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Les Echos N° 3961 du 25/10/2012

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Sikasso : Réduire le gaspillage des récoltes
Publié le lundi 29 octobre 2012  |  Les Echos




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Chaque année, des quantités considérables de récoltes vivrières se gâtent ou sont infestées lors de leur acheminement vers les consommateurs, les pertes régulières peuvent s’élever de 15 à 35 %. Les causes sont multiples et sont maîtrisables si l’on s’y met. Réduire le gaspillage et les déchets alimentaires pourrait largement contribuer à lutter contre la famine et augmenter les revenus agricoles, donc assurer la sécurité alimentaire.
La région de Sikasso, située au sud du Mali, est favorable à l’agriculture grâce à son climat tropical et humide. On y cultive les céréales (mil, maïs, sorgho, etc.) à côté des cultures de rente. Les légumes et fruits occupent aussi une place de choix dans l’alimentation des populations. Pour les cultures vivrières, le maïs, toutes variétés confondues, est la première céréale à être récoltée, car il a un cycle plus court.
Les pertes alimentaires que subissent les producteurs de maïs sont énormes et le plus souvent dues à des techniques de production post-récoltes inadéquates ainsi qu’à des infrastructures d’entreposage, de transformation et de transport médiocres. Mais au-delà des céréales, le problème est particulièrement grave pour les produits périssables comme les fruits et légumes, qui se détériorent rapidement dans les conditions chaudes et humides, lorsque les infrastructures d’entreposage ou de réfrigération sont insuffisantes.
Selon la direction régionale de l’agriculture, en fonction des cultures, entre 15 à 35 % des récoltes peuvent être perdues sur le champ en raison des techniques de récolte médiocres et d’autres facteurs. Les nuisibles et les maladies, comme les passereaux peuvent dévaster la production agricole avant même les récoltes. A côté des récoltes réellement perdues, existent également de nombreux produits qui perdent leur qualité, et donc en valeur économique et nutritionnelle.
Drissa Ouattara est un producteur d’une demi-dizaine d’hectares de maïs dans la localité de Kléla à 60 km au nord de Sikasso. Comme beaucoup d’autres personnes de sa communauté sénoufo, ce producteur, père de six enfants, perdait 10 à 20 % de sa récolte à cause de sa mauvaise gestion et des ravageurs après seulement 3 mois de stockage après la récolte.
Mais grâce à un prêt de la Banque nationale de développement agricole (BNDA) et aux conseils des techniciens, il s’est construit un silo moderne d’une capacité de 20 tonnes de maïs. « Depuis que j’ai commencé à utiliser le silo, je ne perds plus de céréales et depuis, le transport du maïs vers le grenier est organisé et assuré », explique-t-il. Et de poursuivre : « J’ai assez pour nourrir ma famille. Il m’en reste que je peux garder et vendre plus tard en cas de pénurie sur le marché ».
Le président de l’Association des producteurs de pomme de terre de Bogotiéré affirme que par le passé les producteurs ont perdu dans les champs une grande partie de leur récolte qui n’a pu être vendue à cause des problèmes de conservation et de transport.
« Je me rappelle, il y a 10 ans, la pomme de terre après récolte était conservée dans un grand fossé recouverte de paille et de banco. Une fois les prédateurs ont détruit ma récolte. J’ai perdu 80 % ». Oumar Berthé planteur de mangues, lui, confie que chaque année une partie de sa production reste au champ faute de transport, car les routes sont impraticables une fois les premières pluies tombées.
Mieux écouter les techniciens
Vu l’impact massif des pertes post récolte sur la sécurité alimentaire, l’Etat, les partenaires techniques et financiers se sont impliqués en investissant dans la recherche et les unités de protection végétale qui aident les agriculteurs sur le terrain.
Plusieurs producteurs se sont regroupés en associations pour solliciter l’appui des partenaires techniques et financiers (PCDA et Sènè Kounafoli blon) pour la formation en technique de production, récolte et transformation des produits agricoles afin de minimiser les pertes. C’est ainsi que dans plusieurs zones de production de la région de Sikasso comme Kléla, le projet Sassakawa Global 2000 a formé les paysans dans la gestion après la récolte, la commercialisation, l’amélioration de la manutention, le stockage, l’emballage, les pratiques de tri et d’étalonnage, en un mot l’ensemble de la filière.
Le durcissement des normes de qualité permet ainsi de réduire le gaspillage des récoltes. Comme les techniques sont plus coûteuses, les producteurs de la localité se sont regroupés autour d’un centre pour partager les coûts.
Valoriser en transformant
La région de Sikasso, vitrine du Mali produit une grande quantité de fruits et légumes toute l’année, une grande partie est périssable (mangues, patates, oranges, pomme de terre etc.) Pour réduire ce gaspillage, les partenaires, chercheurs et techniciens ont mis en place des chaînes de transformation pour atteindre l’autosuffisance alimentaire.
Des unités de transformation de produits alimentaires sont implantées dans les cercles de Sikasso, Koutiala, Bougouni et Yorossso. Les techniques de séchage des fruits, des légumes et plantes racines ne se contentent pas de réduire les pertes dues aux surplus saisonniers. Elles peuvent aussi leur ajouter de la valeur.
Sécher, saler, décaper, sucrer et fumer… toutes ces activités prolongent la durée de conservation et garantissent que le produit rapporte plus au producteur. Certaines des techniques les plus efficaces sont de petites installations peu exigeantes en capitaux. Céréales, légumes et tubercules peuvent être transformés en farines qui servent d’aliments locaux préparés.
Les séchoirs solaires, adoptés par un nombre croissant de groupements de paysans, offrent une méthode saine au plan économique et environnemental de déshydratation des aliments, des bananes aux choux en passant par les mangues et les légumes traditionnels. Ces produits, qui rapportent plus, sont également plus faciles à emballer, à transporter et ouvrent des perspectives de nouveaux marchés.
Les acteurs de la filière mangue estime que le gaspillage de mangues a été réduit de 30 à 10 % ces dernières années grâce à des initiatives de valorisation de la filière ainsi que des fruits et des légumes en jus, en confitures. L’organisation des producteurs a permis d’améliorer l’efficacité des filières alimentaires, limitant du coup le gaspillage.
Les institutions et les politiques doivent elles aussi encourager les systèmes efficaces d’entreposage et de commercialisation des aliments, avec une législation. L’investissement dans les infrastructures, en particulier les routes, le transport est également indispensable. Le développement de liens contractuels entre les producteurs et les transformateurs peut être efficace pour renforcer les chaînes de valeur et réduire les pertes alimentaires.

B. Y. Cissé
(correspondant régional)

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