«Je prétends que ce qui s’est passé en mars 2012, c’est la preuve que ce qui s’est passé en 1991 a échoué. Si nous n’avions pas échoué, il n’y aurait jamais eu un coup d’Etat au Mali. Ça, c’est ma conviction profonde. Aujourd’hui, le dispositif politique partisan qui prévaut est celui qui est né après le choc de 1991. Mars 1991, grand choc politique, grandes violences, les acteurs politiques étaient dans un processus de négation les uns des autres. Il y en a qui avaient juré de ne jamais se parler. C’est cette dialectique qui a produit le dispositif actuel et qui, à l’époque, mettait en face les uns aux autres. Ce qu’on appelait le Mouvement démocratique et ce qu’on avait désigné à l’époque comme les restaurateurs avec entre les deux, des partis historiques tels que l’Us-Rda et le Psp».
Ces propos sont du président de l’Alliance des forces démocratiques pour le Mali (Afd-Mali), Tiéman Hubert Coulibaly. Il les a tenus le samedi 30 mai 2015 au Centre international de conférence de Bamako, lors d’un séminaire organisé par son regroupement politique. L’objectif dudit séminaire était d’échanger sur la vision d’un grand parti politique à former avec les différents partis de l’Afd-Mali ; de définir la stratégie qui va conduire à cette vision et de parler de l’actualité nationale, à savoir la signature de l’accord pour la paix et la réconciliation signé le 15 mai dernier à Bamako.
Parlant du coup d’Etat de mars 2012, Tiéman Hubert Coulibaly a rappelé que les auteurs ne pouvaient pas diriger le pays parce qu’ils n’en avaient pas la qualification, ni les compétences, encore moins la légitimité. Rien, soutient-il, ne les fonde à prendre le pouvoir politique. D’autant que l’article 121 de notre Constitution dit que l’essence du pouvoir est dans l’élection et cette même Constitution dit que «tout coup d’Etat est un crime imprescriptible contre le peuple du Mali».
Avant de déclarer : «Nous ne pouvons pas laisser ce crime prospérer et nous ne pouvons laisser un pouvoir illégitime, non désiré s’installer au Mali. Les gens ont beaucoup parlé de la Cédéao et la communauté internationale. C’est vrai, elles ont travaillé, mais elles se sont appuyées sur la résistance intérieure au coup d’Etat. N’eut été cette résistance, les choses allaient être difficiles».
Et le président de l’Afd-Mali de poursuivre : «Je fais ce grand détour vers l’histoire proche pour vous dire que pendant cette période, nous avons eu des difficultés extraordinaires à mettre la cohésion dans ce groupe qui avait pour projet de sauver notre Constitution. J’ai vécu cette expérience, c’est pour ça que je dis qu’elle a été traumatisante parce que plusieurs fois, ce projet de sauvetage de la République a failli échouer.
Il a failli échouer parce que nous manquions de cohésion, nous n’étions pas capables de tracer une ligne et nous mettre derrière cette ligne. Les forces étaient dispersées et ça a failli créer un second danger pour la République. Et pendant ce temps, les partis politiques se créaient tous les jours. C’est ce qui était inquiétant parce que ce n’était pas efficace».
Les principes démocratiques nés de mars 1991 dénoncés par Tiéman Hubert Coulibaly
Pour Tiéman Hubert Coulibaly, aujourd’hui, le dispositif politique partisan qui prévaut est celui qui est né après le choc de 1991. Car, en mars 1991, il y a eu un grand choc politique et de grandes violences. Selon lui, les acteurs politiques étaient dans un processus de négation les uns des autres. «Il y en a qui avaient juré de ne jamais se parler. C’est cette dialectique qui a produit le dispositif actuel et qui, à l’époque, mettait en face les uns aux autres. Ce qu’on appelait le Mouvement démocratique et ce qu’on avait désigné, à l’époque, comme les restaurateurs avec entre les deux, des partis historiques tels que Us-Rda et le Psp».
C’est qui a fait que, selon Tiéman Hubert Coulibaly, le premier mandat d’Alpha Oumar Konaré a été difficile, mais structurant, parce que les choses se sont mises en place au fur et à mesure à tel point que ceux qui étaient considérés comme ennemis congénitaux, naturels sont devenus amis et alliés sur qui on s’appuie. «Il s’agit du débat qui a eu lieu entre l’Udd et l’Adéma. Des cadres de l’Adéma avaient juré ne jamais adresser la parole à l’Udd, parce que c’était des restaurateurs», a-t-il ajouté.
«Je prétends que ce qui s’est passé en mars 2012, c’est la preuve que ce qui s’est passé en 1991 a échoué. Si nous n’avions pas échoué, il n’y aurait jamais eu de coup d’Etat au Mali. Ça c’est ma conviction profonde», a déclaré le président de l’Afd-Mali. «Est-ce que l’ordre politique qui est né de 1991 est capable de prendre en charge aujourd’hui le problème de ceux qui doivent faire le Mali d’aujourd’hui et de demain ?» s’interroge-t-il.
«Celui qui a 20 ans aujourd’hui n’était pas né en 1991. Nous travaillons pour ceux qui sont en train de naître, qui ont 5 à 20 ans et qui, demain, doivent prendre le Mali sur leurs épaules. Mais ils ne sont pas concernés par ce débat», a laissé entendre Tiéman Coulibaly. Avant de poser cette question : «Quelle offre politique pouvons-nous adresser à cette génération de manière qu’elle reconsidère l’action politique comme étant noble ; à ce qu’elle se dise que se battre pour son pays vaut la peine d’être fait».
Par ailleurs, le président de l’Afd-Mali propose un 2ème argument : le changement qualitatif des ses différents partis en un grand parti tourné vers l’avenir. «J’invalide ce qui s’est passé. Je disqualifie les principes qui sont nés de 1991.
Je dis que notre dispositif partisan ne correspond pas à ce qu’attendent les jeunes. Parce que nous ne disons pas ce qu’ils veulent entendre et si nous ne faisons pas ça, l’action politique n’aura pas beaucoup de chance de réussir. Est-ce que vous rendez compte, dans notre pays, les gens de mon âge sont encore désignés comme étant jeunes ? On nous garde longtemps dans l’enfance.
Or les enfants aujourd’hui savent plus que leurs parents. C’est un problème. Les gens de mon âge sont considérés comme des jeunes et on exclut ceux-là qui ont 20 ans dans nos prises de décisions. Il y a donc problème ! C’est la vérité», a-t-il martelé.
Diango COULIBALY