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Faits divers : Karim ne prend pas le temps de respirer
Publié le lundi 4 mai 2015  |  L’Essor




Le braqueur ne s’est pas laissé décourager par un échec antérieur. Mais a laissé des traces compromettantes.
N’en déplaise aux apôtres de la réinsertion, certains malfrats paraissent absolument irrécupérables. Certainement parce qu’ils ont grandi dans un environnement de délinquance, qu’ils ne côtoient que d’autres marginaux comme eux et que leur mode de vie est fait d’expédients. Il leur est donc difficile de revenir à un comportement normal.
La preuve en est la rapidité avec laquelle les plus endurcis de ces malfaiteurs rechutent. A peine sortent-ils de prison qu’ils se mettent à la recherche d’un coup à exécuter et de complices pour les accompagner. Qu’importe pour eux s’ils se font prendre à nouveau. Qu’importe aussi le temps qu’ils vont passer derrière les barreaux. Ils récidiveront sans hésiter à la prochaine remise en liberté.
Le destin de ces malfrats aguerris semble tout tracé. Seule une très longue peine de prison peut éventuellement briser leur élan et les pousser vers une voie moins agitée. A moins que le Destin n’impose une fin tragique à l’une de leurs équipées. Telle est la voie que paraît emprunter Karim Coulibaly, le héros de notre fait du jour.
L’histoire de ce récidiviste notoire continue de s’écrire toujours. Il a en effet eu la chance de ne pas se faire attraper lors de sa dernière opération. Mais il ne courra pas longtemps, l’on en croit les policiers du 13è Arrondissement qui le traquent actuellement. L’arrestation de ce jeune homme ne serait plus qu’une question de jours, assurent les limiers qui pistent le fugitif.
Récit des faits. Le 27 avril dernier, les responsables de l’agence d’une des nombreuses banques de la capitale ont entamé la journée avec une nouvelle des plus désagréables concernant leur entreprise. Dans la nuit précédente, un bandit armé de fusil avait tenté de pénétrer de force à l’intérieur de l’établissement bancaire pour y soustraire ce qu’il pouvait comme fonds.
Le malfrat, qui sera identifié par la suite comme Karim Coulibaly, avait soigneusement préparé son coup. Il est important de préciser qu’à l’image d’autres établissement du même type, l’agence en question n’avait pas lésiné sur la sécurité. Outre les gardes « officiels », c’est-à-dire les porteurs d’uniforme, les responsables s’étaient également assuré les services d’agents d’une société de sécurité. Les uns et les autres se relayaient selon un planning bien huilé qui garantissait aux lieux une protection permanente.
SANS ANICROCHE
Karim avait, semble-t-il, pris le temps nécessaire pour voir comment fonctionnait cette garde alternée. Il s’était aperçu que les agents de sécurité privés montaient la nuit au moment où les porteurs d’uniforme achevaient leur tour. Tout logiquement, le bandit choisit pour opérer le moment où la neutralisation des surveillants lui poserait le moins de problèmes.
A la date indiquée plus haut, le jeune homme passa à l’action. La reconstitution approximative de son emploi du temps laisse supposer que le braqueur était arrivé dans la zone de la succursale en début de nuit. Il s’était mis en planque assez loin de la banque et avait attendu patiemment que les mouvements des populations des 1008 logements de Yirimadio ralentissent. Au moment venu, il mit son arme (un fusil) en bandoulière, démarra la moto Djakarta sur laquelle il était arrivé et se dirigea vers les lieux de son attaque.
Nos sources nous ont expliqué que Karim avait poussé assez loin ses manœuvres de repérage. Puisqu’il était même venu en plein jour observer les va et vient autour de l’agence. Certains clients ont en effet assuré avoir vu le futur braqueur rôder dans les parages. Le jeune homme ne se départit pas de sa prudence lors de la nuit programmée pour son opération.
Il s’arrêta une nouvelle fois, mais cette fois-ci non loin de l’agence. C’était pour éviter de tomber sur une mauvaise surprise et pour s’assurer que rien n’avait été changé dans le dispositif de surveillance. Quand il se fut assuré que seul un agent de sécurité montait la faction, il gara sa moto dans un coin obscur où il pourrait la récupérer facilement après avoir dévalisé l’agence.
Il prit avec lui son arme, s’approcha sans bruit du veilleur et pointa le fusil sur la tête de ce dernier. Il intima ensuite l’ordre à son prisonnier d’entrer à l’intérieur de la cour de l’établissement. Le projet de Karim était de se faire accompagner de cet otage plutôt que de le neutraliser. Son plan paraissait s’appliquer sans anicroche.
Sauf que contrairement à ce que croyait le voleur, l’agent de sécurité qu’il avait menacé avec son arme était loin d’être le seul à veiller sur l’établissement. Non loin du bâtiment, stationnaient quelques éléments de la garde nationale qui assuraient eux aussi la sécurité de l’agence, mais en prenant soin de demeurer dans s l’obscurité. Le malfrat lors de son repérage n’avait pas remarqué cette stratégie « professionnelle » utilisée par les éléments de la garde nationale.
Ces derniers surgirent en silence de leur position, mais malgré tout le soin qu’ils mirent pour préserver l’effet de surprise, le malfaiteur les vit venir. Profondément étonné, mais ne perdant pas son sang-froid, il appliqua le seul recours qui lui restait, faire confiance à la vitesse de ses jambes. Sa rapidité de réaction lui permit de distancer momentanément les surveillants venus l’intercepter. Ensuite la chance vint à son secours et il put se fondre dans l’obscurité d’une des rues adjacentes. Ses poursuivants ratissèrent ensuite en vain tout le voisinage.
En solitaire. Mais si le voleur avait pu s’échapper, il avait néanmoins laissé derrière quelques traces compromettantes. Tout d’abord, il n’aura pas eu le temps de reprendre sa moto qu’il avait garée non loin de l’agence. Ensuite, et comble du malheur pour lui, il avait perdu dans sa fuite aussi bien sa carte d’identité que les pièces de la moto.
Lorsque les responsables de l’établissement se sont rendus sur les lieux du braquage manqué tôt le matin, ils ont découvert les pièces que le malfrat avait perdues en s’échappant. Il y a désormais un sérieux espoir de mettre la main sur un homme dont le visage et l’identité sont connus. Les gardes ont remonté l’information à leur hiérarchie pour la suite à donner à cette affaire. A partir du moment où le vol a été commis en Commune VI dans un secteur qui relève du commissariat du 13è arrondissement au plan sécuritaire, les gardes ont passé le relais aux policiers du dit commissariat.
Le commissaire Sirima Ba Tangara a instruit à son chef de la brigade des recherches, l’inspecteur principal Moïse Baya de prendre l’affaire en main. Une surprise de taille attendait ce dernier. Lorsqu’il eut en mains les pièces du fugitif sous la main, l’officier se rappela qu’il avait déjà eu à faire avec le jeune homme. D’après l’inspecteur principal Moïse Baya, le malfrat avait « transité » dans les locaux du même commissariat, il y a juste quelques mois.
Karim avait déjà à cette époque été impliqué dans un braquage. « Ce jeune homme n’est pas à son premier coup. Il est connu dans nos archives pour avoir commis un délit similaire à celui d’aujourd’hui », s’est étonné le chef de la brigade des recherches qui souligne le délai très court qui sépare les deux opérations du braqueur.
Selon Baya, au cours de son premier passage devant lui, Karim avait été coincé pour une opération qu’il avait tenté en solitaire. Le policier dispose cependant d’indices sérieux qui prouvent qu’entretemps, le jeune homme a intégré une bande de voleurs qui écume les quartiers de la banlieue du district de Bamako.
Les enquêtes sont donc ouvertes pour en terminer au plus vite avec cette affaire. La brigade des recherches du 13è arrondissement qui dispose de nombreux indices facilitant ses investigations ne doute pas que l’arrestation de Karim n’est plus qu’une question de quelques jours.
Mais l’inspecteur principal Baya n’a pas caché son étonnement de voir Karim récidiver juste après sa libération de prison. Il a aussi fait part de son amertume de constater qu’un malfrat de cet acabit s’est retrouvé à l’air libre dans un délai aussi court après son passage devant les juges. « La justice, insiste-t-il, doit faire en sorte que des délinquants de ce type restent aussi longtemps que possible derrière les barreaux pour éviter qu’ils aient la tentation de récidiver juste après leur sortie de prison». Très juste raisonnement. Mais peut-il s’appliquer à Karim qui, de toute évidence, semble avoir franchi définitivement le Rubicon de la délinquance ?
MH.TRAORE
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