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Drones français au Sahel : les jihadistes vus du ciel
Publié le samedi 13 juin 2015  |  AFP
Drone
© Autre presse
Drone americain devant entrer en action au Mali.
Un avion sans pilote destiné à fournir des renseignements.




Niamey - Ce sont des yeux dans le ciel du désert, perçants, invisibles: les drones de l’armée française traquent en permanence groupes jihadistes et preneurs d’otages dans les sables du Sahel.

"Ça peut commencer par un gars en mobylette, tout seul entre les dunes", explique à l’AFP, sur la base de Niamey d’où sont opérés les cinq drones français, le colonel Éric Bometon, commandant du "Détachement Air" (DetAir) de l’opération Barkhane au Niger.

"Suivons-le. Ah, trois ou quatre mobylettes se rassemblent... Ils vont autour d’un puits, il y a des animaux. Bon, normal. On laisse tomber. Mais parfois c’est plus étrange : la mobylette peut arriver sur un campement, des gens quittent le camp, font quelques kilomètres pour téléphoner, certains se retrouvent...", poursuit-il.

"Une vie en-dessous qu’on essaie d’analyser. On fait remonter à l’état-major, c’est croisé avec d’autres informations, d’autres sources que nous avons. Renseignement humain, électronique. On recoupe vite, parce que les gens ne restent pas longtemps au même endroit... Et c’est comme ça qu’on peut tomber sur le lieu de détention d’un otage, par exemple", sourit l’officier.

Depuis leur mise en service à Niamey, le 18 janvier 2013, une semaine après le lancement de l’opération Serval qui a coupé la route à une colonne jihadiste qui menaçait Bamako, les drones français ont passé des milliers d’heures à scruter le désert.

Aux deux Harphang achetés en Israël sont venus s’ajouter depuis 2014 trois Reaper américains, plus modernes et performants, dont le dernier vient d’arriver.

"On a appris à connaître l’ennemi. Ses habitudes. Les différences entre un groupe et un autre", ajoute le colonel, s’excusant de ne pouvoir en dire plus.

"Si je révèle trop nos petit trucs, l’ennemi le prendra en compte".
"Ce sont des gens très intelligents, très adaptés au terrain. La preuve, ils sont là depuis longtemps. Nous nous adaptons tous les jours à leurs modes d’action qui changent sans cesse", explique-t-il.

- Ne jamais lâcher la cible -

Les pilotes, les interprètes d’images et les officiers de renseignement, qui travaillent ensemble derrière plusieurs écrans dans les cabines climatisées installées sur l’aéroport de Niamey (les mêmes que celles qui apparaissent régulièrement dans les films hollywoodiens) viennent du seul escadron de drones de l’Armée de l’air, le 1-33 "Belfort".

"On revient régulièrement dans la région" explique le commandant Paul (on ne peut révéler que son prénom), pilote de chasse formé au maniement de ces avions pilotés à distance. "Deux, voire trois fois par an, pour des missions de deux mois".

"Du coup, on connaît bien la façon d’être de l’ennemi, comment il opère, comment il vit. On affine, pour être de plus en plus efficace", ajoute-t-il.

Équipés de moteurs de petits avions, les drones restent longtemps en l’air (15 heures pour le Reaper) et peuvent se relayer pour ne jamais lâcher une cible de leurs yeux électroniques.

"Nous pouvons suivre par exemple un chef de katiba pendant plusieurs jours pour intervenir au bon moment", dit le commandant Paul. "On apprend où il va, qui il voit, quels sont ses contacts, ses habitudes".

Les images, qui sont analysées, retouchées, peuvent être complétées de dessins, de symboles et sont transmises en temps réel à de multiples utilisateurs. Jusqu’aux troupes sur le terrain qui, grâce à un système baptisé "Rover" peuvent les recevoir sur des tablettes.

Un chef de patrouille pourra ainsi disposer d’une image, bien plus précise que celle d’un satellite, et datant de quelques minutes, du village dans lequel il s’apprête à pénétrer.

Sur des clichés anciens, les deux officiers montrent des véhicules garés dans le désert. La définition est telle qu’on en devine la marque et le modèle. Pour des hommes armés, on voit quelles sont leurs armes.

"On est très complémentaires avec les chasseurs", ajoute le commandant Paul. "Nous restons longtemps sur zone, invisibles. L’état-major peut envoyer les chasseurs, qui ont un temps sur zone très restreint, pour qu’ils arrivent pile au moment où on aura besoin d’eux".

L’objectif, en jargon militaire, pourra être "traité", c’est-à-dire bombardé. Peu après, en silence, l’oeil dans le ciel évaluera les dégâts.

mm/sst/mrb/fal
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