Il est clair que la crise au Nord du Mali demeure une profonde source d’inquiétude pour les pays voisins, singulièrement l’Algérie dont les autorités politiques n’en finissent pas de diffuser des déclarations de plus en plus vagues et obscures sur leur position réelle vis-à-vis des deux options qui sont sur la table : guerre ou négociation. Et ce ne sont pas les articles de certains confrères algériens fustigeant coup sur coup et de manière radicale la décision prise par la cedeao d’intervenir militairement qui pousseront à dire le contraire.
Il fallait qu’un autre pays y ajoute son grain de sel, et depuis bientôt quelques jours, c’est chose faite : La Libye. Ce pays qui vient de s’arracher des crocs de celui qu’on appelait le roi des rois d’Afrique et que l’Occident, à tort ou à raison, a estampillé dictateur, allant jusqu’à le renverser. Et tout le monde sait à quelle tragédie cela a abouti : Kadhafi traqué comme un caïd de banlieue a payé de sa vie sa résistance à une « révolution » orchestrée par qui on sait, portée par le Conseil National de Transition (CNT), autre création de l’Occident.
Mais oublions cette tragédie, et parlons de ce qui occupe l’attention depuis un certain moment dans la presse locale. « Nous avons condamné le coup d’Etat, nous avons refusé la division du Mali et nous avons soutenu tous les efforts africains dont ceux déployés par la communauté économique des états de l’Afrique de l’ouest (cedeao) pour une solution pacifique et nous pensons en Libye qu’on ne doit pas privilégier les solutions militaires en ce moment, car nous craignons l’avènement d’un autre afghanisation. » Cette phrase est de Mahfouth Rahim, le monsieur Afrique du ministère libyen des Affaires étrangères. Extraite d’une interview accordée à la PANA, elle est la vérification de la défiance que la Libye éprouve pour une intervention militaire au Nord-Mali. Et ce n’est pas surprenant. Ces propos ne sont pas isolés, mais bien s’inscrivent dans une longue liste de déclarations visant à entretenir l’illusion d’après laquelle les voies de la négociation sont celles que le Mali et ses partenaires doivent emprunter pour parvenir à une paix civile dans les régions occupées.
Le problème, c’est qu’à chaque fois qu’un diplomate est amené à émettre son avis sur la crise malienne, il se met à dire ce qui semble le plus favorable à son pays à lui, à savoir le recours systématique à cette espèce de catastrophisme qui est qu’une intervention militaire occasionnera de graves conséquences. Et personne n’est sans constater que la recette semble bien fonctionner, puisque déjà même les partenaires du Mali n’ont cesse de faire savoir qu’il faut négocier avec les deux groupes : Ansardine, MNLA. Aussi, on le sait, c’est surtout lorsque Ansardine a découvert que le MNLA, par la négociation, commence à avoir un beau rôle qu’il s’est dit ouvert au dialogue.
Mais revenons aux propos du diplomate libyen. Il craint, je l’ai dit, une « afghanisation » du sahel comme la plupart des analystes, si une intervention militaire venait à être effective. Pour faire court, il convient de dire que Mahfouth Rahim, comme nombre de diplomates, avance ainsi une énormité qui consiste à recourir systématiquement à cette analogie géographique qui, à dire vrai, est devenue un instrument de propagande dont ne cesse d’user la meute de commentateurs de l’actualité. Et de plus, l’argument auquel restent sourd tous ces diplomates appointés, c’est que les négociations mises en tête, même avec MNLA et Ansardine, conduiront à excuser des individus indésirables, pour ne pas dire des flibustiers, qui ont passé le clair de leur temps à s’engraisser des rebellions qui ont aujourd’hui plongé le pays dans le noir. Où est l’objectivité dans toutes ces déclarations appelant le Mali à dialoguer ? Parlant de la Libye, le CNT a –t-il penser à l’après Kadhafi dans le Sahel lorsque l’Occident le manipulait ?