Récit - Les soldats de Barkhane ont éliminé deux figures du terrorisme, mais les attaques continuent.
Cinq jours après la signature d’un accord de paix au Mali, les forces spéciales de Barkhane ont éliminé dans la nuit de lundi à mardi à l’est de l’Adrar des Ifoghas, dans l’extrême nord malien, deux chefs importants des groupes armés du Sahel circulant en convoi. Amada Ag Hama, dit «Abdelkrim le Touareg», affilié à Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi), avait revendiqué l’assassinat des deux journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, à Kidal, en novembre 2013 ; Ibrahim Ag Inawalen est un ancien colonel malien qui avait déserté pour rejoindre l’encadrement du groupe islamiste Ansar ed-Dine.
Ifoghas. Les deux hommes étaient des rouages majeurs de ces organisations. Abdelkrim le Touareg, appelé encore «Al Targui», émir d’Aqmi, était un membre de la tribu des Ifoghas, de haut lignage touareg. A ce titre, il a usé de son statut pour rallier certains Touaregs à la cause d’Al-Qaeda.
Les deux dirigeants terroristes faisaient partie des principaux chefs des groupes jihadistes qui ont contrôlé le nord du Mali en 2012, jusqu’au lancement en janvier 2013 de l’opération française Serval aujourd’hui remplacée par Barkhane. Abdelkrim le Touareg serait responsable de la mort de Michel Germaneau, tué après un raid militaire franco-mauritanien à l’été 2010. Mais aussi de celle de Philippe Verdon, en juillet 2013, enlevé au Mali avec Serge Lazarevic. Ce dernier a été libéré fin 2014.
Al-Targui aurait également joué un rôle dans l’enlèvement à Arlit, au Niger, des otages d’Areva. Et pour Paris, Ibrahim Ag Inawalen aurait été l’un des acteurs de la tuerie d’Alguelhok en janvier 2012 : plus de 80 hommes désarmés ont été exécutés d’une balle dans la tête ou égorgés. Encore aujourd’hui, le traumatisme reste vif dans l’armée malienne.
«La France a la mémoire longue», a commenté Laurent Fabius jeudi. Cette opération, après celle ayant mis hors de combat Ahmed al-Tilemsi, haut responsable du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest), tué en décembre dans le nord du Mali, «porte un nouveau coup dur aux groupes armés terroristes sahéliens», a estimé le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian.
Insécurité. L’opération affaiblit certes le haut commandement des groupes terroristes dans le nord du Mali mais serait «l’arbre qui cache la forêt», selon une source sécuritaire malienne. A l’écouter, «le problème aujourd’hui est la croissante insécurité qui menace la zone de Mopti où il ne se passe pas une semaine sans une attaque menée par d’anciens membres de groupes jihadistes qui sont en train de se reconstituer».
Parallèlement, la Minusma (Mission des Nations Unies pour la stabilisation au Mali) à Bamako a essuyé mercredi la première attaque la visant directement dans la capitale. L’assaut a été mené contre une résidence de ses personnels militaires où un homme armé a tenté de mettre le feu à un véhicule et a tiré sur le gardien qui l’a blessé. Il a pris la fuite en abandonnant deux grenades sur place.
Jean-Louis LE TOUZET
Source: Libération