OUAGADOUGOU - Deux anciens chefs d'Etat du Burkina Faso
ont dressé mardi à Ouagadougou un sombre tableau du pays présidé depuis 25 ans
par Blaise Compaoré, dénonçant les insuffisances en matière de démocratie, la
corruption et l'incivisme.
"Les préoccupations sur des sujets comme la démocratie, la corruption, les
détournements de deniers publics ou l'incivisme" sont "très récurrentes", a
déclaré Jean-Baptiste Ouédraogo, qui fut président de novembre 1982 à août
1983, avant d'être renversé par le capitaine Thomas Sankara (1983-1987).
Dans un message lu devant M. Compaoré et son gouvernement à l'occasion d'un
forum des corps constitués, M. Ouédraogo a invité l'actuel chef de l'Etat à
"enclencher des réflexions, la communication et la sensibilisation de
l'ensemble des citoyens sur ces fléaux".
"Véritable cancer se développant aux dépens de nos valeurs, de notre
culture et de nos moeurs, l'incivisme est le stade ultime de la perte de nos
repères", a-t-il lancé dans ce message lu en son nom et au nom de son
prédécesseur, le colonel Saye Zerbo (1980-1982). Les deux hommes sont les
seuls ex-présidents burkinabè encore vivants.
"La démission des chefs investis de pouvoir mais qui refusent de les
assumer, ou qui les exercent avec faiblesse et manquent d'autorité, tant au
niveau professionnel qu'administratif, creuse l'incivisme. Le refus de
sanctionner les fautes prépare le lit de l'incivisme et crée l'impunité", a
alerté M. Ouédraogo.
Pays sahélien pauvre d'Afrique de l'Ouest, le Burkina Faso, ex-colonie
française indépendante depuis 1960, a connu de multiples coups d'Etat. Blaise
Compaoré avait participé au putsch qui a renversé le régime de Jean-Baptiste
Ouédraogo et installé Sankara, "père de la révolution" lui-même renversé et
tué lors d'un coup d'Etat qui a porté l'actuel président au pouvoir en 1987.
Le régime Compaoré a connu une crise sans précédent au premier semestre
2011, avec une vague de mutineries et de manifestations populaires qui ont
failli l'emporter.