRE et la proposition de loi d’amnistie faite en sa faveur par le président de la République par intérim, sont entre sujets que nous avons abordés avec le député Me Kassoum Tapo, membre du CE de l’Adéma-PASJ et porte-parole du FDR. Interview.

Les Echos : L’Assemblée nationale du Mali doit élire un nouveau président en vue du remplacement de l’actuel détenteur du perchoir, Pr. Dioncounda Traoré nommé président de la République par intérim. Etes-vous candidat ?

Me Kassoum Tapo : Pour l’instant, la vacance du poste du président de l’Assemblée nationale n’a pas été constatée. Je ne saurais vous dire si je suis candidat ou pas. Il faut attendre que cette vacance soit constatée par le règlement intérieur de notre institution. Ce qui n’a pas été encore fait, parce que simplement, il y a beaucoup d’interprétations. Ceux qui devaient faire de la médecine s’occupent de droit, nous parlent de jurisprudence d’ailleurs alors que nous avons des textes de chez nous qui n’ont rien à voir avec des textes et des pratiques qui sont évoqués.
Pour ce qui nous concerne, la Cour constitutionnelle a été très claire, même quand vous devenez ministre dans notre pays, vous perdez votre mandat de député. Ce n’est pas comme en France où il y a des cumuls de mandats et de fonctions. Au Mali, une fois que vous êtes nommé ministre, vous ne revenez plus à l’Assemblée nationale. Si cela est vrai pour le poste de ministre ça l’est plus pour la fonction de président de la République, qui a prêté serment en cette qualité. Il est déchu normalement de son mandat de député. Quarante jours après, président de la Transition ou pas, il n’est plus possible pour lui de revenir à l’Assemblée nationale. Mais c’est le bureau qui doit constater cette vacance et procéder à une élection. Il y a un débat auquel je ne me mêle pas. Je n’ai aucune ambition démesurée en ce moment précis. Ce n’est pas ma préoccupation du tout. Si le poste est déclaré vacant ou si le problème de candidature se posait, en ce moment-là je me prononcerais. Mais tant que ce n’est pas constaté, je ne souhaite pas me prononcer pour l’instant.

Les Echos : Certains pensent que la présidence de l’Assemblée nationale doit être occupée de facto par l’URD, qui occupe le fauteuil de 1er vice-président. Que dit le règlement de l’Assemblée nationale ? Y a-t-il un accord entre l’Adéma-PASJ et URD à ce sujet ?

Me K. T. : Oui bien sûr, il y a une convention entre l’Adéma et l’URD dans ce sens qui prévoit que la présidence de l’Assemblée est occupée par l’Adéma et la 1ere vice-présidence par l’URD, la 1ere questure par l’Adéma et la 2e questure revient à l’URD. C’est cette convention qui est signée entre nous pour la législature. Il est évident que demain, si on doit élire un président de l’Assemblée, ce poste revient au groupe parlementaire Adéma. C’est pourquoi, je vous ai dit que je ne veux pas me prononcer sur ma propre candidature. C’est l’Adéma qui doit présenter un candidat à ce poste. En ce qui concerne l’intérim, il n’y a pas à proprement parler d’intérim à l’Assemblée nationale. Il y a des vice-présidents, qui, en cas d’absence du président, lui succèdent dans l’ordre de préséance. Mais en cas de vacance du poste de président, il est procédé à l’élection d’un nouveau président. C’est ce que dit notre règlement intérieur. Le vice-président ne peut pas assurer l’intérim du poste de président de l’Assemblée nationale. On procède à l’élection d’un nouveau président.

Les Echos : Des associations qui font du sit-in devant l’Assemblée nationale empêchant les députés d’y entrer demandent sa dissolution. Ces associations travaillent à quelle fin, selon vous ? Pensez-vous que le mandat des députés doit continuer jusqu’à son terme en juillet 2012 ?

Me K. T. : Que le mandat des députés aille à son terme, cela est indiscutable. Puisque les institutions de la République ont été rétablies. L’Assemblée nationale fait partie des institutions de la République, elle doit terminer son mandat. Mieux, le mandat des députés a été prorogé par l’Accord-cadre de la Cédéao et cela pendant la durée de la transition. Je ne vois pas pourquoi ce groupuscule occupe la devanture de l’Assemblée nationale. De toutes les façons, ils nous laissent entrer maintenant. Avant il y avait des injures, des agressions, etc. je pense qu’ils sont un peu revenus à la raison. Chacun, dans une République, dans une démocratie a le droit de manifester. S’ils n’ont pas autre chose à faire que de s’asseoir devant l’Assemblée nationale tout le temps que cela leur plaira, moi je ne vois pas d’inconvénient. Pourvu qu’ils n’empêchent pas les députés de faire leur travail.
Aujourd’hui, proroger le mandat des députés est une nécessité pour la transition elle-même. Puisqu’il faudra bien prendre en charge les revendications des militaires dans le cadre des lois de programmation militaire. Qui va voter ces lois s’il n’y a pas d’Assemblée ? Pour arriver à l’apaisement, qui va voter la loi d’amnistie ? Qui va voter demain une loi de finance rectificative pour revoir tous les problèmes économiques dans notre pays ? Les conventions économiques qui vont être éventuellement signées par le Mali pour nous accompagner, nous aider, si elles ne sont pas ratifiées par un parlement, elles ne seront pas exécutées par les pays qui s’engagent à nos côtés. Voilà un certain nombre de réalités qui font que les gens doivent abandonner leurs arrières pensées, leurs petits calculs politiciens. Aujourd’hui, c’est l’intérêt du Mali qui est à l’Assemblée nationale. Ce n’est pas une première que dans les transitions, on proroge le mandat des députés. Il y a déjà des précédents dans la sous-région. Chez nous, comme je l’ai dit tantôt, nous avons un accord-cadre qui prévoit déjà cette prorogation-là. Cet accord-cadre fait partie de l’arsenal juridique malien. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi on l’appliquerait pour une chose et ne le ferait pas pour une autre.

Les Echos : La prorogation du mandat du président par intérim de la République, Pr. Dioncounda Traoré de 40 jours à 12 mois comme le recommande la Cédéao, fait polémique. L’ex-junte y oppose son niet. Faut-il, selon vous, suivre la recommandation de la Cédéao ou faut-il nommer un nouveau président pour la transition ?

Me K. T. : Je ne fais le combat de personne. X ou Y à la transition, si vous me le permettez, ça m’est complètement égal. J’ai simplement dit qu’il faut être le plus proche de notre Constitution. C’est ce qu’a dit le président du Burkina Faso Blaise Compaoré, (Ndlr : médiateur de la Cédéao dans la crise malienne). Pour une simple raison, c’est que nous sommes dans un monde globalisé qui a ses principes et qu’il faut respecter une certaine légalité internationale. Donc plus on se rapproche de la constitution, plus notre pays sera reconnu sur le plan international. Plus nous allons nous y éloigner, plus nous ferons un Etat d’exception, plus la communauté internationale nous refusera. Voilà mes préoccupations, c’est tout. Donc que X soit président de la transition ou pas, ce n’est pas mon problème. Je ne me bats pour personne, je ne fais le combat de personne et je ne me bats contre personne. Ce qui m’intéresse c’est le Mali. Qu’on puisse nous sortir de cette situation dramatique, tragique sur le plan économique, social, politique. Et sans l’accompagnement de la communauté internationale, nous ne pourrons pas nous en sortir ni sur le plan économique, ni sur le plan social ou militaire. Nous devons tenir un tout petit peu compte de l’opinion des autres. Sinon que Dioncounda Traoré ou un autre dirige la transition m’est parfaitement égal.

Les Echos : Quel doit être aujourd’hui le rôle du CNRDRE pour une transition pacifique et l’organisation d’élections régulières ?

Me K. T. : Je pense que c’est illusoire de dire que le CNRDRE ne jouera pas de rôle dans la transition.
Déjà l’armée est dans le gouvernement. Et d’ailleurs, je fais remarquer qu’elle occupe des postes qu’elle a eu à occuper même sous ATT. Donc ça ne pose pas de problème. Maintenant, le CNRDRE en tant que tel à mon avis doit être aussi dans une structure, dans un organe qu’il faut imaginer, une autorité supérieure de la défense, comme on a créé le Médiateur de la République, le Vérificateur. Général…
Une autorité supérieure qui soit composée des membres du CNRDRE et d’autres militaires qui puisse prendre en charge les questions de défense, de sécurité, la question de restructuration de l’armée, de son rééquipement. Et cette autorité pourrait même être rattachée au ministère de la Défense, de la Sécurité intérieure.
Donc, je pense que le CNRDRE pourrait parfaitement s’insérer dans un cadre comme tel. Et à ce titre, moi, je vous dis si demain le capitaine Sanogo dirige une telle institution, je suis persuadé qu’il sera reçu à la Maison blanche, il sera reçu par Hollande et par les chefs d’Etat de la sous-région pour aider notre armée. Je ne suis pas sûr que ces mêmes autorités le reçoivent s’il était à la tête de la Transition.
Si aujourd’hui, la Communauté internationale est d’accord pour qu’on fasse une Transition dirigée par le capitaine Sanogo pourquoi pas. Il y a eu un antécédent : ATT a dirigé la transition en 1991, mais seulement nous ne sommes plus en 1991. Nous sommes en 2012. Le monde a changé entre temps, ce n’est plus la même chose. Il faut être réaliste, mais surtout réintégrer cette réalité internationale. C’est démagogique de dire que le Mali n’a pas besoin de la Cédéao, de la France, des Etats-Unis. C’est de l’enfantillage. Les politiciens qui tiennent ce langage-là en réalité, ils n’aiment pas le Mali. Ils seraient incapables de le gérer si on le leur donnait. Je comprends qu’ils se battent pour le poste, pour vivre et survivre, mais de grâce qu’on reconnaisse que notre pays aujourd’hui a besoin d’aide pour s’en sortir.

Les Echos : Notre pays est-il véritablement sorti de l’ornière avec les affrontements entre militaires comme ce qui s’est passé le 30 avril dernier et les arrestations de citoyens sur la base d’accusations de coup d’Etat ?

Me K. T. : C’est regrettable ce qui s’est passé. Je pense qu’on n’en avait pas besoin. Personnellement, je ne le cautionne pas. Vous savez, dans cette affaire, des démons, il y a de vrais démons même dans la société civile qui font n’importe quoi et qui accusent les gens de n’importe quoi. Moi, j’ai été accusé par un leader syndicaliste. Une dénonciation ignoble, calomnieuse et lâche. Il est parti dire que j’ai les moyens, les hommes, les armes, l’argent nécessaires pour faire un coup d’Etat et que je ne laisserai pas le CNRDRE diriger ce pays. Malheureusement pour lui, les chefs militaires à qui il est parti faire ces dénonciations mensongères sous le sceau de la confidence me connaissent. Au ministère de la Défense, j’ai deux colonels qui ont été mes étudiants à l’Ena. Ils savent que ces genres de choses ne me ressemblent pas. Le Capitaine Sanogo, lui-même officier de renseignement, sait faire le tri des informations. Voilà ce qui m’a sauvé, sinon j’allais encore refaire l’objet d’une seconde arrestation et même d’agressions. C’est une irresponsabilité non seulement pour exposer ma vie, mais aussi pour créer des problèmes au pays.
Donc, nous avons ce genre de personnage qui, pour leurs petits intérêts, sont prêts à sacrifier l’intérêt du peuple. Ce sont les mêmes qui font l’apologie du régime, qui font l’apologie de X ou Y, qui sont les thuriféraires de tous les régimes et qui cherchent uniquement à survivre. C’est ça la réalité politique de ce pays.

Les Echos : Que devient le FDR dont vous êtes le porte-parole ?

Me K. T. : Je pense que le Front a fait l’essentiel. L’essentiel, c’était le retour à l’ordre constitutionnel normal. On l’a obtenu. Il y a un président intérimaire, un gouvernement, une Assemblée nationale. Toutes les institutions de la République fonctionnent. C’était ça l’objectif du FDR. Maintenant, les partis politiques doivent reprendre en ce qui les concerne, leurs activités, préparer les prochaines élections. La seule question qui n’est pas tranchée est la présidence de la Transition.
L’Accord-cadre prévoit de faire l’objet d’une discussion entre le CNRDRE et la Cédéao, laissons-les discuter. Il faut juste souhaiter que ce dialogue puisse aboutir à une meilleure solution, à la définition du rôle du CNRDRE dans la transition qui était prévue aussi dans l’Accord-cadre, la définition d’un chronogramme de sortie de la transition… C’est ce qu’il faut souhaiter. A partir de là, je pense que le front a été une réalité politique dans notre paysage politique qui doit et peut être continué sous d’autres formes. Pour moi, le front a accompli pleinement sa mission.

Les Echos : L’amnistie a été proposée (mercredi 9 mai) par le président de la République au CNRDRE. Vous en tant que juriste, est-ce qu’il y a une loi qui prévoit cela ?

Me K. T. : La Constitution prévoit que le président de la République peut initier une loi d’amnistie. Dans le contexte actuel, dans la recherche d’apaisement, je pense que c’est une excellente chose. J’ai eu à donner mon avis à la demande du président intérimaire sur ce projet de loi d’amnistie bien avant même sa prestation du serment. On avait envisagé que ce projet de loi d’amnistie, qui est prévu dans l’Accord-cadre, soit intégré dans l’ordonnancement juridique national. C’est un accord international reconnu par notre Cour constitutionnelle. On ne va donc pas spéculer pour dire si elle est conforme ou non à la Constitution. En tout cas, l’Assemblée nationale dont je fais partie ne s’opposera pas à cette question juridique si la loi nous parvient, nous la voterons pour aller à un apaisement.
Ça ne nous pose aucun problème. Cette loi sera votée par l’Assemblée nationale. Nous attendons qu’on sorte de cette situation pour pouvoir engager les vrais débats de la nation devant l’Assemblée nationale, devant la représentation nationale. On parle de la situation de nos soldats. J’ai compris, j’ai appris beaucoup de choses. J’ai appris que les soldats vivent dans des conditions infrahumaines. Personnellement, je n’irai pas me battre dans les conditions où ils sont, ce qu’on leur propose, ce qu’on leur paye. Donc, je dis que nous devons avoir un débat à la représentation nationale.
Une loi de programmation militaire doit être votée pour mettre l’armée dans toutes les conditions. Mettre les hommes de troupe, les officiers, les sous-officiers dans les conditions qui répondent à la difficulté de leur métier, à la rigueur de leur mission. Qu’ils soient mis dans les conditions de dignité pour pouvoir nous défendre pour exercer leur mission régalienne de défense de notre sécurité, de notre intégrité. Ces genres de débats doivent venir devant l’Assemblée. Je suis persuadé qu’au niveau international, nous bénéficierons de tous les accompagnements pour nous assortir si nous respectons la légalité internationale. Et l’Assemblée votera également, ratifiera toutes les conventions internationales qui viendront nous aider aussi bien sur le plan militaire, social, économique.

Les Echos : Que pensez-vous de la reconquête des villes du Nord qui sont sous la domination des bandits armés ?

Me K. T. : La communauté internationale ne toléra pas longtemps cette situation. Il n’y a pas que le Mali qui est concerné. Non seulement, les frontières de nos voisins sont menacées, mais au-delà, les Européens, Américains sont menacés par Aqmi, par tous les terroristes, par ces trafiquants de drogues qui sont en train de faire leur nid dans le Nord du Mali. C’est une situation intolérable au regard de la communauté internationale.

Propos recueillis par
Abdrahamane Dicko

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