Il y a une quelques jours, les responsables d’une dizaine de petits partis politiques ont rencontré le ministre de l’administration territoriale et de l’administration pour l’informer de leur décision de créer le Centre malien et de leur désir de se voir doter d’un statut particulier au même titre que l’opposition dont l’URD a donné unilatéralement la chefferie à Soumaïla Cissé. Centre de quoi ?
Cette question a tout son intérêt dans un pays qui n’a ni gauche ni droite, ni extrême gauche ni extrême droite. Au fil des scrutins présidentiels et législatifs, en effet, il est loisible de constater, à l’examen des projets de sociétés des nombreux candidats, qu’il n’y a aucune différence entre ce qu’ils proposent au peuple. Et pourtant, à les entendre, les uns se réclament de l’internationale socialiste tandis que les autres affirment appartenir à l’internationale libérale. A se demander s’ils savent ce que veulent dire socialisme, communisme, social-démocratie, libéralisme, ultralibéralisme, nationalisme, etc., même marinés à la sauce tropicale. Certains de ces politiques affichent même leur écologisme.
Marxiste-léniniste, maoïste ou bolchévique
De fait, il y a juste une majorité et une opposition. La majorité dans l’ère nouvelle est apparue au Mali avec la prise du pouvoir par l’Adema, grâce à un officier militaire qui ne savait pas ce qu’il faisait à l’époque. Si Adema veut dire Alliance démocratique du Mali, les responsables et animateurs de ce parti n’avaient rien de démocratique. Imbus d’une idéologie marxiste-léniniste, maoïste ou bolchévique, ils se sont évertués, pendant dix ans, à tuer le processus démocratique et à étouffer les autres partis politiques dont certains les avaient pourtant aidés à mettre le général Moussa Traoré en quarantaine. Mais ils n’étaient pas tous que de gauche. Au fil de leur décennie de gloire mais aussi de honte, certains d’entre eux ont mis bas le masque et montrer leur visage de Janus. Ils seront contraints de quitter leur famille circonstancielle. Mamadou Lamine Traoré pour un parti communiste, Issa N’Diaye pour un parti travailliste, Ibrahim Boubacar Kéita pour un parti indéfini parce que son maitre et fondateur est d’obédience bourgeoise alors que ses cadres se réclament du socialisme, Soumaïla Cissé pour un parti qui se veut libéral.
Vers la fin de l’ère Alpha Oumar Konaré, des regroupements politiques ont vu le jour. Le plus emblématique est sans aucun doute le Collectif des partis de l’opposition, assemblage hétéroclite de pseudos socialistes, libéraux, écologiste, néolibéraux, etc. qui ne répondait à aucune logique politique sinon la volonté de quelques leaders politiques de s’opposer à l’hégémonisme de l’Adema et à la volonté de certains de ses responsables de livrer le pays à un militaire chargé de couvrir leurs arrières.
Pseudos socialistes, libéraux, écologiste, néolibéraux
Après la décennie Adema, sous la présidence d’ATT, d’autres regroupements verront aussi le jour. Eux non plus ne se regroupaient pas autour d’une idéologie politique, philosophique ou même morale, ces gens en sont dépourvus, mais pour des intérêts personnels et individuels. Le peuple le comprendra véritablement après le coup d’Etat contre ATT, quand la classe politique et la société civile se sont déchirées en pro-putschistes et anti-coup d’Etat. Chez les uns, FDR, et les autres, Copam, ont retrouvaient « socialistes, libéraux, écologistes », etc. » Encore une fois, le mariage s’est fait sans autre affinité que les intérêts personnels et individuels. Même scénario après l’élection de GPP. Dans la majorité présidentielle il y a n’importe quoi et demi. Dans l’opposition, le parti socialiste s’acoquine avec des indéterminés et les libéraux de l’URD et des Fare. C’est le président de ce dernier parti, l’ancien Premier ministre qui a eu le mot le plus diplomatique. Par euphémisme Modibo Sidibé a dit que l’opposition est plurielle tout comme la majorité. Une pluralité particulièrement intéressée.
C’est dans ce contexte où l’hypocrisie le dispute à la duplicité que le Centre malien veut sa part de statut. Au fait, qui sont-ils ? A l’occasion de la crise de 2012, comme tous les autres regroupements, ils n’ont pas pris le parti d’ATT. D’ailleurs, ils n’ont regardé ni le FDR ni la Copam, se contentant d’avoir les yeux rivés à leur nombril. Et si, quand la situation s’est décantée, certains, les plus nombreux, ont rejoint la majorité présidentielle, aucun de ces nombrilistes n’a eu le courage de se montrer dans l’opposition. Et puisque la majorité ne veut pas d’eux, ils demandent aujourd’hui un statut plus confortable que celui donné à Soumaïla Cissé. Pour cela, ils « adhèrent » au projet d’accord de paix paraphé par le gouvernement, se « mettent à la disposition de la majorité» et ferment les yeux sur la gouvernance de GPP.
Centre de rien
Ils pourraient peut-être s’entendre avec le chef de l’Etat. Voilà quelqu’un qui, lui non plus, n’a pris le parti de personne sans être contre quelqu’un. Au lendemain du putsch de mars 2012, alors qu’il avait été approché par la junte militaire et pendant que ses adeptes battaient le pavé aux côtés des pro-putschistes, GPP depuis l’étranger condamnait les militaires en murmurant. Pendant toute la transition, il a louvoyé entre pro et anti putsch au point de faire oublier son rôle au sommet de l’Etat depuis 1992. Un cas d’école qui est en train d’inspirer les centristes de rien.
Cheick TANDINA
Source: Le Prétoire