Les pourparlers engagés pour ramener la paix entre gouvernement malien, touaregs irrédentistes d’une part, et touaregs islamistes d’autre part, s’apparentent au supplice de Tantale : les fruits d’un dialogue constructif à portée de main, toujours renvoyés aux calendes grecques. Les propos lénifiants du Premier ministre ne sortent pas des sentiers battus, auxquels nous ont habitués le président déchu, Amadou Toumani Touré : ils sont nos frères, méfions-nous de faire l’amalgame.
En dépit des paroles empreintes de diplomatie, serinées par le P.M. Cheick Modibo Diarra, à son retour de Ouagadougou, après un tête -à -tête avec le médiateur de la CEDEAO, Blaise Compaoré, le 19 novembre dernier, nous restons sceptiques quant à l’opportunité d’un dialogue de dernière chance avec ces touaregs. A l’appui de notre thèse, un proverbe bamanan qui y sied, est très édifiant : « asséner une piqûre de son dard, à un innocent, est l’apanage de la fourmi. »
Ses soi-disant frères sont de véritables terroristes indécrottables, passés maitres dans l’art de brouiller les cartes. Dans le message livré à la nation malienne, Cheick Modibo demande aux Maliens de resserrer leurs liens : « autant le monde entier montre un front uni pour nous soutenir, autant le Mali doit montrer un front uni pour accueillir nos alliés et travailler avec eux. » dixit le natif de Ségou. Il a précisé que l’armée appuyée par la MICEMA, en découdra avec les fous de Dieu, d’AQMI et du MUJAO. Par ailleurs, il a fait allusion aux raisons susceptibles d’être à l’origine de la rébellion, éventuellement un problème de développement.
Plus loin, il a parlé d’une discussion inclusive, pour les prises de décisions, concernant toutes les communautés y résidant. Tout ce qu’il a expliqué n’est que de vieilles lunes. Ces diagnostics ont été posés depuis belle lurette et des recettes étaient en train d’y être administrées, n’eût été l’existence d’un sanctuaire des terroristes, annihilant tous les efforts entrepris jusque-là. Partout au Mali, les problèmes de développement demeurent. Ils ne sont pas inhérents au seul septentrion.
A notre sens, les autorités de la transition doivent se démarquer de l’approche ATT. Celui-ci demandait aux Maliens de ne pas faire l’amalgame entre ceux qui ont pris les armes pour se faire entendre et les autres touaregs. Certes, l’amalgame en soi est pernicieux, mais pour autant, ceux qui ont eu à porter atteinte à l’intégrité physique de leurs compatriotes au Nord sous l’ex- président n’ont jamais eu à craindre les foudres de la justice. Au contraire, ils ont bénéficié des largesses du pouvoir.
Eh bien, nous rappelons au Premier ministre qu’il faut battre le fer quand il est chaud. Pour l’heure, le gouvernement de transition a de bons atouts : il bénéficie du soutien indéfectible de la communauté internationale. Du coup, il doit en tirer parti. Qu’on arrête de nous rebattre les oreilles par la même rengaine : les rebelles du MNLA, les islamistes D’ANÇAR EDINE sont nos frères.
Quels frères ! « Les frères », ayant servi pendant plus de 20 ans dans l’armée du colonel Khaddafi, ayant fait les campagnes d’Afghanistan, du Liban du Soudan etc. Ils ont pillé les arsenaux militaires libyens, finalement débarqués au Mali, où on leur a déroulé le tapis rouge, se sont mis à canarder à outrance d’autres Maliens, en connivence avec les groupes terroristes à l’instar d’AQMI et du MUJAO. La persécution de la population en zone occupée continue de plus belle. Pour notre part, des « frères » bellicistes jusqu’à la moelle des os, tuant d’autres frères comme des mouches, cessent de bénéficier de l’immunité fraternelle, dont aime à nous encenser, au nom d’une tradition en déclin. Au regard de l’éthique sociale, ces « frères » méritent d’être pendus haut et court.
A écouter l’écrivain roumain RyzardKapuscinski, qui a longtemps bourlingué à travers l’Afrique, dans son ouvrage, essai consacré au continent noir, dont l’intitulé est Ebène, les aventures africaines, il y précise que nous sommes en train de gérer les conséquences du mauvais découpage géographique de nos Etats par les colonisateurs d’antan. Celui-là a été mal fait, à dessein, pour que les conflits surgissent après leur départ définitif du continent africain. Le travail a été exécuté de telle sorte que, le Nord soit opposé au Sud. Effectivement, on sait que tout oppose ces deux pôles : la culture et la géographie. Au lieu de procéder au découpage géographique des Etats, horizontalement, ils ont plutôt fait ce travail verticalement. D’où les diverses rébellions dont l’Afrique est le théâtre, opposant le septentrion à la zone méridionale. Ce qui est indéniable, c’est que les marchands d’armes y trouvent leur compte. Nous sommes fondés à croire que l’écrivain roumain a raison : en Afrique, dans la plupart des cas nous avons été témoins de rébellions opposant le Nord au Sud. A titre d’exemples: le Mali, le Niger, le Soudan, le Tchad, le Cameroun, l’Ethiopie, le Sénégal etc.
A notre humble avis, le temps de l’usage de la carotte à l’égard des soit-disant « frères » est révolu, pour ce qui est de la résolution de l’équation du Nord Mali.