Depuis le début de la crise que traverse notre pays, des partenaires rechignent à décaisser pour des projets pourtant vitaux
Les entreprises maliennes sont nombreuses qui traversent actuellement la période des vaches maigres. Plusieurs se sont écroulées comme des châteaux de carte à cause du gel des subventions des partenaires techniques et financiers ou des bailleurs de fonds. Le secteur de la santé n’est pas en dehors de cette situation « chaotique ». Il souffre d’une certaine hésitation des partenaires à décaisser les ressources financières dans le contexte de crise institutionnelle et d’insécurité que traverse le pays.
Les projets et programmes de santé sont mis en œuvre pour améliorer la santé de nos compatriotes. Ils assurent la recherche et la prise en charge des malades. Ils développent des stratégies de prévention contre les maladies qui représentent de réels problèmes de santé publique. Au Mali le secteur de la santé bénéficie du soutien des partenaires. Ils apportent des subventions intéressantes pour la mise en œuvre des projets ou des programmes de santé. Cet accompagnement apporte une réelle bouffée au secteur de la santé. Mais depuis les évènements de mars dernier, le pays a connu une période d’incertitude, d’instabilité et d’insécurité. Cette situation a préoccupé les partenaires qui se sont détournés de notre pays. Cet état de fait a occasionné des difficultés pour certains projets et programmes de santé. Les difficultés ne sont pas ressenties partout avec la même intensité. Au niveau de la Cellule sectorielle de lutte contre le sida (CSLS) du ministère de la Santé, la crise perturbe le dispositif de prise en charge des personnes vivant avec le VIH/sida. Selon le Dr Aliou Sylla coordinateur de la CSLS la crise a eu des conséquences réelles. La lutte contre la pandémie semble perdre d’intensité puisqu’environ 59 sites de prise en charge des personnes infectées par le VIH/sida sur 338 ont cessé de fonctionner. Beaucoup de malades sont perdus de vue dans le traitement antirétroviral des personnes infectées par le VIH. On a enregistré près de 600 patients dans cette situation précédemment pris en charge dans les sites de prise en charge au Nord-Mali. Les sites qui observent un arrêt dans leur fonctionnement sont basés, pour la plupart, dans les régions septentrionales, à Mopti et Tenenkou. Le Dr Aliou Sylla rappelle qu’une cellule de crise a été créée pour informer ces malades déplacés qui ont fui les régions occupées par les bandes armées de la possibilité de se faire prendre en charge dans tous les sites. Il relève qu’un nombre important de perdus de vue a été retrouvé. Ils reçoivent actuellement des soins dans les sites de Bamako ou dans les sites de prise en charge des autres régions sécurisées. Les personnes vivant avec le VIH/sida qui sont restées dans les localités sous le joug des bandes armées sont aussi traitées. Elles reçoivent leurs médicaments à travers les agents de santé restés sur place. Un couloir humanitaire a été mis en place avec la collaboration de l’Association de recherche et d’accompagnement à domicile des personnes vivant avec le Vih/sida (ARCAD-Sida. Cette organisation évolue dans l’accompagnement et la prise en charge communautaire des personnes infectées par le sida et l’association Cri du cœur. problème d’accessibilité aux réactifs. Mais au-delà de ces multiples actions, il existe un problème d’accessibilité aux intrants, c’est-à-dire les réactifs. Sans réactif aucun dépistage n’est possible. Des efforts sont en cours pour pallier cette situation. Les intrants ont même été acheminés dans certains sites de dépistage dans les régions Nord du Mali. Ces efforts doivent se poursuivre pour éviter les ruptures. Le coordinateur de la cellule nourrit quelques appréhensions légitimes sur la situation de la prise en charge des personnes vivant avec le VIH/sida. « Ma crainte est que les conflits sont facteurs d’aggravation et de propagation du virus du Sida » prévient Aliou Sylla. Les sites de prise en charge au Point G, Gabriel Touré, le centre de santé de référence (csref) de la commune II avaient connu des ruptures de médicaments. Cette situation de manque concernait une seule molécule qui a été remplacée. Les choses sont rentrées dans l’ordre. Les efforts de l’Etat et de la Banque mondiale ont permis de pallier la rupture. Aujourd’hui les activités de formation, de supervision et de maintenance des équipements, tournent au ralenti. Mais un partenaire (Esther) apporte à la cellule sectorielle un soutien. CDC d’Atlanta contribue aussi pour la surveillance sentinelle. L’Unicef de son côté apporte des réactifs. Les arriérés de salaire des agents recrutés sur Fonds mondial constituent un handicap. Aujourd’hui des efforts ont été accomplis par l’Etat pour éponger une partie de ces arriérés. Mais il reste encore 4 à 6 mois d’impayés au personnel déployé dans les sites de prise en charge. Pour le coordinateur de la cellule sectorielle de lutte contre le sida, le Fonds mondial est en train de prendre les dispositions pour solder les arriérés.
Certains programmes de santé se démènent dans les problèmes. Les difficultés ne sont pas prononcées au sein du Programme national de lutte contre la dracunculose ou « ver de Guinée ». Il dispose de trois partenaires essentiels : la Fondation Carter, l’OMS et l’Unicef. Le coordinateur du Programme national d’éradication de la dracunculose, le Dr Gabriel Guindo explique que les rapports sont normaux avec la Fondation Carter, le partenaire stratégique. On continue à payer, sur les ressources de la fondation, des indemnités aux agents sur le terrain dans les régions septentrionales. Mais le programme vit des difficultés avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Elles sont antérieures à la crise et elles ont trait au processus de décaissement des ressources. L’Unicef qui finançait les activités de lutte contre le ver de Guinée, notamment l’approvisionnement en eau potable dans la région de Mopti, a passé le témoin à la Fondation Carter. L’Etat n’a pas apporté un sou au Programme.