L’ex-parti majoritaire du Mali a tenu une conférence nationale alors que c’est un congrès que ses militants et cadres réclament depuis leur déconfiture lors des dernières élections générales. L’Adéma a-t-elle encore les moyens de mobiliser ses militants pour autre chose qu’une banale conférence ?
Le 28 mars, à la Maison des Aînés, les délégués de 51 sections, les représentants des mouvements des jeunes et des femmes, les députés et conseillers nationaux se sont réunis à Bamako pour les travaux de la 13ème conférence nationale de l’Adéma, sous la présidence de Pr. Tiémoko Sangaré, président par intérim du parti.
À ses côtés, deux des hommes qui se livrent à une guerre de succession à Dioncounda Traoré à la tête du parti, Moustapha Dicko, un cacique de l’Adéma, et Dramane Dembélé, le décevant candidat du parti à la dernière présidentielle. Etaient également présents des membres du comité exécutif, qui se croient faiseurs de roi : Abdel Karim Konaté dit Empé, qui hésiterait à rejoindre le RPM, Pr. Ali Nouhoum Diallo, Assarid Ag Imbarcaouane et Adama Samassekou, les vieux de la vieille qui espèrent encore sauver l’Adéma du naufrage, Mme Conté Fatoumata Doumbia, maire de la Commune I. Tous étaient attendus par le peuple Adéma pour l’organisation du cinquième congrès ordinaire de leur parti.
À sa place, cette conférence nationale était chargée, officiellement, d’examiner et d’adopter le rapport d’activités du comité exécutif (CE) et les rapports des commissions des différentes commissions spéciales. Mais, officieusement, il s’agit pour les cadres de l’Adéma, ou plutôt de ce qui en reste, de tenter de régler les différentes crises qui secouent le parti depuis 2012, quand il s’était agi de désigner un candidat à la présidentielle avortée de cette année.
L’Adéma a alors connu des clivages nés d’intérêts personnels et individuels, chaque cadre roulant pour son protégé. En 2013, pour le même scrutin, le candidat investi par le parti au terme d’une convention, Dramane Dembélé, a été l’objet d’une véritable trahison de la part de certains cadres qui ont battu campagne pour certains de ses adversaires, Soumaïla Cissé de l’URD et Ibrahim Boubacar Kéita du RPM, ce qui a fortement contribué à fragiliser la position du candidat du parti.
Et à fragiliser également le parti. Situation aggravée à l’entre-deux tours quand Dramane Dembélé, comprenant qu’il a été floué par certains de ses camarades, a rallié le camp du candidat IBK contrairement au mot d’ordre de son CE qui s’est rangé aux côtés de Soumaïla Cissé. Le parti s’est tellement divisé qu’il s’est écroulé lors des élections législatives.
Un grand parti de gauche au Mali
La conférence nationale était donc l’occasion pour ses cadres de recoller les morceaux de l’Adéma en mettant à nu les différends et en tentant de sauver ce qui peut l’être. Et en tentant également de ramener le parti à la place qui était la sienne avant 2012 : celle de plus grande formation politique au Mali.
Pour cela, il faut rester aux côtés du nouveau parti majoritaire, le RPM, dans la majorité présidentielle, la CMP, pour préparer les élections communales et régionales à venir. Élections de proximité, elles pourraient permettre à l’Adéma de se repositionner sur l’échiquier politique national. En attendant que le gouvernement fixe une date pour ces scrutins, les Abeilles doivent également préparer le congrès de la réconciliation prévu pour fin mai prochain.
Une fois ces nouveaux arrangements trouvés pour sauver le parti et en faire «un grand parti de gauche», les cadres ont rendu publiques les résolutions et motions adoptées officiellement. Il s’agit de préparer sans délai les élections communales et régionales de 2015 ; poursuivre sans réserve le soutien du parti au président Ibrahim Boubacar Keïta ; réaffirmer leur appartenance à la majorité présidentielle.
Aussi, félicitent-ils le gouvernement pour le paraphe de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger, et invitent-ils les militants Adéma à apporter leur soutien au processus de paix et à contribuer à la vulgarisation du document.
Quant à la Coordination des mouvements de l’Azawad, l’Adéma lui demande de parapher, elle aussi, le projet d’accord dans l’intérêt supérieur des populations. Elle félicite la communauté internationale pour sa mobilisation générale autour du Mali ; exprime son inquiétude face à la situation alimentaire au Nord, et invite le gouvernement à prendre les mesures idoines pour y faire face.
Une motion de remerciement a été adressée au Pr. Dioncounda Traoré, président par intérim de la République, pour avoir conduit la transition à terme et avec succès, et une motion de soutien à IBK pour ses efforts dans le cadre de la stabilisation de notre pays.
Des absents de marque
Malgré toutes ces belles résolutions, les observateurs restent sceptiques quant aux capacités et surtout aux dispositions des Abeilles à recoller les morceaux de la Ruche. Ce sentiment est d’autant plus fort que le consensus n’a pas encore été trouvé chez les différentes personnalités qui, chacune, tiennent encore à prendre les rênes du parti pour bien se positionner en 2018 pour la succession à IBK.
Et beaucoup de ceux qui, grâce à leur âge, leur longévité, leur fidélité au parti, auraient pu œuvrer pour un consensus, n’ont pas pris part aux travaux de cette conférence nationale. Il s’agit notamment de : Pr. Dioncounda Traoré, Ousmane Sy, et son épouse Kadiatou Sow, Marimantia Diarra. Et bien d’autres.
En revanche, une dizaine de partis supposés amis ont assisté à la cérémonie d’ouverture de cette conférence nationale. L’opposition était fortement représentée par les Fare et l’URD, tandis que la Codem, le MPR, le Cnid et le RPM représentaient la majorité présidentielle.
Abdel Hamy