L’Afrique est incontestablement un continent spolié. Mais pourquoi les métropoles européennes et occidentales sont-elles pleines d’Africains au regard hagard et au sourire contrit, désemparés, mendiant et vendant à la sauvette, « bossant» durement, le balai ou la pelle en main, fouillant les poubelles et les bennes à ordures derrière les restaurants? Quel désespoir a bien pu chasser ces Africains hors de leurs pays ensoleillés et qu’ils aiment tant, et les pousser sur ces chemins de l’exil pleins de périls?
Leurs exodes risqués se sont amorcés il y a quelques années au Sénégal, en Côte d’Ivoire, en RDC, au Burkina Faso, au Kenya, en Somalie, au Mali ou au Rwanda…Ces exodes ont toujours débuté là où leur vie était menacée. Puis par monts et vallées, par car, train ou bateau, la longue caravane des déshérités s’est ébranlée, abandonnant ça et là des éclopés, des affamés, des épuisés et des morts vivants dans le grand désert brûlant, sur les chemins de brousse mal famés, dans l’océan déchaîné jusqu’à Ceuta et Melilla l’insolente, Tripoli la décadente, Alexandrie l’énigmatique ou Tunis la tragique.
Là, les derniers rescapés de l’aventure se verront proposer, par un bandit passeur, de compléter le prix de la traversée du continent vers un paradis illusoire pour démunis où ils iront grossir les rangs des exclus de la prospérité tapageuse et surfaite de l’Occident. Sur ces convois de la mort, ces pauvres hères ne savent pas encore qu’au bout du chemin, ils seront arraisonnés avant d’être renvoyées à leurs terres d’amertume. Mais pourquoi tant d’immigrants africains affrontent-ils le désert, l’océan et la mer, les garde-côtes et les passeurs tueurs pour migrer vers l’Europe, ce continent de malheur ? C’est que dans les pays africains, des compagnies minières pillent le minerai précieux sans rien laisser aux « crève-la-faim » (les Africains), si bien qu’après avoir travaillé pour presque rien dans ces chantiers d’enfer (les mines), les fils de l’Afrique, s’ils n’y meurent pas, entreprennent la traversée de la jungle, des savanes, des déserts, des barbelés, de la mer meurtrière afin d’aller gagner quelques deniers à expédier aux parents restés au.
Pillage des ressources économiques
Faisons la démonstration de ce crime (le pillage) à partir de l’exemple du coltan, ce métal rare indispensable à la fabrication de cellulaires et de téléviseurs. Le coltan est extirpé des puits de mines artisanales en République démocratique du Congo (80 % des réserves mondiales), puis aussitôt exproprié et exporté vers les usines de transformation d’Europe, d’Amérique et surtout d’Asie. C’est la transformation industrielle du minerai qui crée de la valeur et de la plus-value d’où les capitalistes tirent leurs profits industriels et l’Etat, ses impôts et taxes. Le kilo de coltan traité se vend à 500 $ sur le marché. L’extraction minière du coltan rapporte très peu. Le salaire d’un mineur de la province du Kivu (RDC) se situe entre 10$ et 50$ par semaine, ce qui est revient tout de même au quadruple du salaire du Congolais moyen (10$ à 50$ par mois). Un mineur extrayant en moyenne 1 kg de coltan par jour, 7 jours par semaine, reçoit donc un salaire hebdomadaire médian de 35$ contre une production de 7 kg x 500$ = 3 500$, soit un pour cent de la valeur de la marchandise.
Croyez-vous que l’Afrique reçoit sa juste part des richesses qu’on lui vole ? En moyenne, chaque kg de coltan coûte la vie à deux enfants mineurs dans le Kivu. Et peu importe la langue, l’ethnie ou la religion de ces jeunes souffre-douleur. Ces enfants meurent sous les éboulis dans des mines artisanales délabrées. L’internationalisation de l’exploitation capitaliste sévit dans ce pays dans toute son ignominie. Armées et financées par des multinationales des nouvelles technologies comme Apple, Nikon, Sony, Nokia, Ericsson et autres monopoles occidentaux, les troupes du Rwanda, de l’Ouganda et du Burundi occupent la région du Kivu afin d’y exproprier le coltan exploité par de misérables flibustiers armés avec la complicité des Généraux et seigneurs de guerre congolais, rwandais et ougandais. En corolaire de ces salaires de misère dans la mine du Kivu, chacun ne se rappellera de l’assassinat de 34 mineurs sud-africains, soi-disant libérés de l’Apartheid, par la police raciste d’Afrique du Sud pour cause de grève ouvrière visant à hausser un salaire de 400 euros par mois : cela s’appelle mourir de faim en peinant durement. De tels salaires « crève-la-faim » n’assurent même pas la reproduction élargie de la force du travail.
En d’autres termes, plus l’ouvrier africain travaille, plus il se rapproche de la mort par inanition lente. Ces salaires n’assurent pas non plus l’édification d’un marché national consistant sur lequel s’appuierait la bourgeoisie marchande locale pour assurer l’accumulation primitive du Capital constant (CC) puis l’investissement en usines (CV) et le « Take off » capitalistique industriel moderne. Il en résulte que dans la division internationale du travail induite par l’impérialisme occidental dominant (du moins jusqu’à présent), l’Afrique a toujours obtenu le rôle de fournisseur de matières premières. Au début (à titre de fournisseurs de bêtes de somme) esclaves valant moins que leur poids de céréales, puis fournisseurs de bois précieux et de denrées alimentaires spoliés sur des plantations expropriées aux autochtones comptant pour moins que rien dans ce marché. Enfin, on assiste aujourd’hui à la spoliation des minéraux rares (dont le coltan), des pierres précieuses et du pétrole (10% des réserves mondiales) dont les peuples locaux ne tirent pratiquement aucun bénéfice.
Protection des pilleurs étrangers par leurs serviteurs nationaux
Un service de garde-chiourme des intérêts locaux des compagnies impérialistes étrangères (dont canadiennes) est assuré par une caste de prédateurs (rois nègres cravatés, Généraux de carnaval en képi ) entourés de meurtriers, de repris de justice et de corsaires déguisés en militaires et mis au service de clans négriers appointés par quelques grandes entreprises monopolistes (les dits monopoles miniers) solidement abouchés aux ambassades occidentales de leur pays d’origine affectées dans ces contrées saignées à blanc. Tant que le Président-nègre local accomplit correctement son travail d’adjudant et tant qu’il réfrène ses appétits de gourmand (n’espérant jamais devenir aussi gros que le bœuf de la fable) et tant qu’il sait embrasser la main qui le maintient sur son trône de paille, sa réélection « démocratique » est assurée.
Mais que ce goinfre noir prétentieux tente seulement un jour de redresser l’échine et de vouloir s’affranchir de cette tutelle dominatrice , qu’il manigance quelque nouvelle alliance avec une nouvelle puissance (les cas de Gbagbo en Côte d’Ivoire, de Tandia au Niger, de Kadhafi en Libye ou de Kabila en RDC), alors les foudres de l’enfer « démocratique » de l’Occident hypocrite s’abattent aussitôt sur le récalcitrant : l’élection hier encore «démocratique » est aussitôt invalidé par l’Élysée, la Maison Blanche , le 10 Downing Street ou le Reichstag allemand, la dite « communauté internationale » et l’opposant complaisant décrétés gagnants sur-le-champ. Alors, le « démocrate » devient tyran, l’ami et l’allié d’hier deviennent usurpateurs et les bombardiers et drones téléguidés depuis les capitales occidentales fauchent soudainement les vies des populations et palais princier devenu tout à coup outrancier après 30 ans toléré. Alors, quelques criminels de guerre seront promus Généraux d’opérette, et des malfrats (gardes de corps de ce prétendant) deviendront officiers d’intendance chargés d’assurer la loyauté de ce nouveau métayer de la corvée présidentielle qui consiste essentiellement à signer les décrets de prospection et d’exploitation des claims miniers, pétroliers et forestiers et les contrats d’achat d’armements afin d’assurer la reproduction élargie d’un pouvoir compradore soumis.
La petite et la moyenne bourgeoisie africaine « socialiste »
L’économie nationale des pays africains étant dominée et spoliée par les pays impérialistes occidentaux, la petite et moyenne bourgeoisie nationale africaine, fragile et instable, n’a souvent pas grand accès aux prébendes, bakchichs, postes administratifs, gouvernementaux, judiciaires et militaires lucratifs, ni à la propriété foncière réservée à la grande bourgeoisie compradore. Ces fragments de classes sont donc aigris et menacés de paupérisation et d’éradication, tout comme leurs cousins nord-américain et européen. La tentation est alors très grande pour ces sections de classes moribondes de lancer leur peuple dans une révolte aventurière sous le sceau frauduleux du « socialisme ». L’Angola, l’Algérie et l’Éthiopie sont de ces pays qui ont connu des guerres « populaires » pour assoir le pouvoir de charlatans et de leurs sectes de prétendants moyens et petits bourgeois.
On sait aujourd’hui ce qu’il advint de ces tyrans pseudo-socialistes. Parfois, le néo-colonisateur ne laisse pas assez à boire et à manger. Il n’y a pas suffisamment de prébendes alléchantes pour satisfaire tous les larbins locaux vainqueurs du précédent gouvernement. Si bien que le partage du butin devient source de conflits sanglants entre pirates intra-tribaux et intra-muros. C’est ce qui se produit actuellement à Abidjan entre Ouattara et ses sergents d’apparat dont certains ont été abandonnés dans le caniveau au Ghana et au Burkina Faso. D’où les récents assassinats à la frontière du domaine convoité et contesté à la fois. Le prolétariat n’a rien à faire de ces guerres entre hyènes et chacals.
Quelles solutions aux problèmes africains ?
Par les temps qui courent, les peuples africains, loin de se reprendre en main et de mener à bien leurs luttes de libération contre la domination néocoloniale impérialiste et surtout contre leur bourgeoisie compradore nationale organisée en castes autour de généraux (seigneurs de guerre complaisants), laissent plutôt tous ces vauriens offrir leurs services d’hommes de main aux différentes puissances hégémoniques. Aujourd’hui, en Afrique, certaines anciennes puissances coloniales ont réapparu sur le devant de la scène, concurremment à leur allié et concurrent américain face à la Chine, nouvelle puissance montante. En 2012, la Chine est devenue le premier partenaire commercial de l’Afrique devant les Etats Unis et la France. La Chine impérialiste a construit le siège social de l’Union africaine et chaque année, elle investit des milliards de dollars en projets routiers et ferroviaires. Elle exploite les mines et le pétrole et change la donne en construisant des usines (remises clés en main) en Éthiopie notamment, créant ainsi un prolétariat africain au Nord du continent, complément au prolétariat de l’Afrique du Sud.
Ce sont là d’excellentes nouvelles pour la classe révolutionnaire africaine qui voit ainsi grossir ses rangs (8). Si vous souhaitez combattre les sectes religieuses intégristes, construisez des usines en Afrique. Voilà les causes fondamentales de l’exode africain vers l’hémisphère Nord. Les puissances impérialistes occidentales absorbant l’usufruit des ressources naturelles et expropriant une grosse part de la plus-value ouvrière et paysanne ; ainsi que les profits et les revenus des Etats croupions, il ne reste pratiquement rien pour la survie de ces pays. Aussi, plutôt que de se laisser mourir, les Africains suivent la trace de leurs richesses jusqu’au Nord de la Méditerranée.