Dans le bras de fer qui l’oppose à la population de Djidjan-Loulo, la société minière(SOMILO) appartenant au géant Randgold Ressources vient de réagir de manière robuste en jetant deux personnes en prison.
La société minière de Loulo(SOMILO) appartenant au géant Randgold Ressources serait-elle une propriété de l’Etat malien ? Cette question mérite d’être posée. Car dans une affaire judiciaire qui oppose les populations de Djidjan, localité où officie la SOMILO, le juge de paix de Kénieba a jugé bon de placer 2 personnes sous mandats de dépôt. Il (le juge) leur reproche les faits suivants : incitation à la haine contre la SOMILO et l’Etat, acte de sabotage sur les installations de la mine et tenue de réunions secrètes contre la mine. L’accusation haine contre la SOMILO et l’Etat fait sourire plus d’un dans cette localité, où, on croit à une intimidation pour faire taire les habitants qui luttent depuis plusieurs mois pour un des droits les plus élémentaires, c’est-à-dire, vivre dans un environnement sain.
Pour comprendre cette histoire, il est nécessaire de rappeler les faits qui ont conduits à l’interpellation de Modibo Diallo et de Karim Diarra. Dans le cadre du traitement des minerais, certains produits très mortels comme le cyanure et le plomb sont utilisés dans le traitement du minerai. A la fin de la chaîne de traitement, ces produits passent par un tuyau vers un déversoir final. A Djidjan-Loulo, les tuyaux par lesquels passent les produits toxiques traversent le village à travers un canal. Face au manque de système d’adduction d’eau potable, les habitants et les animaux n’ont, pour leurs besoins, recours qu’à l’eau de la seule rivière qui traverse le village. Les enfants risquent leur vie tous les jours en jouant dans le canal qui loge les tuyaux. En vu de prévenir toute extermination du village en cas de perforation des tuyaux, les populations de Djidjan-Loulo, à plusieurs occasions avaient tiré la sonnette d’alarme en sollicitant le retrait des tuyaux. N’ayant pas eu d’échos favorables, les populations ont décidé de faire du boucan pour se faire entendre. Visiblement gênée par toutes les vérités exposées par ci et par là, la SOMILO n’a eu d’autres choix que de procéder à l’intimidation.
En effet, après que les tuyaux se soient enflammés en plein jour, la SOMILO a profité de l’occasion pour trouver des coupables taillés sur mesure. Après avoir porté plainte contre X, la gendarmerie procède quelques jours après, à l’interpellation des nommés Modibo Diallo et Karim Diarra. Les interpellés sont connus pour avoir été toujours en première ligne dans la lutte pacifique contre les tuyaux de cyanure. Pourquoi n’avoir pas interpellé toutes les personnes qui ont participé aux différents meetings ? Preuve que les arrestations étaient ciblées.
Revenant aux chefs d’accusation, la question est de savoir si la SOMILO est une propriété de l’Etat pour que les personnes arrêtées soient accusées d’incitation à la haine contre l’Etat. En quoi est ce que réclamer le retrait des tuyaux peut constituer une haine contre l’Etat ? En tout cas, la justice ne doit pas se laisser induire en erreur par la direction de la SOMILO. Les vrais ennemis de l’Etat ne sont pas à Djidjan. Ceux qui profanent le drapeau malien à Kidal sont les ennemis du Mali. Modibo Diallo et Karim Diarra ne sont pas les ennemis du Mali. Les ennemis de la nation sont les Iyad Ag Ghaly, Wadossène et autres. A Djidjan, on admire avec humour le montage très efficace. Cependant, les populations se disent confiantes, car convaincues que tout au long de l’histoire, la voie de la vérité à toujours triomphée. Vive la justice.
Drissa Tiéné