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Général Bernard Barrera : « Serval fut une opération exemplaire »
Publié le mercredi 20 mai 2015  |  Direct Matin




Commandant de la composante terrestre de l’opération « Serval » au Mali, le général Barrera publie ses notes de guerre prises en temps réel. Dans ce récit vif, humain et enthousiaste, il rend compte de son commandement et du comportement remarquable des hommes engagés dans ce combat contre les jihadistes.
« Serval » est-elle le prototype de l’opération extérieure réussie ?
Du point de vue militaire, « Serval » fut un modèle de réactivité, de mise en place, de coordination interarmées et d’efficacité dans les combats. Politiquement, sept mois après le déclenchement des opérations, des élections démocratiques pouvaient être organisées au Mali tandis que les soldats français stabilisaient la région en étroite coordination avec leurs camarades maliens, tchadiens et nigériens et avec le contingent de la Minusma. On peut donc vraiment parler d’une opération exemplaire.
Pourtant, les conditions logistiques étaient parfois précaires, sinon critiques…
Six jours après mon arrivée sur le terrain, nous libérions Tombouctou. Nous avons multiplié les effets de surprise et les manœuvres imaginatives, redécouvrant sur ces grands espaces ce que l’armée française sait faire depuis toujours. Ces efforts, conjugués à une expérience de près de vingt années d’« opex » (opérations extérieures, NDLR), à une doctrine militaire et à une formation pertinentes et une motivation à toute épreuve ont permis ce succès. Mais l’élastique était tendu à l’extrême comme j’ai coutume de le dire de manière imagée.
A vous lire, un esprit galvanisant semble avoir soufflé sur « Serval »
Une telle mission – libérer le Mali – ne survient sans doute qu’une seule fois dans la carrière d’un militaire, quel que soit son niveau. Cela a contribué sans aucun doute à créer un état d’esprit très particulier, toutes unités confondues. On peut vraiment parler d’un « esprit de victoire », consolidé par l’accueil formidable des populations que nous libérions et par l’implication du politique à Paris.
Qu’ont révélé les jeunes qui ont servi au Mali sous votre commandement ?
Quand le pays a le courage de ses actes, quand la France défend ses libertés, quand la population suit, les jeunes militaires français révèlent de grandes qualités s’ils sont bien commandés. Comme le grognard ou le poilu, le soldat du Mali s’inscrit dans un pacte multiséculaire qui forgé le pays. Contre tous les pessimistes, « Serval » m’a confirmé que la France a une belle jeunesse, la même qui protège la population avec Vigipirate / Sentinelle.
Quelles leçons strictement militaires tire-t-on de « Serval » ?
Qu’il faut toujours préparer la guerre d’après. Si nous avions reproduit le modèle déployé en Afghanistan – en particulier la stratégie des bases avancées – nous n’aurions pas enregistré les mêmes résultats. C’est en anticipant une guerre de mouvement que nous avons connu ce succès. L’opération a également fait la démonstration de l’efficacité des brigades polyvalentes et interarmes.
A vous lire, il existe presque une dimension esthétique dans votre récit.
C’est la dimension humaine qui est belle. Tout a tenu grâce aux relations humaines et à la confiance. Un convoi de 70 véhicules traversant le Mali sous les ordres d’un lieutenant de 28 ans, cela a quelque chose de magnifique. Mais la guerre demeure terrible. Notre adversaire, s’il était courageux et combattait sans esprit de recul, n’était pas valeureux. Affranchi de toutes lois, il n’hésitait pas à envoyer des gosses au feu, à piéger les cadavres ou à nous envoyer des kamikazes.
L’ancrage dans l’histoire et dans le sol est très présent dans votre livre.
Notre nation est vieille de 2000 ans. Elle a été forgée par le glaive et le poignet. Si nous sommes libres aujourd’hui, c’est parce que des fils de France se sont fait tuer pour leur pays. L’attachement au passé, à une tradition de liberté, n’est pas que folklorique. Nos hommes sont aujourd’hui fiers de leur passé. Par ailleurs, le citoyen français n’est pas une créature hors-sol. Même à 5000 kilomètres de distance, c’est notre pays, notre village, notre clocher, que nous défendons.
Comment réagissent les anciens de « Serval » qui patrouillent dans le cadre de l’opération « Sentinelle » aujourd’hui ?
Ils savent mieux que quiconque contre qui ils se battent en coordination avec les forces de sécurité.
Par Direct Matin, publié le 20 Mai 2015 à 08:02

Source: Direct Matin
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