A la télévision nationale samedi soir, Amadou Haya Sanogo a été très positif à l’égard de Djibril Bassolé et Adama Bictogo. Le Capitaine a en effet loué les efforts des deux émissaires de la Cedeao qui en sont à leur quatrième visite bamakoise depuis avril. Vendredi pourtant, les ministres burkinabe et ivoirien ont failli jeter l’éponge. Il aura fallu l’entregent du Premier ministre et du médiateur de la République pour les convaincre de rester et d’épuiser le round de négociations entamées avec le Cnrdre concernant la durée et le président de la transition. Un sujet tranché, selon le médiateur, par la constitution malienne et les chefs d’Etat de la Cedeao. Ces derniers réunis à Abidjan avaient, il y a deux semaines, décidé que Dioncounda Traoré dirigera la transition malienne dont ils ont fixé la durée à douze mois. Mais pour Amadou Haya Sanogo, pas question d’avaler une telle couleuvre. La bible de la transition, c’est l’accord-cadre, fait entendre l’ex junte depuis Kati. Un accord sur lequel les présidents de la sous-région, amenés par un trio très remonté : Jonathan Goodluck, Alassane Ouattara et Yayi Boni. Le Nigérian, il est vrai, s’est montré jusque là très ferme sur le respect des normes démocratiques au risque de désobliger Mamadou Tandja et Laurent Gbagbo.
La bible c’est l’accord-cadre
Mais il a des problèmes domestiques avec la secte Boko Haram soupçonnée de complicité avec Aqmi dans son sanctuaire nord-malien et il est impatient d’attaquer le mal à la racine. L’Ivoirien venu au pouvoir après un long bras de fer et une guerre civile qui n’a pas recyclé toutes ses armes et tous ses soldats ne veut pas être déstabilisé par la jurisprudence de Kati et il a promis d’être un défenseur de la gouvernance démocratique. Le Béninois, lui, est le président de l’Union africaine qui affiche normalement la tolérance zéro pour les coups d’Etat et comme beaucoup de leaders de la sous-région et du monde, il est inquiet de la menace contre la sécurité globale qu’est devenu le Nord-Mali aux mains des jihadistes. Des raisons suffisantes, selon les chefs de la Cedeao pour se porter au chevet du Mali signataire des protocoles sous-régionaux et continentaux pour la promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance. Pour Abidjan, la solution constitutionnelle la moins problématique, c’est Dioncounda Traoré à la tête de l’Etat jusqu’à la présidentielle. Intérim ou transition ? Un simple jeu de mots pour les chefs d’Etat.
Niet tovaritch ?
Avis différents à Kati et dans plusieurs cercles à Bamako, y compris chez des politiques et des juristes. « Ce qui a permis les progrès jusque-là, c’est l’accord-cadre et on ne voit pas pourquoi il faut le mettre de côte maintenant » insistent les adversaires de la décision d’Abidjan. Bassolé et Bictogo ont eu toutes les variantes possibles de cette position à Bamako où ils ont rencontré plusieurs fois l’ex junte, le Premier ministre, le médiateur de la République, le président intérimaire, les chancelleries, la société civile. Samedi, ils constatent leur impuissance et quittent Bamako pour rendre compte à Blaise Compaoré. La durée de la transition n’est pas un problème. Mais la carte Dioncounda Traoré au-delà du 22 mai, reste un énorme sujet de désaccord. Le mathématicien qui le sait a déjà fait savoir qu’il ne sera pas un problème pour le Mali. Autrement dit, si son départ est la solution pour une transition malienne apaisée, il s’en ira. Si la junte dit la même chose, le problème sera-t-il réglé ? Pour un fin observateur, loin de là. La prorogation du mandat des députés, entre autres, nécessite un code de fonctionnement pendant la durée de la transition. Sinon, on entrerait, pour lui, dans le cycle des motions de censure. Seule solution globale à son avis : Conférence nationale, convention nationale, assises de la deuxième transition, peu importe l’appellation, il va falloir que « les Maliens s’asseyent et discutent comme des grands ».