Au moment où se déroulait au CICB en grande pompe (félicitations au comité d’organisation) la cérémonie de signature de » l’Accord de paix et de réconciliation au Mali » issu des pourparlers d’Alger, les narco-séparatistes kidalois lançaient des attaques contre diverses localités dans les environs de Menaka, leur finalité première étant de déloger les forces patriotiques de la Plate-forme de cette ville dont elles ont vaillamment pris le contrôle le 27 avril dernier.
Ces raids, qui ont provoqué des victimes civiles dans au moins trois villages et donné lieu à des pillages (vols de bétail notamment) et destructions de biens, visaient en outre à délivrer un message clair : les narco-séparatistes ne se reconnaissent pas dans l’accord signé dans la solennité à Bamako. Il est sans objet dans la mesure où il ne prend pas en compte leur prétention à la création de « l’Azawad » en tant qu’entité » géographique, politique et juridique » libre de se fédérer avec ce qui restera du Mali ou de s’en séparer définitivement.
Aussi, la cérémonie qui a fait se déplacer sur les berges du Djoliba les hauts dirigeants d’institutions représentatives de la Communauté internationale, une dizaine de Chefs d’Etat et de gouvernement africains, des notabilités prestigieuses comme l’émir de Kano, au Nigeria, est-elle, aux yeux des narco-séparatistes, nulle et de nul effet.
Au demeurant, dans la déclaration jointe à leur paraphe du » document d’Alger » le jeudi 14 mai, veille de la signature à Bamako dudit document, ils ont pris soin de consigner ces précisions. Non sans rappeler que lors de sa visite à Kidal, le 17 mars, la MINUSMA leur a promis que de nouvelles discussions seront ouvertes entre les parties en conflit pour examiner les doléances présentées, notamment celle relative à la question de « l’Azawad« .
Comme pour leur donner raison, il a été donné aux téléspectateurs de voir et d’entendre avec étonnement le chef de la Mission onusienne, Mongi Hamdi, affirmer à haute et intelligible voix, lors de la même cérémonie de paraphe du 14 mai dans la capitale algérienne, que de nouvelles discussions seront effectivement ouvertes pour étudier les doléances non satisfaites des narco-séparatistes.
C’est tout le contraire que ce personnage avait dit officiellement au sortir de la rencontre du 17 mars à Kidal. Il avait, en effet, proclamé que « les négociations étaient terminées, qu’il n’y en aura pas de nouvelles » et invité, en conséquence, ses interlocuteurs à parapher au plus vite, puis signer, le moment venu, l’accord obtenu à Alger.
Le gouvernement malien lui-même était sur la même ligne de fermeté. «Les négociations sont derrière nous et il n’y en aura pas d’autres» a-t-il clamé en plusieurs occasions.
Après le refus du MNLA, du HCUA, du MAA-dissident de signer l’accord sauf s’il est réaménagé à la suite de nouvelles négociations pour intégrer leurs desiderata déjà déclarés inacceptables et par les autorités maliennes et par la médiation internationale et après ce qui ressemble bien à une volte-face de la MINUSMA, à moins qu’il ne s’agisse d’un double jeu de sa part, IBK se trouve dans une situation très inconfortable.
Retourner à Alger et se rasseoir à la même table que les bandes armées de l’Adrar des Ifoghas et leurs supplétifs des confins de Taoudenni équivaudrait à aller à Canossa. Pour un homme qui, déjà, déteste être » trimbalé« – du moins à ce qu’il en dit- cela ferait trop, assurément.
Ce serait surtout une atteinte grave à » l’honneur » et à » la grandeur » du peuple malien dont il se veut l’inflexible défenseur et auquel on aura finalement fait voir de toutes les couleurs. Et une insulte à toutes ces personnalités que IBK lui-même aura » trimbalées » sous une chaleur suffocante à Bamako pour la signature d’un accord de paix qui n’en est pas tout à fait un, eu égard à ce qu’il n’est pas reconnu comme tel par l’essentiel de la partie adverse.
En revanche, en ne s’y rendant pas et en évitant de se prêter à des négociations interminables qui ne feront qu’éterniser la crise (comme au Sahara occidental où, depuis 40 ans, l’ONU s’est avérée incapable de trouver une solution acceptable par toutes les parties) IBK aura beau jeu de placer la communauté internationale face à ses responsabilités.
C’est elle qui, à travers la MINUSMA, a initié, financé, organisé le dialogue inter-Maliens qui s’est déroulé, huit longs mois, à Alger et a abouti à l’accord dont toutes ses composantes se sont félicitées, l’ont paraphé le 1er mars avant de le signer ce 15 mai à Bamako. Revenir sur le même texte parce qu’il a été rejeté par les narco-séparatistes est un désaveu pour toute la médiation internationale à commencer par l’Algérie dont les efforts, la patience et les sacrifices ont été unanimement reconnus et salués.
Sans compter que ce que la rébellion kidaloise réclame ne peut, en aucun cas, lui être cédé. IBK l’avait dit en son temps: » Pas d’indépendance, pas d’autonomie. L’unité, l’intégrité territoriale, la forme laïque et républicaine de l’Etat ne sont pas négociables « . Il peut compter sur les Maliens de tous bords politiques, de toutes catégories sociales et de toutes confessions religieuses pour qu’il en soit ainsi. Et pas autrement.
Saouti HAIDARA