Alors que l’accord paraphé d’Alger par le gouvernement et les groupes armés non-sécessionnistes (Gatia et autres) divise les Maliens, le Mnla et ses acolytes refusant, quant à eux, de le signer, voilà qu’un autre front s’ouvre pour le pouvoir en place. En effet, les travailleurs ‘compressés’ sont en boule et menacent de battre le pavé le 7 avril prochain, si leurs doléances ne sont pas prises en compte.
C’est du moins ce qui ressort de la conférence de presse co-animée le 19 mars dernier à la Bourse du travail par Ousmane Berthé, président de l’Association des travailleurs ‘compressés’ du Mali (Atcm) et le Secrétaire général de l’Union nationale des travailleurs ‘compressés’ du Mali (Untcm), Cheikh Oumar Sissoko. Selon les conférenciers, la pomme de discorde porte sur le reliquat financier que leur doit l’Etat malien.
En fait, les requérants, tous des travailleurs de sociétés et d’entreprises d’Etat ou publiques, à la suite de leur «compression», réclamaient à l'Etat le paiement de 58 milliards de Fcfa. De négociation en négociation et de protocole en protocole, le gouvernement a signifié aux ‘compressés’ qu'il n’est en mesure que de leur payer un montant de 5 milliards Fcfa. Proposition douloureusement acceptée.
Auparavant, ils avaient saisi les juridictions compétentes à l’effet d’obtenir la condamnation de l’Etat malien à leur payer leurs droits. Munis de leurs décisions de justice, ils avaient saisi l’Etat à travers le ministère de l’Economie et des Finances en vue de se faire payer les montants successifs des condamnations prononcées.
Curieusement, excipant de façon inéquitable et à tort de son pouvoir régalien et de l’immunité légale de saisie dont il bénéficie, l’Etat décida de ne leur payer que 60% du montant des condamnations. Pis, l’Etat a conditionné ce paiement, d’une part, à la renonciation par les requérants de toutes réclamations relatives au reliquat de 40% desdites condamnations et, d’autre part, à la formalisation de différents protocoles d’accord.
Vivant dans le dénuement le plus total avec leurs familles après leur «congédiement», les requérants n’avaient guère de choix. Sous peine de mourir de faim avec leurs familles, ils acceptèrent les conditions imposées par l’Etat, à savoir la formalisation des protocoles d’accord prévoyant le paiement à leur profit de 60% seulement dus à l’exclusion du reliquat de 40%.
Il est évident, selon les conférenciers, qu’un tel accord, extorqué par contrainte (violence morale), ne saurait valoir en droit ce que l’immunité d’exécution forcée, qui sous-tend la décision de l’Etat, est fondée sur le principe de la présomption de solvabilité de l’Etat et ne peut, par conséquent, justifier un refus de payement, même partiel.
Dans son rapport annuel 2010, adressé au chef du gouvernement de l’époque, précisent les conférenciers, le Médiateur de la République recommandait à l’endroit des ministres de l’Economie et des Finances ; de la Justice, Garde des Sceaux ; et du Travail et de la Fonction publique la ‘’cessation de la négociation ou l’application d’accord de transaction qui a pour effet de diminuer les montants des condamnations pécuniaires des personnes publiques prononcées en faveur des travailleurs ‘compressés’ des entreprises publiques…’’.
Cette recommandation du Médiateur de la République, affirment-ils, corrobore l’iniquité et l’illégalité de l’application des décotes des droits des requérants (travailleurs ‘compressés’). Etant chefs de familles et n’ayant comme seule source de revenus que leur rémunération, ils vivaient dans une situation d’indigence assez pathétique. Ils ne pouvaient donc pas résister à la décision de l’Etat de ne leur payer que 60% de leurs dus, puisque contraints par la nécessité.
De ce fait, expliquent-ils, les accords conclus entre l’Etat par le biais du ministère des Finances et les requérants respectivement en date des 7 juillet 2003, 2 mars 2004, 21 juillet 2011, l’ont été sous le coup de la contrainte. «Par conséquent, il convient d’annuler lesdits accords ainsi que tous les actes subséquents avec toutes les conséquence de droit», ont martelé les conférenciers.
Ce, avant d’ajouter qu’ils invitent l’Etat au dialogue afin de prendre en considération leurs doléances. Faute de cela, ils battront le pavé le 7 avril prochain. Une marche qui partira de la Bourse du travail pour prendre fin avec un sit-in devant le ministère des Finances. «Notre combat n’est nullement orienté contre le pouvoir en place. Nous voulons tout simplement qu’IBK que nous, Maliennes et Maliens, avons élu à plus de 77%, écoute notre cri de cœur», a conclu le président de l’Association des travailleurs ‘compressés’ du Mali, Ousmane Berthé.
À noter que cette conférence a été précédée par un meeting d’information des militants et sympathisants de l’Atcm et de l’Untcm.
Bruno E. LOMA
Source: Le Reporter