La France et ses alliés européens se préparent à
soutenir une intervention armée africaine dans le nord du Mali, que
l'accélération du calendrier diplomatique rend de plus en plus crédible. Sans
"troupes au sol", mais avec d'importants moyens techniques et de renseignement
déployés au Sahel.
Dimanche, les chefs d'Etat ouest-africains doivent se réunir à Abuja
(Nigeria) pour approuver les modalités d'une intervention au Mali.
Jeudi, ce sont les ministres de la Défense et des Affaires étrangères de
cinq pays européens (France, Allemagne, Pologne, Espagne, Italie) qui
discuteront à Paris d'une mission européenne d'entraînement des forces
africaines, qui pourrait mobiliser 200 militaires, encadrés par des "éléments
de protection".
Après la parenthèse électorale américaine, le processus devrait repartir de
plus belle. Washington, qui a longtemps traîné les pieds, a affiché ces
dernières semaines sa détermination à en finir avec les islamistes qui
occupent le nord Mali, et le soutien américain à une opération africaine
semble acquis.
Selon les spécialistes de défense, la France, qui se veut leader dans cette
affaire, aide depuis plusieurs mois les pays de l'Afrique de l'ouest (Cedeao)
à planifier une opération qui devra ensuite être soumise à l'ONU.
Officiellement, les soldats français et des autres pays européens ne
participeront pas aux combats. "Il n'y aura pas de troupes au sol", mais "un
soutien logistique", répète le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Si Paris s'affirme résolu à avancer, côté militaire c'est la plus grande
discrétion. Mais la préparation de l'opération a débuté il y a plusieurs mois.
Des hommes des Forces spéciales (FS) françaises sont présents dans la zone
sahélienne depuis plus de deux ans et les premières prises d'otages français.
En janvier 2011, ils avaient été en mesure d'intervenir en quelques heures
pour tenter de libérer deux jeunes Français enlevés au Niger. Une
course-poursuite avec les ravisseurs qui s'était soldée par la mort des deux
otages.
L'opération des Forces spéciales françaises au Sahel a été baptisée du nom
de code "Sabre", indique-t-on dans les milieux militaires.
L'appellation énigmatique Forces spéciales désigne des unités
particulièrement entraînées et surtout équipées de l'armement et des moyens de
renseignement les plus pointus. Compte tenu des effectifs limités qui sont
envisagés - 200 formateurs et leur protection -, les FS des pays concernés
devraient fournir l'essentiel de la mission européenne d'entraînement des
forces africaines, qui compteraient pour leur part autour de 3.000 hommes.
L'efficacité des Forces spéciales étant basée sur la discrétion et leurs
capacités à se "prépositionner", les éléments semblent en place pour préparer
une éventuelle opération africaine.
Le succès du dispositif passe par une parfaite connaissance de
l'adversaire, les 5.000 à 6.000 djihadistes répartis dans le nord Mali, et de
ses déplacements.
La France dispose de deux drones Harfang - des appareils de surveillance
sans pilote non armés - rapatriés récemment d'Afghanistan. Interrogée à ce
sujet, la défense a toutefois assuré fin octobre qu'il n'y avait "pas de
drones dans la zone sahélienne".
C'est dans ce domaine que le soutien américain s'avèrerait essentiel. Les
Etats-Unis disposent en effet de moyens de surveillance satellitaires de la
zone. Et, selon la presse américaine, les autorités américaines
réfléchissaient le mois dernier à de possibles bombardements de drones dans le
nord du Mali contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).