DAKAR, 12 mai (Xinhua) -- L'importance d'une bonne gouvernance foncière pour une sécurité alimentaire en Afrique a été soulignée, mardi à Dakar, par des experts lors d'un forum foncier mondial, dont la première journée est dédiée à l'Afrique.
Selon le vice-président du Fonds international pour le développement agricole, Michel Mordasini, les détenteurs d' exploitations agricoles en Afrique perdent souvent leurs terres au profit des grandes entreprises et la sécurisation foncière est un premier pas vers la lutte contre la pauvreté et la sécurité alimentaire.
"Il faut que les droits des pauvres soient protégés parce qu'il y a des conflits avec les puissantes entreprises et la sécurisation foncière permet d'insérer les populations dans la petite agriculture afin d'arriver à la sécurité alimentaire dans le continent", a-t-il expliqué.
"La terre est plus qu'économique, elle est aussi sociale et culturelle. Il est temps de mettre en oeuvre des réformes foncières et cela passe par une bonne gouvernance foncière qui doit aussi faire de l'accès des femmes à la terre une priorité", a- t-il ajouté.
De son côté, le président du Cadre national de concertation des ruraux au Sénégal, Samba Guèye, a estimé qu'"une bonne gouvernance foncière permet d'avoir un équilibre socio-économique et politique mais il est important de formuler des politiques et des réformes adaptées aux réalités".
"En Afrique, ces politiques doivent permettre de booster les exploitations familiales afin de réaliser un développement durable et d'assurer une sécurité alimentaire", a-t-il poursuivi.
Donnant l'exemple de son pays, le ministre d'Etat malgache en charge de l'Aménagement du territoire et de l'Equipement, Rivo Rakotovao, a pour sa part souligné qu'"il y a un problème avec les agro-business qui ont besoin de grands espaces agricoles alors que le Malgache est très attachée à la terre".
"Les intérêts sont divergents mais il faut maintenir les propriétés familiales et l'enjeu reste une conciliation des intérêts par la gouvernance foncière", a-t-il soutenu. Il a enfin suggéré que "la démarche soit inclusive et participative parce que dans un pays, comme Madagascar, 22% du produit intérieur brut sont générés par l'agriculture".
"La terre est un enjeu planétaire et de la bonne gouvernance foncière dépend le développement agricole mondial et la réalisation de la sécurité alimentaire", a soutenu le ministre sénégalais de l'Agriculture, Pape Abdoulaye Seck, qui a relevé qu' "en 1960 un habitant dans le monde disposait de 0,43 hectare de terre alors que, selon les prévisions, ce taux sera de 0,15 en 2015".
"La qualité des sols se détériore à cause entre autres du contenu des métaux lourds et de la salinisation alors que la régénération des sols est lente et couteuse", a-t-il fait remarquer.
"L'agriculture africaine va se développer grâce à son hétérogénéité aussi bien dans la production que dans la transformation. Donc les exploitations familiales ont leurs raisons d'exister dans nos systèmes agricoles", a-t-il conclu.
"Il faut une informatisation et une numérisation des infrastructures cadastrales parce que l'infrastructure reste basique dans la gouvernance foncière. Mais cela demande d'énormes moyens financiers", a souligné la ministre camerounaise des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières, Jacqueline Koung,
"Il y a entre autres une braderie des terres par les populations elles-mêmes, un accaparement des terres et une spéculation foncière, etc", a-t-elle ajouté avant de souligner "la nécessite d'une réforme foncière qui est fondamentale pour une bonne gouvernance".
"Il est temps que les Etats retrouvent leur primauté dans la gestion foncière afin de garantir les droits des populations sur leurs terres parce que la gouvernance foncière doit être axée sur le développement social", a-t-elle souligné.