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IBK: "En cas d`intervention au nord du Mali, la population servira de bouclier humain"
Publié le samedi 3 novembre 2012  |  Le monde


Regroupement
© aBamako.com par as
Regroupement "IBK 2012"
Samedi 23 juin 2012. Bamako. Atelier d`échanges et de reflexion sur les propositions de sortie de crise organise au CICB par le regroupement IBK 2012. Photo : Ibrahim Boubacar Keita (IBK), président du Rassemblement pour le Mali (RPM)


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Ibrahim Boubacar Keita, 69 ans, – dit "IBK", ancien premier ministre (1994-2000) et ex-président du Parlement (2002-2007) – figurait parmi les favoris à la présidentielle malienne de 2012 avant que le scrutin ne soit reporté sine die après le coup d`Etat militaire du 22 mars organisé en réaction à l`offensive de la rébellion touareg et islamiste au nord du pays, mi-janvier.
De passage à Paris le 29 octobre, "IBK" attire l`attention sur les risques d`une intervention militaire dans son pays.
Les consultations se multiplient pour une opération armée internationale au nord du Mali, huit mois après la partition de votre pays, êtes-vous satisfait ?

Nous sommes très inquiets. Toute cette fureur guerrière fait peur. Au nord, se côtoient les irréductibles barbus des mouvements islamisant, la mouvance AQMI, et d`autres, plus tièdes, mais non moins dangereux, des néophytes d`autant plus zélés. Ce qui est aussi inquiétant, c`est la très grande jeunesse de ces gens-là. Et puis, il y a le narcotrafic qui complique le tout.

Peut-on encore éviter une intervention militaire ?
Elle semble inéluctable. Je vois l`engagement de l`Union africaine, l`arrivée d`éléments précurseurs de l`Union européenne pour évaluer nos besoins et mettre notre armée à niveau, la résolution des Nations unies... Tout cela a enclenché un processus.

N`y a-t-il pas des groupes avec lesquels discuter ?
Il y a des gens très clairs. Ceux qui disent : "Nous voulons appliquer la charia." Ça, ce n`est pas négociable. Le Mali a une vocation laïque. Mais dans le même temps, ils ne remettent pas en cause l`intégrité territoriale du Mali.
A côté d`eux, il y a ceux qui se retrouvent là pour une nouvelle croisade radicale au nom de l`islam et qui fricotent avec le narcotrafic, je veux parler du Mujao. Je ne vois pas de quoi on peut discuter avec de tels éléments.
Il est encore possible que certains éléments d`Ansar Eddine [un groupe islamiste qui a pris le contrôle du nord du Mali] comprennent qu`il y a un seuil à partir duquel plus rien ne sera négociable en raison des excès commis. Certains de nos voisins nous laissent penser qu`ils ont assez d`influence pour les amener àcomposer, essayons.
Discuter alors qu`une intervention militaire se prépare... N`est-ce pas une course contre la montre ?
Hélas oui, ou tant mieux. L`incrustation des bandes armées est un défi quotidien. On ne peut pas croiser les bras pendant qu`au nord, des couples sont lapidés à mort, des hommes amputés, flagellés... Il est bon que la communauté internationale nous soutienne, parce que dans certains cas, la solution de force s`impose.
Mais il faut qu`elle soit minutieusement préparée. Ces groupes armés se sont aguerris sur divers théâtres d`opérations à des techniques de lutte auxquelles les armées régulières ne sont pas toujours entraînées, et singulièrement pas celles de la Cédéao. A ce titre, l`engagement très ferme de la France qui reprend sa coopération militaire avec nous est un très bon signe.

Vous redoutez les effets d`une intervention armée, pourquoi ?
Au nord, il n`y a pas que des gens appartenant aux mouvements armés. La population servira de bouclier humain. D`où la nécessaire minutie dans la préparation et l`habileté dans l`exécution d`une intervention. La logistique et l`intelligence militaires seront fondamentales pour savoir précisément ce qu`il y a en face avant dedire : "On y va, on y va !"

Les troupes de la Cédéao et l`armée malienne sont-elles "minutieuses et habiles" ?
L`armée malienne a été humiliée. Nous sommes conscients de nos faiblesses. Mais je gage qu`une fois requinquée, "réarmée" dans tous les sens du terme – matériellement et moralement – et entraînée, elle saura répondre. D`autant que ce dont on parle ne sera effectif que dans plusieurs mois. D`ici là, l`armée malienne aura largement le temps de se reconstruire.

Que pensez-vous du souhait américain d`organiser des élections au premier semestre 2013 ?
Je ne suis pas d`accord . On ne peut pas se passer des Maliens du Nord. Il y a sûrement un moyen terme àtrouver. Si on libère les villes du nord et qu`on peut organiser des centres de vote dans les camps de réfugiés et de déplacés, alors pourquoi pas. Seules des élections procurent la légitimité pour fonder une autorité. Comment y parvenir le plus vite possible ? C`est ce qu`il faut déterminer. Car en parallèle à toute intervention, on doit s`atteler à l`organisation concrète des élections, notamment réviser les listes électorales.

Propos recueillis (à Paris) par Christophe Chatelot

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