Les acteurs du secteur informel ainsi que les services publics concernés se sont retrouvés pour deux journées d’échanges fructueux les mercredi 1er et jeudi 2 avril 2015 au Centre International de Conférence de Bamako (CICB). Ces journées ont été initiées par le PACD, sous l’impulsion du Ministère du Commerce et de l’industrie. Il était question de formation et de sensibilisation sur l’apport de l’informel à l’assiette fiscale du pays.
Le Projet d’Appui aux Commerçants Détaillants (PACD) est une initiative des plus hautes autorités du Mali visant à apporter aux commerçants détaillants (services et produits), une solution appropriée et durable. Il s’agit aussi de contribuer à la réduction de la pauvreté, renforcer les capacités du secteur privé et surtout de lutter efficacement contre le développement de l’économie souterraine et l’occupation anarchique des voies publiques.
Selon le bilan sur l’emploi publié en 1996 par l’Observatoire de l’Emploi et de la formation, près de 2 millions de personnes sont activement occupées par des activités informelles, c’est-à-dire, qui échappent totalement au fisc. Ce qui représente 23% de la population active. Autrement dit, l’état perd des milliards chaque année sur les secteurs touchant le commerce, l’agriculture, l’élevage, la pêche, l’artisanat, la santé, la culture, les services etc.).
De 2005 à nos jours, le PACD a connu trois phases d’exécution et a enregistré des résultats divers liés aux conditions de sa mise en œuvre. Il faut dire que le cadre institutionnel étouffe quelque peu la gestion du projet. Rattaché au Ministère, il fonctionne sur la régie de la DFM plutôt que de la DNCC. D ’où le besoin d’une relecture de ses textes au regard de son impact socio économique. Le projet a mis en œuvre 18 Centres de Gestions Agréés dont 8 dans le District de Bamako, 1 dans chacun des chefs lieux des 8 régions du pays, 1 à Koulikoro et 1 à Niono.
Un Centre de Gestion Agréé (CGA) est administré par un Conseil d’Administration composé de 9 membres dont 8 commerçants détaillants et 1 membre de l’Ordre National des Experts Comptables et Comptables Agréés. L’agrément n’est obtenu que par décision du Ministère des Finances.
Pour adhérer aux CGA, il faut être assujetti à l’impôt synthétique (14.700 Fcfa), disposer d’un numéro d’identification fiscale, un emplacement fixe et légal, payer les frais d’adhésion et la cotisation des CGA. L’état a autorisé des contrats de bail en vue de loger le CGA. Au total, 7 contrats de bail ont été signés pour les CGA dont 2 bâtiments pour Bamako, 1 pour Kayes, 1 pour Mopti, 1 pour Tombouctou, 1 pour Gao et 1 pour Koutiala. De 2005 à maintenant, les 18 CGA ont enregistré plus de 10.000 adhérents.
La formation, le financement, la sensibilisation et la fourniture en équipements marchands sont à mettre au nombre des actions importantes du PACD. C’est ainsi que 10.987 commerçants détaillants ont été formés en comptabilité simplifiée, notamment dans les modules relatifs à la gestion des stocks, l’entreprise et la famille, la fiscalité, le remboursement des prêts et GERME. Les usagers de 120 marchés, soient près de 27.000 personnes ont été sensibilisées sur les modules de l’hygiène et la sécurité sanitaire des aliments. Plus de 3.250 commerçants détaillants ont été financés pour environ 1.787.500.000 FCFA. Le projet a distribué 19.000 sacs de paniers biodégradables aux femmes vendeuses et ménagères. Il a aussi installé 2.272 étals adaptés sur l’ensemble du territoire national.
L’engouement actuel des commerçants est donc à la hauteur des impacts positifs du projet qui a contribué à la réduction de la pauvreté. L’on peut citer entre autres, la mise en place d’un cadre de partenariat entre les banques et les commerçants, le renforcement du bien-être économique et social des commerçants détaillants bénéficiaires, le partenariat entre l’état et le secteur privé.
Les secteurs d’activités concernés par l’informel regroupent 171 corps de métiers et pour plus de 240 produits vendus au Mali. La plupart des acteurs sont regroupés par association. Par méconnaissance ou mauvaise foi, ils vendent des produits ou services sans respecter les conditions requises.
Avec seulement 20% (1/5) d’adhésion et de régularité des 2000.000 de personnes concernées aux CGA, l’Etat pourrait récupérer, au titre de la taxe unifiée (14.700 FCFA) en une année, la somme de 5.880.000.000 de FCFA.
Du fait qu’il n’y a pas de contact formel entre les centres des impôts, les mairies et les CGA, les recouvrements sont souvent réalisés par les mairies à hauteur de 50 à 100 Fcfa par jour. Ils concernent ceux qui vendent les produits divers dans les quartiers, les rues, devant les écoles et les abords des artères.
Les débats ont été intenses après les présentations des faitières (associations, syndicats) et des structures publiques en charge du secteur (Direction Nationale du Commerce et de la Concurrence , Direction Générale des Impôts ...). A l’endroit des décideurs, les commerçants détaillants ont focalisé leurs préoccupations sur la valorisation des commerçants exemplaires, la baisse des taxes de 3% sur les chiffres d’affaire, la dotation en infrastructures adéquates et suffisantes ou encore, plus de communication et surtout de concertation avant toute décision les concernant. En plus d’encourager les commerçants ayant déjà souscrit à l’impôt synthétique, il est attendu des participants à ces journées d’échanges, qu’ils puissent inciter les acteurs de l’informel à rejoindre le formel le mieux et le plus tôt possible. En somme, «Cultiver le civisme fiscal».
H. COULIBALY