«Chaque fois que ceux dont les titres sont annulés essayeront d’attaquer l’Etat, nous les attaquerons au pénal…».
Face aux responsables des structures relevant de son Département, le ministre en charge des Affaires foncières a réaffirmé sa croisade contre les ‘’prédateurs’’ fonciers. Tout en appelant à un changement de comportements, Mohamed Ali Bathily a rappelé ses interlocuteurs à leurs responsabilités dans la gouvernance foncière au Mali.
Ce jeudi 4 juin 2015, le ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières a rencontré, au Centre international de conférence de Bamako, les responsables des services centraux de son Département ainsi que les directeurs régionaux et chefs de bureaux des Domaines et du Cadastre. Il s’agissait pour le ministre Bathily de rappeler ses interlocuteurs à leurs responsabilités dans la mauvaise gouvernance foncière au Mali. Cette rencontre était d’autant plus nécessaire que Mohamed Ali Bathily a attiré l’attention des uns et des autres sur les risques d’implosion sociale liés à la spéculation foncière au Mali. Ce, à cause, malheureusement, de la complicité de certains agents de l’Etat qui foulent aux pieds les règles domaniaux et foncières. «Aujourd’hui, l’application de la loi foncière au Mali est une source de conflit social exaspéré et désespéré.
On a beau vouloir être sourd, les conséquences des actes posés par ceux-là qui sont en charge d’établir les documents fonciers font du bruit partout, de la police à la prison, en passant par la gendarmerie et la justice», a regretté Me Bathily. Cette situation, de son avis, commande que l’on se pose la question de savoir si l’Etat aurait donné des pouvoirs à certains de ses agents pour créer autant de conflits et de malentendus dans la société. «Dans ce cas, dans quel but l’Etat l’aurait fait ? S’il ne l’a pas fait, pourquoi ces agents n’appliquent pas le droit, tel qu’ils puissent, au contraire, être sources de stabilité et de sécurité.
Cette question est posée à la face de l’Etat malien, pas de vous en tant qu’administration», a tonné l’orateur, rappelant qu’il y avait une sorte ‘’d’autisme’’ administratif. Or, fera-t-il savoir, le caractère inattaquable du titre foncier est lié au respect des conditions de sa création. «Malheureusement, il n’y a pas une région, il n’y a pas un jour ou les dénonciations ne pleuvent sur ces conditions de création des titres», reconnait-il. Au regard de la gravité de la situation, Mohamed Ali Bathily a appelé à un changement des comportements parce que l’Etat ne peut être, dit-il, complice de la spoliation. En tout cas, la question foncière est désormais une priorité parmi les priorités gouvernementales, et le ministre Bathily tenait à le faire savoir. «Nous allons revisiter, chaque fois qu’une demande nous est faite, les conditions de création des titres.
Et si quelqu’un accepte d’émettre un titre foncier sur une maison habitée, il en répondra», prévient-il, menaçant les agents fautifs de suspension et de suppression de leurs salaires en cas de procédure relative à une telle forfaiture. Quoi qu’il en soit, la volonté de changement affichée par le gouvernement semble être irréversible et tous ceux qui voudront la contrarier risquent de se faire emporter par. «Il y aura désormais deux vocations dans ce pays: celle de faire construire les choses dans les règles et la vocation de combattre clairement ceux qui ne veulent pas de ces règles», a menacé Mohamed Ali Bathily, rassurant que le gouvernement prendra toutes ses responsabilités.
Le Ministre a, par ailleurs, promis que l’annulation des titres fonciers, à laquelle il a récemment procédé dans le cercle de Kati, va se poursuivre. «Lorsque vous agissez en dehors de votre compétence, tous les actes que vous posez sont juridiquement inexistants …et l’annulation de ces actes est de plein droit à tout moment», a rappelé l’orateur pour ainsi dénoncer le manque de loyauté de certains agents de l’Etat dans l’application de la loi. Et Me Bathily de soutenir: «on crée des titres et on se réfère à des pages vierges. Cela veut dire que vos registres sont cotés et mal paraphés».
Le ministre des Domaines et des Affaires foncières a ensuite réaffirmé la volonté du Gouvernement d’aller au bout de sa logique. Partant, il a prévenu: «chaque fois que les gens dont nous allons annuler les titres vont essayer de nous attaquer, nous les attaqueront au pénal et rechercheront la complicité de tous les agents qui ont trempé. Ça va aller du gouverneur au directeur régional en passant par le préfet et le chef de bureau». Car, fera-t-il savoir, nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. Pour conclusion, l’orateur a invité ses interlocuteurs à faire en sorte que le plus pauvre retrouve enfin confiance en leur administration pour renforcer notre vivre-ensemble.
Il a aussi promis d’organiser, dans les jours à venir, une tournée dans chaque région du Mali, afin de faire l’état des lieux des problèmes fonciers dans notre pays.
Bakary SOGODOGO